Édition du 17 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Politique québécoise

Lorsque l’injustice devient loi, la résistance est un devoir

La Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics, région de Québec tenait une manifestation devant les bureaux du ministre Sam Hamad jeudi dernier. Presse-toi à gauche vous présente l’intervention de Pier-Yves Champagne de l’Université Laval.

Nous sommes face à un gouvernement despotique qui cherche à nous rendre esclave, littéralement. Je ne veux pas dire que la hausse des frais de scolarité de 1625$, en compromettant l’accessibilité aux études, empêchera une partie de la population de se sortir de la pauvreté, l’éducation étant gage de meilleurs salaires et la pauvreté synonyme d’esclavage. Dire cela, c’est déjà trop dire.

Dire cela, c’est accepter la logique qui fait de l’éducation une marchandise et qui établit une relation clientéliste entre le maître et l’élève. C’est accepter que l’Université soit une machine à diplômes qui offre des « packages » de connaissances répondant aux besoins d’individus eux-mêmes soumis au marché du travail. Enfin, c’est accepter que la liberté des citoyens et la souveraineté populaire soient à la fois l’esclave des caprices du consommateur et de la volonté du patronat.

L’éducation, c’est le processus par lequel l’individu acquiert la liberté. La formation universitaire, c’est ce passage d’une culture première qu’on ne questionne pas- apprendre à parler, lire, écrire, apprendre à vivre en société- vers une culture seconde qui nous permette de se distancer de la société, d’en prendre conscience, de la questionner, la mettre à l’épreuve et d’en dégager un idéal vers lequel tendre collectivement. C’est par le développement de cette conscience qu’on acquiert la liberté politique qui fait de nous des citoyens aptes à gouverner et qui fonde la souveraineté populaire.

La transformation qu’opère le gouvernement en marchandant l’éducation, en faisant du rapport élève-professeur un rapport d’utilisateur-payeur, en réformant la gouvernance des universités afin d’en compromettre l’autonomie et en démantelant le système d’éducation afin d’en faire une usine à produire des travailleurs est inacceptable. Un tel saccage vise à détruire les conditions d’existence de l’idéal démocratique en court-circuitant la transmission d’une culture seconde nécessaire à la survie d’une communauté de destins, à la survie d’une communauté politique déterminée.

L’Université en tant que lieu autonome capable de penser la société et d’en orienter les fins n’est pas l’université que financent nos frais de scolarité. L’université dont rêvent nos gouvernements depuis François Legault se réduit à un instrument technocratique soumis à une société de consommation ayant abandonné toute visée civilisationnelle. Toutes ces réformes initiées par le gouvernement ont pour but de nous rendre esclaves. Esclaves des aléas du marché et de ceux qui en contrôlent les leviers.
Dans ce cadre général, la hausse des frais de scolarité n’est qu’une des nombreuses mesures que prend le gouvernement afin de réaliser son projet.

Son projet, c’est la soumission de tout ce qui existe à cette logique de marchandisation. C’est la soumission de la liberté, de la culture, du savoir, des joies et des peines et de la mémoire des gens, de leur vie et de la vie aux mécanismes qui permettent d’en extraire la valeur marchande. C’est la soumission de tout ce qui refuse de se laisser assimiler, de tout ce qu’il y a de beau et d’encore humain en ce monde.

Il me semble que c’est d’abord pour cela qu’il faut se battre avant de parler salaires, conditions de travail, intérêts personnels. Il me semble qu’un tel affront de la part de notre gouvernement ne peut rester impuni et que toutes les révoltes, désobéissances civiles et les grèves sont de mise afin de résister à l’oppresseur. C’est pour cela que nous exigeons la démission du Premier Ministre, du Ministre Sam Hammad, et de tous les collaborateurs qui voient dans la vie une façon de faire du profit. C’est pour cela que nous lançons un appel à la grève générale illimitée dans tous les secteurs de la société civile, car lorsque l’injustice devient loi, la résistance est un devoir.

Photo : Vania Wright-Larin Répac 03-12 - Une bannière accrochée à la devanture des bureaux de Sam Hamad à Québec l’invite à " dégager ".

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