Édition du 17 décembre 2024

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Débats

Appel de texte, d’actions et d’ateliers

Lutter en temps de crise globale : Repolitiser, Imaginer, Réaliser

La Grande Transition, 18-21 mai 2023, Tiohtià:ke/Montréal, Canada

Organisé par Alternatives et Historical Materialism

Nous vivons dans une époque marquée par une crise globale (écologique, économique, sociale et politique) qui nécessite une rupture civilisationnelle avec le système capitaliste dans toutes ses dimensions. Par exemple, la résurgence d’une suprématie blanche décomplexée et du nationalisme populiste des droites est un phénomène global affectant surtout les groupes marginalisés. De plus, l’approfondissement de la crise écologique et le climat de guerre relance une culture machiste de contrôle du corps des femmes et de la nature. Ce contexte souligne l’imbrication des subordinations raciales et genrées au capitalisme ; il s’agit d’un système racialisé, colonial et genré. Nous nous devons donc de penser les scénarios de dépassement du capitalisme, notamment par un socialisme intersectionnel, libérateur, démocratique et écologiste.

Il est impératif de retracer les relations entre les systèmes de pouvoir – que ce soit le colonialisme, le patriarcat, la suprématie blanche, ou la cishétéronormativité – afin de cerner les différentes manières dont le capitalisme ordonne les corps et les territoires. Bien que les différents espaces géographiques et numériques soient distincts, ils restent interconnectés dans les hiérarchies permettant l’exploitation de personnes vulnérabilisées. Penser le capitalisme devrait permettre d’articuler les parallèles et les intersections entre la race, le genre, la sexualité, la religion, le patriarcat, l’écologie et les classes et de les voir comme composantes d’un système d’exploitation multifacettes. Nous nous devons donc de reconnecter à deux niveaux : reconnecter les systèmes d’oppression pour bien comprendre leur impact sur le monde, mais aussi se reconnecter au monde pour bien l’imaginer, lutter pour son émancipation et le transformer. Il s’agit de créer des liens de confiance en s’assurant que les dynamiques de subordination sont pensées vers un réel démantèlement des systèmes actuels.

Afin de passer de la résistance à une transformation sociétale, il faut un véritable projet de transition hors du capitalisme, en s’appuyant sur les savoirs critiques produits tant à l’université que dans les mouvements sociaux. L’événement international La Grande Transition : Lutter en temps de crise globale invite donc les citoyens-nes de divers horizons (activistes, syndicalistes, membres d’un parti politique, étudiant-e-s ou universitaires) à réfléchir à cette question depuis trois axes : Repolitiser, imaginer et réaliser. Cette rencontre vise à renforcer les liens entre universitaires et militant-e-s, mais aussi entre milieux anglophones, francophones et autochtones. Il s’agit aussi de promouvoir des idées postcapitalistes en les introduisant à un public non-initié.

Les panels ou ateliers de 3 à 5 participant.es seront favorisés, mais les présentations individuelles seront aussi considérées pour intégration dans des panels. Les panels seulement composés d’hommes ne sont pas encouragés et la diversité est encouragée. En plus du format typique de conférence, nous vous invitons à soumettre des ateliers pratiques, des performances artistiques et culturelles, des actions militantes ainsi que tout autre format créatif. Le métissage théorique, pratique et artistique peut produire la politisation nécessaire pour réaliser nos rêves collectifs.

Date limite : 15 octobre 2022
Pour soumettre : https://edito.lagrandetransition.net/
Pour information : info@lagrandetransition.net

Thématiques

Transformer les économies

Cet axe sert à discuter des stratégies pour une réappropriation collective de l’économie. Près de 15 ans après la crise de 2007-08, nous faisons maintenant face à de l’inflation, des salaires stagnants, une montée des inégalités et une crise du logement qui rendent urgent un renouveau de l’opposition au néolibéralisme. Au-delà des stratégies de résistance, quelles sont les expériences (ex : production, logement, modèles multilatéraux, espaces urbains, numérique, etc.) qui préfigurent le développement d’une base économique autonome vis-à-vis du capital ? Comment repenser une économie pour faire face à la crise climatique ? Quelles leçons tirer des coopératives ou nationalisations autant récentes que passées ? Quelle place faut-il donner à la nationalisation du secteur financier ? Comment abolir la dette des pays du Sud ? Il faut penser des modèles alternatifs au capitalisme qui rendent possible l’écologisation et la démocratisation de l’économie. Afin de formuler une alternative globale au système, cet axe vise à recenser et mettre en débat divers modèles (socialisme démocratique, économies afrotopiques, socialisme latino-américain, économie participaliste, écosocialisme, décroissance, municipalisme libertaire, communs, etc.) post-capitalistes. Ces modèles se doivent d’être pensés dans toutes leurs intersections avec d’autres systèmes d’oppression et d’exploitation.

