Devenu depuis éditorialiste en chef du quotidien montréalais, vaisseau amiral de Gesca qui possède la plupart des quotidiens du Québec ainsi assujettis à l’empire de Power Corporation, M. Pratte, est devenu automatiquement le porte-voix de ses maîtres. Le même phénomène s’est d’ailleurs produit dans le cas de son prédécesseur, Alain Dubuc , qui signe maintenant une chronique régulière dans l’ensemble journaux de la chaîne pour assurer que la pensée éditoriale de Gesca rayonne de Montréal vers Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières, Saguenay et Gatineau selon les préceptes de la concentration de l’information.
Comme il fallait s’y attendre, M. Pratte a vite oublié ses beaux principes Ainsi, sous sa férule, les pages d’opinions de lecteurs sont beaucoup plus accueillantes pour les personnes qui expriment des points de vue semblables à ceux qu’il exprime en éditorial. Mais il le nie.
Ayant vécu une expérience particulière avec M. Pratte, je me suis permis de lui envoyer la lettre suivante avec copie à son éditeur, M. Guy Crevier ainsi qu’au président du CA de La Presse. M. André Desmarais, fils de Paul, qui a ses bureaux dans l’édifice de Power Corporation. Je n’ai pas encore reçu de réponse. En voici le texte :
Dans votre éditorial du 12 novembre dernier, vous avez écrit : « Dans nos pages Forum, nous nous faisons un point d’honneur d’accueillir toutes les opinions ».
Je veux témoigner que cette assertion est complètement fausse, tout au moins dans mon cas, et probablement dans celui de plusieurs autres lecteurs de votre journal qui ont des idées progressistes semblables aux miennes. Depuis quelques années, je vous ai fait parvenir de nombreux textes pour publication dans vos pages d’opinion. Vous ne m’en avez publié qu’un seul… qui était critique envers le Parti québécois. Probablement parce que cela faisait votre affaire.
La plupart de mes textes traitaient de la réforme du mode de scrutin au Québec, une question qui m’intéresse depuis mes études en science politique à l’Université Laval au début des annexées soixante. Ma thèse de maîtrise a porté en partie sur là-dessus. J’ai aussi publié un livre sur le sujet et, sans être un expert, je peux me vanter de connaître passablement le dossier.
Avant votre arrivée à l’éditorial, il est arrivée que La Presse ait publié quelques-uns de mes textes. Mais depuis votre arrivée, plus rien. Dans votre récent éditorial vous avez pourtant écrit : « Les pages Forum offriront encore à nos lecteurs l’éventail le plus large possible d’opinions. J’en profite pour encourager à nous écrire tous ceux qui veulent faire valoir leurs idées, qu’ils soient de gauche ou de droite. »
Quel culot ! Ne vous souvenez vous pas de l’échange que nous avons eu privément, en janvier 2005, alors que vous n’aviez publié que des textes favorables à l’avant-projet de loi libéral sur la réforme du mode de scrutin déposé le 15 décembre 2004. J’ai insisté pour que vous publiez le mien qui le critiquait, mais vous avez carrément refusé. Un appel à votre éditeur, M. Guy Crevier, n’a rien donné ; ce dernier n’ayant même pas accusé réception de ma plainte. Depuis lors, j’ai continué à envoyer des textes régulièrement. Mais pas un n’a été publié, même amputé.
Vous ne vous surprendrez donc pas que je sois d’accord avec l’analyste politique Michel Vastel qui a écrit dans sa chronique du 11 novembre dans Le Journal de Montréal : « Au plan politique, libérale et fédéraliste, La Presse ne rejetait aucune idéologie. Mais depuis que les pages d’opinion ont été placées sous la direction d’André Pratte, La Presse rejette, bannit, méprise ».
Monsieur Pratte, il y a quelques années vous avez écrit un livre où vous donniez des leçons d’éthique aux politiciens. Vous auriez intérêt, à suivre les règles que vous avez alors édictées, car votre crédibilité et celle de Gesca, dont vous êtes le porte-voix, sont à leur plus bas de ce temps-ci. À cause de vous et d’une couple d’autres de vos collègues, vos pages éditoriales ont de moins en moins d’influence. Les gens voient clair. Ils se rendent de plus en plus compte de votre manège éhonté pour défendre les intérêts de la classe privilégiée à laquelle appartiennent vos maîtres.
En conclusion, monsieur Pratte, je réitère que vous ne dites pas la vérité et, si je n’étais pas poli, je dirais que vous mentez !