Petite, le racisme n’a jamais été un sujet de discussion pour moi, même pas avec mes proches et mes ami-e-s. D’ailleurs, nous, les enfants de la famille, ne connaissions pas l’existence de ce terme, ni même ce à quoi il faisait référence. À l’occasion, nous apercevions quelques familles ayant la peau blanche circuler dans les rues de Carrefour, à Port-au-Prince. À chaque fois, c’était l’émerveillement, car ce n’était pas courant de les voir passer près de notre demeure.
Lorsque mes parents ont pris la décision d‘immigrer au Canada, nous n’avions aucune idée que nous disions au revoir à nos pairs. Nous étions loin de comprendre que nous n’aurions plus l’occasion de revoir ni de serrer dans nos bras des personnes que nous chérissions tant ! Nous étions des enfants si innocents et naïfs à la fois. Pour nous, ce voyage qui allait bouleverser nos vies et ouvrir durement nos yeux sur plusieurs réalités de ce pays développé allait être la fin de l’agréable vie que nous connaissions autrefois.
Aujourd’hui, je constate que dès le début de ma « fréquentation » avec la communauté canadienne et jusqu’à aujourd’hui, j’ai connu par moments ce que veut dire de subir du racisme. Que ce soit lors d’activités quotidiennes ou sur les lieux de travail ou scolaires, les personnes racisées vivent sans relâche les effets du racisme. Cependant, ce qui m’étonne le plus, c’est lorsque cela survient au sein même des organisations syndicales. Qui aurait cru que, parmi un groupe de personnes formant une association défendant des droits et des conditions de travail, pouvaient se trouver des individus reproduisant des injustices présentes ailleurs dans la société. Force est malheureusement de constater que ces milieux ne font pas exception.
Des gens, de façon inconsciente ou consciente, perpétuent insidieusement le racisme au sein des syndicats, comme ailleurs dans la société. Toutefois, à chaque occasion, je fais le choix d’utiliser positivement les intentions de ces personnes afin d’en sortir toujours plus forte, plus grande et de faire bon usage de ces moments vécus. Ainsi, lorsque des collègues se permettent de lancer certains commentaires à mon sujet, dans mon dos ou même en plein visage, je fais en sorte que cela ne me détruise pas. Au contraire ! Je reçois ces mots comme une source de motivation pour continuer à développer ma résilience face à ce que je n’ai pas le pouvoir de contrôler.
Cela dit, il est du devoir des syndicats de veiller à mettre fin aux violences vécues ou perpétrées par leurs membres. De plus, si on veut réellement atteindre l’égalité entre les genres, encore faut-il que les femmes soient égales entre elles. Par conséquent, les féministes ne peuvent fermer les yeux sur les autres systèmes d’oppression qui nous hiérarchisent les unes et les autres.
À la FIQ, nous avons pris collectivement conscience de ces biais et de cette discrimination qui existent malheureusement dans le réseau de la santé. Une grande réflexion a été entreprise au sein de l’organisation et avec les militantes. Des formations sur l’enjeu du racisme dans la société et parmi les professionnelles en soins nous ont été offertes et, à chaque fois, nous en avons appris encore plus. Toutes ces actions ont entre autres mené à l’adoption du Principe de Joyce lors du dernier congrès. Un comité ad hoc antiracisme a aussi été mis en place. D’ailleurs, je vous invite à contacter votre équipe locale si vous êtes intéressée à en faire partie.
En conclusion, il faut admettre que le racisme est un enjeu de société présent partout, même au sein des organisations syndicales. Déjà, comme individu, si vous souhaitez faire votre part, pourquoi ne pas entamer la conversation pour aller à la rencontre des gens ? Vous pourriez en sortir grandie et enrichie.
Témoignage d’une jeune professionnelle en soins pour le comité Condition féminine FIQ-FIQP, Ridza Cléophat
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