Édition du 21 janvier 2025

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Europe

Rigueur budgétaire : « Une politique d’austérité, mise en œuvre à l’échelle européenne, sera un remède pire que le mal

Cette tribune, rédigée par des économistes membres de la Fondation Copernic et d’ATTAC, a été publiée dans Le Monde le 3 octobre 2024.

17 octobre 2024 |tiré du site Entre les lignes entre les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/10/17/rigueur-budgetaire-une-politique-dausterite-mise-en-oeuvre-a-lechelle-europeenne-sera-un-remede-pire-que-le-mal/

Sans surprise, le premier ministre, Michel Barnier, a pointé, mardi 1er octobre, dans son discours de politique générale, « notre dette publique colossale » et entend baisser massivement les dépenses publiques, tout en envisageant de« demander une participation (…) aux grandes entreprises qui réalisent des profits importants » et « une contribution exceptionnelle aux Français les plus fortunés ».

Il semble suivre ainsi Adrien Auclert, Thomas Philippon et Xavier Ragot, qui, dans une tribune, « Budget 2025 : “La question n’est pas de savoir s’il faut réduire le déficit, mais comment le faire sans peser trop fortement sur la croissance” »(Le Monde du 17 septembre),constatent que « l’heure est partout à la consolidation budgétaire » et prônent « une réduction du déficit primaire structurel de 4 points de PIB [produit intérieur brut], soit 112 milliards d’euros étalés sur sept à douze ans », avec dès cette année 20 milliards, essentiellement par des baisses de dépenses.

Ces économistes, qui n’excluent certes pas « des hausses, possiblement transitoires, de la fiscalité », évoquent la « diminution des aides aux entreprises en repensant les allégements de charges ». Rappelons que les baisses d’impôts ou de prélèvements en faveur des ménages les plus riches et des grandes entreprises coûtent chaque année 76 milliards au budget de l’Etat et que les subventions sans contrepartie accordées aux entreprises sont de l’ordre de 170 milliards. Les marges de manœuvre sont donc réelles.

Le spectre de la situation de la Grèce

C’est pourtant la baisse des dépenses publiques qui est privilégiée en matière de services publics, de financement de l’Assurance-maladie et des complémentaires santé. Pis, les auteurs se prononcent pour « un excédent primaire [hors charge de la dette] d’un point de PIB à moyen terme », car, nous disent-ils, « pour réduire la dette, il faudra dégager des surplus primaires », c’est-à-dire avoir un budget durablement excédentaire.

Ce qu’ils nous proposent ici est donc une cure d’austérité massive et prolongée qui ne dit pas son nom, même s’ils s’en défendent en avançant vouloir essayer de trouver un point d’équilibre concernant la vitesse de l’ajustement. Le grand absent chez ces économistes, comme d’ailleurs du discours du premier ministre, est l’état de l’économie et de la société, française autant qu’européenne. Or, la zone euro fait aujourd’hui face à une stagnation économique, et la France n’est pas épargnée.

Dans une telle situation, une politique d’austérité, de plus mise en œuvre à l’échelle européenne, sera un remède pire que le mal qu’il est censé guérir et ira, en définitive, à l’encontre du but recherché. Alors que l’investissement des entreprises est au plus bas, que la consommation des ménages stagne ou régresse, baisser les dépenses publiques aura un effet récessif qui, in fine, aggravera la situation des finances publiques. Phénomène bien connu dont la Grèce a fait l’amère expérience.

« Lente agonie »

Il est particulièrement significatif qu’aucune allusion ne soit faite au rapport que vient de présenter Mario Draghi à la Commission européenne. Celui-ci constate que « le revenu disponible réel par habitant a augmenté presque deux fois plus aux Etats-Unis qu’en Europe depuis 2000 » et que, faute d’un sursaut d’investissement, l’économie européenne est condamnée à « une lente agonie ».

Rappelons que, en trente ans, la productivité horaire du travail dans la zone euro a augmenté moitié moins qu’aux Etats-Unis. Mario Draghi indique que les investissements annuels nécessaires pour combler ce retard se monteraient à 5 points de PIB. Comment faire ces investissements, que ce soit en matière écologique, sociale ou industrielle, avec un budget durablement excédentaire ?