Repenser la démocratie et les relations de pouvoir

Les critiques poignantes de l’État capitaliste libéral remettent en cause depuis longtemps sa légitimité. Le rôle central de ce système politique dans les nombreuses oppressions systémiques, dans la crise climatique actuelle ainsi que son échec dans l’établissement d’une démocratie où toutes et tous peuvent se faire entendre a fait émerger plusieurs alternatives politiques dans les milieux académiques et militants. L’urgence d’agir étant de plus en plus puissante, l’heure est venue de dépasser la critique pour s’organiser et aller de l’avant. Quelles stratégies devrions-nous adopter pour passer d’un État bureaucratique et disciplinaire à un État ouvert aux demandes populaires et qui facilite l’autogestion des communautés et des lieux de travail ? Peut-on penser habiter un monde plus collectif ? Comment pouvons-nous démocratiser nos mouvements et partis afin qu’ils stimulent des formes d’auto-organisation qui favorisent une démocratie plus directe et participative ? Quelles sont les avancées innovantes et inspirantes qui ont pris place dans les dernières années et quelles leçons pouvons-nous tirer de leurs réussites ? Comment combattre l’extrême droite et les processus de fascisation qui frappent différentes sociétés et de centraliser les combats pour une démocratie plus juste ? Comment construire une transition politique centrée sur la justice envers les groupes historiquement exclus et marginalisés ? Les réflexions qui découlent de ces questions peuvent s’étendre du niveau local (tels que les mouvements grassroots et les éco-villages) jusqu’au niveau global (tels que les dynamiques Nord-Sud, la migration ou l’abolition des frontières).

Soutenir les souverainetés contre l’impérialisme et le colonialisme

Pour une transition juste, il est indispensable de démanteler l’impérialisme et le colonialisme sous toutes leurs formes. Abolir ces dynamiques de pouvoir est un défi majeur, mais représente un angle d’attaque clé dans la lutte contre le capitalisme. Comment pouvons-nous construire des liens de solidarité et d’entraide robustes envers nos luttes communes, dans le cadre de la colonialité du pouvoir ? Comment faire de la reddition des territoires (land back) un aspect central du futur que nous souhaitons bâtir ? Comment stimuler l’innovation dans l’action militante et amplifier le poids des mouvements anticoloniaux sans se les approprier ? Nous devons soutenir les populations du Sud global dans leurs luttes contre les pratiques prédatrices du capitalisme. Il faut lutter contre l’apartheid en Palestine, soutenir les luttes des femmes autochtones en Amérique latine contre des minières, combattre l’impérialisme de la Russie en Ukraine. Comment reconstruire un mouvement anti-guerre et anti-colonialisme et supporter les luttes de décolonisation inachevée à travers le monde ? Comment pouvons-nous repenser la coopération internationale par et pour les populations du Sud ? Quelles stratégies pouvons-nous mettre en œuvre au niveau local pour affaiblir l’impérialisme ? Quels ont été les succès et les échecs des luttes pour la paix, la démilitarisation et la dénucléarisation ? Dans le contexte canadien, nous devons soutenir les luttes pour la souveraineté des populations autochtones qu’elles soient territoriales, corporelles, culturelles ou numériques. Il est donc nécessaire de développer une lutte commune contre l’impérialisme canadien qui combine une stratégie de lutte de libération nationale du Québec et de soutien des luttes autochtones et francophones hors-Québec, en articulant ces combats avec la classe ouvrière et populaire canadienne. Comment organiser la lutte nationale du Québec et celle des peuples autochtones contre les stratégies impériales, incluant celles de l’industrie minière ?

