Gerald, qu’est-ce qui se passe du côté des communautés hassidiques ?
Elles sont très touchées dans plusieurs quartiers, notamment Outremont, le Mile-End et Boisbriand où ont eu lieu, avant que la pandémie ne soit visible, plusieurs évènements religieux et communautaires et où étaient présents des hassidim de New York. C’est ce qui explique le pourcentage plus élevé de de personnes contaminés dans cette communauté.
Qu’est-ce qui explique cette situation ?
Les familles sont nombreuses, souvent entassées dans des logements avec 5, 6 ou 8 personnes. Les hassidim ont une riche vie communautaire (mariages, funérailles, fêtes religieuses, etc.). L‘idée de rester chacun chez soi ne fait pas partie de leur tradition. Cela facilite la contagion.
Comment vivent-ils la pandémie ?
L’esprit communautaire fait en sorte que personne n’est abandonné. On prend soin, on s’informe, on respecte les consignes. Dans ma clinique, les médecins sont aux aguets, avec l’appui d’étudiants bénévoles de l’Université McGill (qui parlent le yiddish ou l’hébreu). Ils informent les patients des aspects pratique de l’hygiène et de la distanciation sociale et de la quarantaine. Les rabbins se concertent. Ils nous rencontrent sans hésitation pour s’informer des institutions de santé publique.
Est-ce que le dépistage peut aider ?
Le niveau de dépistage par examen de laboratoire reste limité. Si par le questionnaire, nous constatons qu’une diagnostic de Covid-19 est probable (présence des symptômes, contact avec un membre de la famille déjà diagnostiquée), on peut assumer la présence du virus sans passer par le test microbiologique. En passant, étant donné un taux de fausse négativité de 20-25 %, le dépistage a l’effet pervers de créer un faux sentiment de sécurité, comme si le fait de ne pas être diagnostiqué pouvait protéger la personne. Je préfère penser que la force du tissu communautaire, qui incite les gens à respecter les consignes (en dehors d’un esprit de « surveillance »), est plus importante.
À quoi tu t’attends ?
Un vaccin efficace n’est pas pour demain. On ne sait pas ce qui est le plus efficace, entre l’enfermement comme on a vu à Wuhan, ou le dépistage de masse comme en Corée du Sud. Entre-temps, la pandémie va faire des ravages, même au Québec où on a encore un système de santé publique qui tient le coup. Il y aura des choix difficiles, et au pire, encore plus de « triage » pour se concentrer sur les patients qui ont une chance de s’en sortir. Citoyen-nes, professionnel-les de la santé, leaders politiques, tous doivent travailler ensemble pour qu’on n’en arrive pas là.
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