L’article 2 de l’Accord de Paris fixe comme objectif de « contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C », et idéalement en deçà de 1,5°C. (courbe bleue et verte du graphique ci-dessous)
Un bon point.
Les engagements des Etats, rendus publics avant la COP21, sont par contre tout-à-fait insuffisants. L’ONU, qui a fait le calcul, reconnaît qu’un record d’émissions de GES pourrait être battu chaque année d’ici à 2030 pour atteindre 56,2 gigatonnes d’équivalent C02 en 2030. Dit autrement, les Etats envisagent de consommer 53 % du budget carbone dont nous disposons d’ici à 2025 et 74% d’ici à 2030. (courbe jaune du graphique).
C’est un peu mieux que ne rien faire (courbe orange du graphique), mais cela implique trois choses :
– Il n’y aurai pas de réduction d’émissions de GES à l’échelle mondiale avant 2030 ! (à supposer que les Etats fassent réellement ce à quoi ils se sont engagés, ce qui n’est pas sûr, et ce à quoi ils ne peuvent être contraints)
– L’écart entre ce qu’il faudrait faire (le souhaitable) et ce qui est sur la table (le réel) ne va cesser de s’accroître : en matière de climat, ce qui compte est l’ensemble des émissions de GES relâchés sur une période, plus que le niveau atteint lors de la dernière ;
– ce faisant, les Etats maximisent les émissions relâchées pendant cette période de temps ;
– En repoussant à plus tard ce qu’ils ne veulent pas faire aujourd’hui, les Etats institutionnalisent la procrastination et entérinent un réchauffemment climatique très largement supérieur à 2°C.
Le PNUE vient d’ailleurs, et à nouveau, de tirer la sonnette d’alarme : les émissions doivent être réduites d’au moins un quart d’ici la fin de la prochaine décennie, par rapport aux tendances actuelles, soit revenir en deçà des 42 gigatonnes.
Et vous savez quoi ? Ce point n’est pas à l’ordre du jour de la COP22.
A la COP22, on va à nouveau discuter des tuyaux et de la mécanique institutionnelle ou technique, mais pas des flux d’énergies fossiles et d’émissions de gaz à effet de serre.
La procrastination est reprochée aux enfants, aux salariés, aux services de l’Etat.
De fait, on l’applaudit quand il s’agit de climat, c’est-à-dire de notre avenir. Pour la masquer, on illumine les bâtiments publics et on écarte les paroles ou commentaires critiques : c’est le temps des louanges, pas celui de la lucidité.
Il y a de fait quelque chose qui ne tourne pas rond dans les institutions de "gouvernance du climat".
Maxime Combes, économiste et membre d’Attac France.