Tiré de Courrier international.
Cette fois, c’est la bonne, ou presque. La délégation de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), après avoir trouvé porte close à Niamey dans une précédente tentative de négocier avec les putschistes qui se sont emparés du pouvoir le 26 juillet, a enfin pu s’entretenir avec le chef du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP, nom de la junte nigérienne), le général Tiani.
Le site nigérien Aïr info publie une interview du chef de la délégation de la Cedeao, l’ex président nigérian Abdulsalami Abubakar. Il explique en haoussa avoir rencontré le président déchu Mohamed Bazoum, ainsi que le général Tiani, avec qui “l’espoir est permis”, selon la traduction d’Aïr info.
Sauf que cette note d’espoir, passée à la moulinette d’une actualité frénétique, est rapidement devenue surannée. Le soir même, le chef du CNSP s’est adressé à la nation. Et le général Tiani n’a pas du tout fait mention de cette rencontre symbolique avec les représentants de la Cedeao. En revanche, il a évoqué l’option militaire agitée par les chefs d’état-major de l’instance communautaire réunis au Ghana les 17 et 18 août, qui ont affirmé que leur force militaire était “prête à intervenir” et se sont accordés sur la date d’une éventuelle opération.
Fustigeant ce possible recours à la force, ainsi que les sanctions “illégales et inhumaines”, il affirme que l’action du CNSP “répond clairement à l’exaspération de l’écrasante majorité du peuple nigérien, qui se sent délivré”, rend compte Aïr info dans un autre article.
Transition de trois ans “tout au plus”
Il a en outre informé les Nigériens de la tenue d’un dialogue national inclusif en vue de fixer les objectifs d’une transition de trois ans maximum. Et d’ajouter : “Notre ambition n’est pas de confisquer le pouvoir.”
- “Je réaffirme aussi notre disponibilité à tout dialogue pour autant qu’il tienne compte des orientations voulues par le peuple nigérien.”
Une annonce qui a été critiquée dès le lendemain par Abdel-Fatau Musah. Le chef de la commission des affaires politiques de la Cedeao a jugé cette déclaration “inacceptable” dans une interview accordée à la BBC, et citée par le site nigérian Vanguard. Ce dernier avance par ailleurs que la rencontre entre le CNSP et l’organisation ouest-africaine n’a “abouti qu’à très peu de résultats” et qu’“il existe déjà de profondes divisions au sein de la garde présidentielle qui a évincé le président Bazoum”.
Il mentionne aussi les “milliers de Nigériens [qui] ont envahi les rues hier en déclarant leur soutien à la junte militaire” et “ont scandé des slogans hostiles à l’ancienne puissance coloniale française et en particulier à la Cedeao”.
En somme, le week-end du 19 août a été l’occasion d’un “chassé-croisé diplomatique en mode clair-obscur”, selon L’Observateur Paalga, qui choisit de regarder le verre à moitié plein. Entre l’ouverture au dialogue du général Tiani, la possibilité pour des émissaires de l’ONU et de la Cedeao de s’entretenir avec des représentants du CNSP et l’arrivée à Niamey de la nouvelle ambassadrice des États-Unis, l’option diplomatique a encore ses chances, selon lui. “Certes, pas pour restaurer Mohamed Bazoum dans ses fonctions […] mais pour un retour à une normalité constitutionnelle.”
Courrier International
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