Mais, nous dira-t-on, il y a le feu au lac. La dette publique se monte à 110% du PIB et la charge d’intérêt est d’environ 50 milliards d’euros par an, soit 1,8% du PIB ; elle était de près de 4% à la fin des années 1990, et alors considérée comme soutenable. Il est vrai toutefois que cette somme pourrait être plus utilement employée.

Une réforme fiscale porteuse de justice est nécessaire

Remarquons par ailleurs qu’une partie non négligeable du coût de la dette (13,6 milliards d’euros) provient de l’émission par l’Etat de titres indexés sur l’inflation. Au contraire des salaires, le capital est protégé contre l’inflation ! Que faire alors ? Une réforme fiscale porteuse de justice est évidemment nécessaire.

Les entreprises et les ménages doivent être mis à contribution en fonction de leur richesse effective. Mais, aussi importante soit-elle, elle ne suffira pas à financer les investissements massifs qui sont aujourd’hui nécessaires ; aussi, s’endetter est une nécessité. Ces investissements permettront de construire des infrastructures qui seront utilisées des décennies durant par plusieurs générations, c’est pourquoi un financement par la dette est légitime.

Dire cela ne signifie cependant pas accepter la forme que prend l’endettement actuel, qui, aujourd’hui, dans l’Union européenne (UE), place la dette publique sous l’emprise des marchés financiers. Or, si l’on veut à la fois se prémunir contre les risques d’une spéculation sur la dette publique et réduire sa charge, il est nécessaire de dégager durablement le financement public de cette emprise des marchés.

Un dispositif pour garantir la stabilité du financement

Il faut pour cela créer un dispositif qui, comme jusqu’aux années 1980, garantira la stabilité du financement ; son cœur sera formé par un pôle bancaire public, édifié autour des institutions financières déjà existantes ; il permettra d’orienter l’épargne populaire vers les investissements sociaux et écologiques stratégiques décidés démocratiquement. N’étant pas soumis à la logique de la rentabilité financière, ce pôle bancaire public pourra ainsi être un acheteur important et stable de titres de la dette publique.

Par ailleurs, il pourra avoir accès aux liquidités fournies par la Banque centrale européenne dans le cadre de ses opérations de refinancement, comme le permet l’article 123.2 du traité sur le fonctionnement de l’UE, les titres de dette publique constituant un collatéral de très bonne qualité.

Les institutions financières privées doivent quant à elles être soumises à un contrôle strict et avoir l’obligation de placer une partie de leurs actifs en titres de la dette au taux fixé par la puissance publique.

Les signataires de la tribune, Jean-Marie Harribey, Esther Jeffers, Pierre Khalfa, Dominique Plihon, Jacques Rigaudiat, économistes, sont tous membres d’Attac et de la Fondation Copernic.

https://www.fondation-copernic.org/rigueur-budgetaire-une-politique-dausterite-mise-en-oeuvre-a-lechelle-europeenne-sera-un-remede-pire-que-le-mal/

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Une cure d’austérité massive et prolongée

Ce texte est issu d’un exposé de Pierre Khalfa fait lors d’un webinaire de la Fondation Copernic

Le projet de budget du gouvernement correspond aux annonces antérieures. Précédé d’un feu roulant médiatique sur « la situation catastrophique des finances publiques », il prévoit une cure d’austérité massive et prolongée.

Ce qui est prévu

Le déficit public sera de 6,1% du PIB en 2025. Le gouvernement voudrait le ramener à 5% en 2025 et passer sous la barre des 3% à la fin 2029. Il ne s’agit donc pas de mesures ponctuelles, mais de mesures qui vont se répéter année après année. Pour 2025 est prévu un ajustement budgétaire de 60 milliards d’euros. Il s’agit d’un choc budgétaire considérable.

Il y a là un premier problème. Passer à 5% du PIB en 2025 correspond à un ajustement de 1,1 point de PIB ce qui, théoriquement, devrait faire 30 milliards d’euros. Or, le gouvernement en annonce 60 parce qu’il prend comme base de calcul ce qu’aurait été, d’après lui, le déficit public en 2025 si rien n’avait été fait. C’est à dire 7%. Il en déduit la nécessité d’un ajustement de deux points de PIB, c’est-à-dire 60 milliards d’euros. Autrement dit, il prend en compte une situation qui n’existe pas et qui ne va pas exister, pour imposer un choc budgétaire deux fois plus important que ce qui aurait été nécessaire, même de son propre point de vue.

