Édition du 19 novembre 2024

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La révolution arabe

Tunisie : 22e congrès de l’UGTT

Le 22e congrès de l’UGTT (Union Générale Tunisienne du Travail) s’est réuni du 25 au 28 décembre 2011. Une grande partie de celui-ci a été consacrée à l’élection de la nouvelle direction nationale.

Le nouveau Bureau exécutif (BE) est nettement mieux que l’ancien. Il repose sur de véritables militants impliqués dans les luttes, et qui ne sont pas corrompus.

Une liste concurrente avait été constituée autour de proches de l’ancien numéro 2 de la centrale. Elle comportait des soi-disant indépendants, dont certains étaient en réalité proches des islamistes actuellement au pouvoir.

La majorité écrasante des membres du nouveau BE appartiennent historiquement à la gauche syndicale, et c’est une victoire pour celle-ci. La moitié des élus ne sont pas, ou plus, membres d’un parti. C’est par exemple le cas du nouveau secrétaire général. Il faisait partie de la minorité de l’ancien BE et appartient à la mouvance démocratique et de gauche. Il était membre du Parti communiste il y a une vingtaine d’années.

Ce qui a facilité l’élection de la liste arrivée en tête est le fait que les sensibilités politiques n’y étaient pas représentées par des dirigeants de partis. Sami Tahri de l’enseignement secondaire et Mohamed Msalmi de l’Union régionale de Benarous, par exemple, sont respectivement au MPD et au PTPD. Mais ils sont élus au BE en tant que syndicalistes, et n’appartiennent pas à la direction de ces partis.

Le PCOT n’a pas eu le même comportement. Un de leurs militants, Hfayed Hfayed, était sur la liste qui l’a emporté en tant que représentant du syndicat de l’enseignement primaire. Mais le PCOT voulait qu’un de ses militants, Jilani Hammami, soit également au bureau. La majorité des membres de la liste qui a gagné considéraient qu’il n’était pas possible qu’il y ait un deuxième membre du PCOT au bureau.

L’important, maintenant, est de voir ce que va faire cette nouvelle direction dans une situation où de nombreuses revendications s’expriment au niveau démocratique et social. Pour l’instant, il n’est pas possible de lui donner carte blanche. Le passé des élus est connu, mais cela ne permet pas de prédire ce qu’ils vont faire.

Il y a eu, en effet, très peu de discussions politiques dans ce congrès. L’orientation qui en résulte n’est pas bien définie, mais je pense que cela va venir. Le Bureau élu va chercher à transformer l’UGTT. Un grand chantier est ouvert, il est notamment prévu de modifier les statuts.

La liste qui l’a emporté a été constituée, non pas sur la base d’idées, mais de façon à gagner les élections. C’est une des raisons pour laquelle il n’y a pas eu de femmes sur cette liste : ceux qui l’ont constituée pensaient que cela ne permettrait pas de rapporter suffisamment de voix pour que la liste passe (1).

Pour moi, il aurait fallu que la liste qui est venue en tête comprenne néanmoins une femme. Le fait qu’il n’y ait pas de femme au BE est la chose la plus inadmissible de ce congrès. Ce n’est pas démocratique, et cela a choqué beaucoup de militantEs.

Il a été décidé d’ouvrir un débat sur une modification du règlement intérieur, afin d’inclure dans les directions des quotas pour les femmes, à commencer par les unions régionales et les syndicats de branche (2). Il faudra normalement attendre le prochain congrès pour que des femmes participent enfin au BE.

Nizar Amami, syndicaliste tunisien des PTT et membre de la Ligue de la gauche ouvrière (LGO)

Notes

1. 97 % des congressistes étaient des hommes, alors que 47 % des membres de l’UGTT sont des femmes.

2. Les femmes sont un peu moins de 50 % à la poste, majoritaires dans des secteurs comme l’enseignement, la santé ou le tourisme, et sont plus de 60 % dans le textile. Elles ont participé aux luttes ayant fait tomber Ben Ali au même titre que les hommes.

Nizar Amami

Syndicaliste tunisien des PTT et membre de la Ligue de la gauche ouvrière (LGO)

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