Comprendre la co-constitution des systèmes d’oppression

Notre monde est façonné par de multiples rapports d’oppression, d’exploitation et de dépossession. Afin de les dépasser, on constate la croissance d’un ensemble de pratiques qui contestent l’ordre colonial, sexiste, raciste et écocidaire dont le capitalisme est tributaire jusqu’à aujourd’hui. En même temps, on voit une normalisation inquiétante des discours de l’extrême droite. Il s’agit de réaffirmer l’interdépendance de tous les systèmes d’oppression et d’articuler l’importance de ne laisser personne pour compte lorsque nous luttons pour un monde post-capitaliste plus juste. Quels sont les obstacles intersectionnels à nos luttes ?Quelle est la place des luttes anticapitalistes dans l’activisme et les cadres d’analyses décoloniaux et intersectionnels ? Si nos oppressions sont interdépendantes, nos libérations le sont aussi. Comment pouvons-nous analyser les liens entre les systèmes d’oppression, de marginalisation et de destruction environnementale et sociale de façon à soutenir la construction d’une plus grande solidarité entre nos luttes ? De quoi auraient l’air les relations internationales dans un monde post-capitaliste, féministe, décolonial et inclusif ? Dans ce sens, comment lutter contre la fermeture des frontières et la création de frontières intérieures contre les populations racisées ? Quelle est la source de la crispation identitaire du nationalisme ? Comment contrer la montée de la droite efficacement ?

Repolitiser la question climatique

En septembre 2019, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a participé à la grande manifestation pour le climat à Montréal. L’année précédente, son gouvernement avait conclu une transaction de 4,5 milliards de dollars avec la compagnie Kinder Morgan pour l’achat de l’oléoduc Trans Mountain, dans le but de compléter l’expansion du projet. En mai 2022, le coût de cette expansion s’élevait déjà à 21,4 milliards de dollars. Cet exemple souligne l’ironie présente dans le fait que la crise climatique est devenue un sujet de moins en moins controversé pour les politicien.ne.s, vu leur soutien pour un statu quo destructeur. Pire que du greenwashing, il s’agit d’une dépolitisation du sujet, ce qui contribue à créer la fausse idée que la crise climatique peut être résolue sans changer notre système économique de façon radicale. Il n’y a pas de solution à la crise climatique au sein du système capitaliste, colonial et extractiviste qui l’a créée, un système qui nie le fait que les êtres humains font partie intégrante de l’environnement. Comment la repolitisation de la question climatique est liée avec le lien entre capitalisme et destruction écologique ? Comment expliquer la place inextricable qu’occupe la justice climatique au sein de la libération collective de tous les groupes opprimés ? Comment repolitiser les relations de pouvoir au sein même des mouvements environnementalistes ?

Reconfigurer les gauches

Les partis de gauche au Chili et en Colombie ont contribué au renouvellement discursif et pratique de la gauche en Amérique latine et ailleurs en intégrant des revendications féministes et environnementalistes au cœur de leurs programmes. Cette nouvelle gauche diffère de la vague rose du début du 21e siècle : elle critique le développement économique basé sur l’économie extractive et fossile et elle dénonce ouvertement le patriarcat et la colonialité du pouvoir. Elle a aussi su construire de nouvelles formes de socialisation politique basées sur des structures moins hiérarchiques et centrées sur le recours aux réseaux sociaux. Il s’agit d’une gauche nourrie du contenu des grandes mobilisations sociales mondiales. Dans le cadre d’un projet de transition issu d’une convergence de résistances, il faut construire des modèles de gauche qui prennent en compte l’émergence de nouveaux types de citoyenneté, de formes d’exercice du pouvoir, et de modes d’articulation de la droite. Quels sont les apports de la critique féministe, de l’écologisme et de la critique décoloniale peuvent contribuer à la construction de nouveaux modèles d’émancipation de gauche ? Comment établir un dialogue fructueux entre ces critiques et le marxisme qui permette de nouvelles constructions politiques qui dépassent le racisme, le sexisme, l’impérialisme et la colonialité du pouvoir dans la pratique politique ? Comment penser à de nouvelles formes de socialisation politique de gauche, moins hiérarchisées et plus décentralisées, qui utilisent alternativement les réseaux sociaux et les technologies de l’information dans les processus d’émancipation ? Et si les problèmes auxquels fait face la gauche ne peuvent se régler qu’à l’échelle planétaire, comment assumer un réel internationalisme ?

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Le Collectif La Grande transition est un regroupement de militant·e·s et universitaires appartenant au réseau international Historical Materialism. Le Collectif est un organisme à but non lucratif entièrement indépendant.

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