Ce qui est prévu, c’est essentiellement une baisse des dépenses publiques de 40 milliards d’euros et une et une augmentation d’impôts de 20 milliards.

Dans ces 20 milliards, il va y avoir d’une part les ménages les plus riches qui vont être touchés, ceux dont les revenus sont supérieurs à 500 000€. Ce qui représente 65 000 ménages et devrait rapporter 2 milliards d’euros. Il y aura aussi un impôt sur les plus grosses entreprises, celles qui ont un chiffre d’affaires supérieur à un milliard d’euros – chiffre d’affaires uniquement en France – qui devrait rapporter 8 milliards. Ces deux prélèvements sont présentés comme exceptionnels et provisoires. Les cotisations patronales devraient être alourdies pour rapporter 4 milliards d’euros et diverses surtaxes devraient être mises en place. Pour le reste de la population, le gouvernement affirme qu’il n’y aura pas d’augmentation d’impôts. C’est faux et on sait par exemple que la taxe sur l’électricité va augmenter.

La baisse des dépenses publiques sera massive. Quand on parle de dépenses publiques, ce que l’on met en avant c’est le ratio dette publique sur PIB. Il était en 2023 de 57%. Ce ratio donne l’impression qu’il y aurait plus de la moitié de la richesse produite, le PIB, qui passerait dans les dépenses publiques. Ce qui est totalement faux parce que ce ratio mesure deux grandeurs hétérogènes. Quand on calcule le PIB, on ne prend pas en compte ce qu’on appelle les consommations intermédiaires, c’est à dire les biens et les services transformés ou consommés au cours du processus de production. Le PIB, pour des raisons techniques ne prend pas en compte ces consommations intermédiaires, alors que le calcul des dépenses publiques les prend en compte. Donc on compare deux choses qui ne sont pas comparables et le ratio dette publique sur PIB a assez peu de sens.

Parmi les baisses de dépenses citons en vrac, la sécurité sociale qui va être amputée de 14 milliards, le report de l’indexation des retraites sur l’inflation qui va rapporter 4 milliards d’euros, des coupes dans le fonctionnement des hôpitaux, la suppression de 4000 postes d’enseignants, etc.

Il faut insister sur une fonction importante des dépenses publiques qui risque de faire les frais de cette cure d’austérité. Une part importante des dépenses publiques, ce sont des transferts sociaux vers les ménages. La moitié en moyenne du revenu des ménages est aujourd’hui issu des transferts sociaux et le montant global des prestations financières est aujourd’hui supérieur au montant des salaires nets. C’est dire l’importance de ces transferts sociaux du point de vue du revenu des ménages. Ainsi les 10% des plus riches, reçoivent 18 fois plus de revenu primaire – c’est à dire de salaire, de revenu du patrimoine – que les plus pauvres (13% de la population). Après transferts sociaux, cet écart passe de 1 à 3. On voit donc à quel point les transferts sociaux sont importants pour le revenu des ménages et pour réduire les inégalités. Or, ces transferts sociaux sont au cœur de la dépense publique.

Y-a-t-il le feu au lac ?

Le déficit est de 6% de plus du PIB. La dette publique représente 110% du PIB. Cela paraît énorme, plus de 3 200 milliards d’euros.

Concernant la dette publique deux points doivent être soulignés. D’une part, d’autres pays avec des économies avancées comme le Japon ou les États-Unis ont une dette nettement supérieure à celle de la France et il n’y a pas dans l’absolu de niveau d’endettement optimum au-delà duquel les problèmes commencent. D’autre part le ratio dette publique sur PIB, mis en avant pour montrer l’importance de la dette publique, est tout à fait problématique. En effet la dette est un stock alors que le PIB représente le flux annuel de richesse créée. Or comparer un stock à un flux a assez peu de sens.

