« Partout au Québec, je rencontre des travailleuses et des travailleurs du réseau qui n’en peuvent plus. La situation nous apparaît particulièrement criante ici, en Montérégie-Ouest, acquiesce le président de la CSN, Jacques Létourneau. Le gouvernement Couillard a affamé nos services publics pour dégager des surplus budgétaires. Selon nous, le prochain budget prévu en mars doit contenir des réinvestissements significatifs dans nos établissements publics, notamment pour que le personnel soit en nombre suffisant. Utiliser ces sommes pour offrir des cadeaux fiscaux aux mieux nantis ou pour accélérer le remboursement de la dette serait profondément injuste ».
Hygiène à la chaîne
Pour le CISSS, la réduction du temps consacré à l’hygiène des personnes hébergées ou hospitalisées vise à permettre au personnel de consacrer plus de temps pour les activités récréatives et sociales avec les bénéficiaires. Si le Syndicat des travailleuses et travailleurs du réseau du Suroît (CSN) partage cet objectif, il déplore que la seule solution envisagée soit de réduire les soins aux patients. « Il faut dire que dans bien des cas, l’hygiène corporelle est déjà réduite au minimum. Nous sommes préoccupés non seulement par l’état de surcharge de travail, mais aussi par les services reçus par la population. Après tout, ce sont nos mères, nos pères, nos tantes, nos oncles dont nous nous occupons au quotidien », explique le président du syndicat Steve Brady. Le syndicat croit que l’établissement devrait consacrer ses énergies à recruter du personnel en nombre suffisant plutôt que de faire porter le fardeau du manque de personnel sur les seules épaules de celles et de ceux qui sont en poste.
Listes de rappel vides
Les problèmes de main-d’œuvre s’étendent également au personnel de l’administration. La situation est particulièrement préoccupante au CSSS de Vaudreuil-Soulanges où les listes de rappel sont vides. Le personnel s’en trouve surchargé. « Comme ailleurs au CISSS de la Montérégie-Ouest, ce sont les aspects financiers qui semblent toujours l’emporter aux yeux de nos gestionnaires, au détriment des aspects humains, explique la vice-présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs du CSSS Vaudreuil-Soulanges (CSN). On veut libérer de l’espace dans les grands établissements en renvoyant les gens à leur domicile le plus possible, mais l’offre de soins à domicile ne suit pas et une bonne partie de la charge retombe sur les aidants naturels. »
Urgence occupée à 324 %
La situation est également alarmante dans les centres hospitaliers, en particulier dans les urgences. Selon une compilation effectuée par le syndicat CSN, l’urgence du Centre hospitalier du Suroît affiche un taux d’occupation de 250 %, en moyenne, depuis le début de l’année 2017. Une journée, ce taux a même grimpé à 324 %. Cela a entraîné évidemment une surcharge de travail intenable pour le personnel qui, lui, n’augmente pas dans de telles proportions ! Régulièrement, les préposé-es aux bénéficiaires comme les infirmières et d’autres catégories de personnel se trouvent incapables de prendre leur pause. Le recours au travail en temps supplémentaire est généralisé et, dans certaines situations, les travailleuses et les travailleurs ressentent une forte pression organisationnelle pour en faire ou ne peuvent carrément pas le refuser.
Faut-il s’étonner que de plus en plus de travailleuses et de travailleurs tombent au combat ? En maladie, en dépression. Par conséquent, le CISSS a de plus en plus de difficulté pour trouver le personnel dont il a besoin, à l’urgence, les soirs et la nuit. Par exemple, le 23 janvier, il n’y avait que 4 préposé-es aux bénéficiaires au lieu des 6 normalement prévus.
Bref, un coup de barre s’impose, pour la CSN. « À chaque fois qu’un ministre coupe un budget, au fond, ce qu’il demande au personnel, c’est d’en faire encore et toujours plus, enchaîne la présidente du Conseil central de la Montérégie (CSN), Annette Herbeuval. Parce que les travailleuses et les travailleurs sont fiers, ils vont tout mettre en œuvre pour offrir les meilleurs services possible, même parfois au détriment de leur propre santé. Ils ne laisseront pas tomber leurs patients avec qui ils ont créé une relation de confiance à cause d’une décision bureaucratique prise en haut lieu. Mais à un moment donné, on arrive à un point de rupture : l’élastique ne peut plus être étiré, il va se briser. On est rendu là, en Montérégie-Ouest. Toute la CSN va vous appuyer, assure-t-elle ».