Don Giovanni. Mozart. Mahler Chamber Orchestra, Yannick Nézet-Séguin, 2012.
Acte 1
Après avoir violenté Donna Anna, Don Giovanni tue, lors d’un duel, le père de cette dernière, le Commandeur et quitte les lieux incognito. Apparaît une ancienne conquête de Don Giovanni, Donna Elvira qui ne cessera de se dresser sur son chemin en l’accaparant de multiples reproches. Don Giovanni parvient à s’éclipser d’elle et confie la tâche à son valet Leporello de répondre à ces blâmes pleinement mérités. Don Giovanni rencontre par hasard un groupe de paysans qui célèbrent le mariage de Zerlina et de Masetto. On le devine, Zerlina attire sur le champ l’attention de Don Giovanni qui invite tout le monde à se rendre chez lui pour célébrer la noce à ses frais. Le bal organisé par Don Giovanni est particulièrement festif. Dans la salle de bal, le maître de la maison chante Viva la libertà. La liberté clamée ici semble être celle du plaisir charnel. Mais, dans le contexte politique de l’époque, soit deux ans avant la Révolution française, il se peut qu’il s’agît là aussi d’une revendication politique. Quoi qu’il en soit, nombreuses sont les menaces qui pèsent sur la tête de Don Giovanni. Donna Anna a reconnu en lui son séducteur et le meurtrier de son père. Elvira et Zerlina sont décidées à se venger. Le grand séducteur est finalement démasqué. Il réussit à fuir à la pointe de son épée.
Acte 2
Don Giovanni réussit à échapper à ses poursuivants, mais il se retrouve traqué par la justice et par la statue animée du Commandeur. Il ordonne à Leporello de prendre sa place en enfilant son costume. En se conformant à cette proposition de son maître, le valet s’expose par le fait même au châtiment que ses ennemiEs veulent infliger à Don Giovanni. Au cours de son dernier repas, Don Giovanni se comporte en glouton et rudoie son valet Leporello. Grande est sa surprise lorsque frappe à sa porte la statue du Commandeur. L’heure de la reddition de comptes a sonné. Le Commandeur le saisit de sa main désormais glaciale et exige qu’il se repentît. Don Giovanni refuse. C’est alors que, hurlant de douleur, la terre s’ouvre devant lui, il est entraîné dans les flammes de l’Enfer.
Épilogue
Après cette descente dans les abîmes, les personnages reviennent sur scène pour commenter cette fin tragique. Leporello est à la recherche d’un nouvel emploi, Don Ottavio implore Donna Anna à l’épouser, le couple Zerlina et Masetto se réconcilie et Elvira ira finir ses jours au couvent.
Que dire au sujet de cette œuvre ?
Créé en 1787 à Prague, Don Giovanni de Mozart (et du librettiste Da Ponte) est considéré comme un chef d’oeuvre. Composé dans les dernières années de sa vie, Mozart (1756 à 1791) signe là un de ses plus grands succès. C’est Lorenzo Da Ponte qui aurait proposé à Mozart ce sujet. L’histoire raconte que Casanova aurait même participé aux travaux du librettiste. Il lui aurait même servi de modèle. 1787 est une année terrible pour Mozart, il est hanté par la mort de personnes importantes dans son entourage immédiat, d’abord son ami le comte Hatzfeld, son père et un autre de ses amis, le docteur Sigmund Barisani.
Nous sommes ici en présence d’un dramma giocoso, c’est-à-dire un drame joyeux qui mélange les genres (comique, tragique, pathétique et surnaturel). Le livret de Lorenzo da Ponte reprend le mythe de Tirso de Molina. Sous la plume de ce moine dramaturge, le personnage Don Giovanni incarne la révolte que suscite la morale chrétienne - qui met l’accent sur le péché de chair et la sacralité du mariage. Don Giovanni est l’incarnation du libertin qui hait le monde, combat l’ordre social et les lois divines qui pèsent sur lui et surtout méprise les femmes tout en éprouvant un irréfrénable besoin de les conquérir. Dans Don Giovanni le haut et le bas de l’âme humaine se côtoient. Il y a aussi une espèce de mélange qui va du spirituel aux plaisirs de la chair. Le tout dans une musique (parfois grandiose) qui a été jugée digne d’admiration par Ludwig van Beethoven et Richard Wagner.
Derrière cette quête effrénée de femmes, ce sont Dieu, l’Église et l’ordre du monde que Don Giovanni défie. Sa chute est par conséquent inéluctable et son châtiment foudroyant. Il se retrouve damné à la fin.
L’empereur Joseph II aurait déclaré après avoir vu Don Giovanni qu’il s’agissait d’un opéra « divin […], mais ce n’est pas un plat pour les dents de mes Viennois ». Après avoir entendu ce commentaire impérial, Mozart aurait eu la réflexion suivante : « Laissons-leur le temps de le mâcher »[1].
Conclusion
Cet opéra nous interpelle toujours. Le comportement de Don Giovanni et ses aventures avec les femmes mettent fondamentalement en question les idées que nous nous faisons de l’amour et de l’amour libre, cette forme d’amour sans engagement réciproque.
Yvan Perrier
29 juin 2021
yvan_perrier@hotmail.com
BIBLIOGRAPHIE
Batta, Andréas. 2000. Opéra : Compositeurs, Œuvres, Interprètes. Könemann : Cologne, p. 378-386.
Kobbé, Gustave. 1999. Tout l’opéra : Dictionnaire de Monteverdi à nos jours. Paris : Robert Laffont, p. 548 à 554.
Oussenko, Sylvie. 2009. L’opéra tout simplement. Paris : Eyrolles, p. 48-49.
Plusieurs auteurs. 1977. Dictionnaire de l’opéra. Paris : Ramsay, p. 116 à 119.
Tranchefort, François-René. 1978. L’opéra : 1. D’Orféo à Tristan. Paris : Seuil, p. 136 à 141.
Coffret musical
Don Giovanni de Mozart. Mahler Chamber Orchestra, Deutsche Grammophon 2012.
[1] Oussenko, Sylvie. 2009. L’opéra tout simplement. Paris : Eyrolles, p. 49.
Zone contenant les pièces jointes
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