D’autre part, le deuxième point à souligner est qu’un État ne rembourse jamais sa dette. Quand les titres publics arrivent à échéance, l’État ne les rembourse pas. Il emprunte de nouveau, en l’occurrence là sur les marchés financiers. On dit qu’un État fait rouler sa dette. Donc il est faux de dire qu’il faudra rembourser la dette. Aucun État, parmi les grands pays en Europe, aux Etats-Unis, au Japon, etc., ne rembourse sa dette.

L’important, pour savoir si une dette est soutenable, est de regarder la charge de la dette, c’est-à-dire les intérêts que l’on paye. En 2023 la charge de la dette représentait 1,8% du PIB. Elle représentait 4% du PIB à la fin des années 90. Donc, en fait, aujourd’hui le poids de la charge de la dette est moindre que dans les années 90. Elle est néanmoins importante, représentant ces 50 milliards d’euros qui pourraient effectivement être utilisé à autre chose.

Mais cela montre que la France n’est pas dans une situation de crise financière contrairement au discours dominant. Les opérateurs financiers, les banques, les fonds d’investissement, etc. recherchent la dette française et la France n’a aucun mal à emprunter sur les marchés financiers. À chaque adjudication, la demande est supérieure à l’offre de 2 à 3 fois. Cela veut dire que la France n’a pas à supplier les marchés financiers ou les banques pour emprunter. La dette française est une dette parmi les plus sûres au monde.

Maintenant, venons-en au déficit public : 6,1% du PIB en 2024 alors que la prévision du gouvernement était de 4,4%. Pourquoi ça a dérapé ? Le déficit public n’a pas dérapé parce que il y a eu une augmentation des dépenses publiques. Celles-ci sont restées stables et ont même plutôt diminué légèrement entre 2023 et 2024. Le dérapage est imputable à une baisse des recettes fiscales et notamment une baisse des recettes de la TVA. Pourquoi ? Parce qu’il y eu une baisse de la consommation des ménages. Les ménages ont moins consommé, il y a eu moins de recettes de la TVA et de plus en moyenne les ménages, pour ceux qui le peuvent, ont épargné plus. On a en France un taux d’épargne aujourd’hui record, de 18% du revenu disponible des ménages, ce qui est ce qui est le taux le plus important depuis des décennies. Et si les ménages qui le peuvent épargnent, c’est tout simplement parce qu’ils ont la crainte de l’avenir. Les ménages consomment moins, soit parce qu’ils n’en ont pas les moyens, soit parce qu’ils épargnent parce qu’ils craignent l’avenir. Cela entraîne une baisse des recettes fiscales, une baisse de la TVA et donc une augmentation du déficit.

Plus globalement, le déficit public est dû historiquement, depuis les années 2000, à des baisses d’impôts, essentiellement en faveur des grandes entreprises et des ménages les plus riches., Ces baisses d’impôts coûtent 76 milliards d’euros par an au budget de l’État. Avec les 10 milliards de hausse d’impôts prévus par le gouvernement qui vont toucher les ménages les plus riches et les très grosses entreprises, on est donc loin du compte. Et si on prend les subventions aux entreprises en France, ce sont 170 milliards d’euros par an en moins pour le budget de l’État. Dans ces subventions, il y a certaines qui peuvent être utiles, mais il y a de nombreuses qui sont totalement inutiles et qui produisent des effets d’aubaine pour les entreprises. Il y aurait donc des marges de manœuvre fiscales beaucoup plus importantes que celles sur lesquelles joue le gouvernement Barnier.

Les conséquences

Réduire la dépense publique à grande échelle avec ce choc budgétaire ne peut avoir pour conséquence que de réduire le niveau de vie des populations qui sont les premiers bénéficiaires de la dépense publique, les classes moyennes et les classes populaires, que ce soit en matière de services publics ou de transferts sociaux. Cela va aussi aggraver la situation économique.

On est dans une situation économique où la consommation des ménages stagne, voire régresse, ainsi que l’investissement des entreprises. Dans une telle situation, baisser les dépenses publiques aura un effet récessif. Cela entrainera moins de pouvoir d’achat pour des salariés, moins de profits pour les entreprises parce qu’il y aura moins d’activité économique, plus de chômage et donc moins de recettes fiscales et donc, in fine, un risque de plus de déficit public. Et on rentrerait là dans une sorte de spirale mortifère bien connue, c’est celle qu’a subie la Grèce dans les années 2010-2015. C’est ce qu’on appelle en économie l’effet multiplicateur : lorsque la dépense publique baisse d’un point il y a un risque, surtout dans une situation économique dégradée comme aujourd’hui, que l’activité économique baisse encore plus fortement, ce d’autant plus que des mesures similaires vont être prises dans beaucoup de pays européens.

Cela risque de créer un effet récessif global au niveau européen, alors même que l’Europe est en situation de stagnation économique. On est en train de refaire l’erreur économique déjà faite dans les années 2010 où on avait eu une cure d’austérité massive en Europe, un peu moins d’ailleurs à l’époque en France que dans les autres pays européens. Cette fois, cela risque d’être le contraire. On risque d’avoir une cure d’austérité beaucoup plus importante en France que dans les autres pays européens. Mais dans tous les cas, cela avait entraîné une récession de plusieurs années dont on a eu du mal à sortir.

Que faire ?

Aujourd’hui on a besoin d’investir. Investir massivement pour la transition écologique, pour réindustrialiser la France, pour remettre à niveau nos services publics, etc. Il y a eu deux rapports officiels récents qui le confirment. Le rapport Pisani-Ferry-Mafhouz, des économistes proches du pouvoir, indique qu’il faudra 66 milliards d’euros par an en plus d’investissements. Également le rapport pour la Commission européenne fait par Mario Draghi, ancien président de la BCE, qui avance qu’il faudra 800 milliards d’euros d’investissements supplémentaires en Europe. Il note le décrochage de tous les pays de l’Union européenne par rapport aux États-Unis et par rapport à la Chine, parlant même de lente agonie s’agissant de l’économie européenne. Le revenu disponible par habitant a augmenté deux fois plus vite aux Etats-Unis qu’en Europe depuis 2001 et en trente ans la productivité horaire dans la zone euro a augmenté moitié moins qu’aux États-Unis. On est dans un processus de paupérisation relative au niveau du continent européen par rapport au par rapport aux États Unis.

Une réforme fiscale porteuse de justice est évidemment nécessaire. Les entreprises et les ménages doivent être mis à contribution en fonction de leur richesse effective et on a vu que les mesures Barnier sont notoirement insuffisantes. Mais, aussi importante soit-elle, elle ne suffira pas à financer les investissements massifs qui sont aujourd’hui nécessaires ; aussi, s’endetter est une nécessité.

Il faut le dire, pour investir, il faudra s’endetter. Ces investissements permettront de construire des infrastructures qui seront utilisées des décennies durant par plusieurs générations, c’est pourquoi un financement par la dette est légitime. La dette est un pont entre les générations et un bon État, qui pense à l’avenir, est un État qui s’endette. Dire cela ne signifie cependant pas accepter la forme que prend l’endettement actuel, qui, aujourd’hui, dans l’Union européenne place la dette publique sous l’emprise des marchés financiers. Or, si l’on veut à la fois se prémunir contre les risques d’une spéculation sur la dette publique et réduire sa charge, il est nécessaire de dégager durablement le financement public de cette emprise des marchés.

Il faut pour cela créer un dispositif qui, comme jusqu’aux années 1980, garantira la stabilité du financement ; son cœur sera formé par un pôle bancaire public, édifié autour des institutions financières déjà existantes ; il permettra d’orienter l’épargne populaire vers les investissements sociaux et écologiques stratégiques décidés démocratiquement. N’étant pas soumis à la logique de la rentabilité financière, ce pôle bancaire public pourra ainsi être un acheteur important et stable de titres de la dette publique. Par ailleurs, il pourra avoir accès aux liquidités fournies par la Banque centrale européenne dans le cadre de ses opérations de refinancement, comme le permet l’article 123.2 du traité sur le fonctionnement de l’UE, les titres de dette publique constituant un collatéral de très bonne qualité. Les institutions financières privées doivent quant à elles être soumises à un contrôle strict et avoir l’obligation de placer une partie de leurs actifs en titres de la dette au taux fixé par la puissance publique.

https://www.fondation-copernic.org/une-cure-dausterite-massive-et-prolongee/

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