À Montréal jusqu’au milieu du 20e siècle, un imposant défilé annuel se tenait dans les rues de la ville. Il réunissait plus de gens que les célébrations de la Saint-Jean-Baptiste. Des sources comme ÉRUDIT
<https://www.erudit.org/fr/revues/ha...>
rapportent que les syndiquées et syndiqués manifestaient ainsi la fierté de leur travail, la force du syndicalisme et leur identité comme classe sociale. Désormais, la fête du Travail se limite, pour beaucoup, à un simple jour férié.
Sans nul doute, et davantage avec la crise sanitaire, les temps ont changé, car la fierté du travail est lourdement ébranlée. À cet égard, le projet de loi 61 (qui vise la relance de l’économie du Québec et l’atténuation des conséquences de l’état d’urgence sanitaire déclaré le 13 mars 2020 en raison de la pandémie de la COVID-19) risque d’engendrer de sérieux écueils.
Le projet de loi 61 sert, notamment, un véritable camouflet en matière de gestion de l’environnement, car le gouvernement Legault entend alléger et assouplir le mécanisme habituel d’évaluation, et ce, soutenu par l’absence presque totale de mécanismes d’imputabilité politique. En parallèle, il veut accélérer les processus d’expropriation et d’autorisation permettant la réalisation de quelque 202 projets désignés par le gouvernement.
Le gouvernement Legault pourra, si le projet de loi est adopté, remplacer certaines dispositions de la *Loi sur la qualité de l’environnement* par d’autres permettant d’en alléger et d’en accélérer les processus. L’État pourra ainsi exiger de ses biologistes, analystes environnementaux et autres professionnels qui se consacrent à l’environnement, à la faune, à la forêt et aux parcs, de « coopérer » en tournant les coins ronds, bafouant ainsi l’intégrité et l’impartialité qui sont pourtant les assises de la *Loi sur la fonction publique*.
Ici, pas question de simplement achever des caribous forestiers, comme l’évoquait Philippe Couillard à une certaine époque, mais plutôt d’inciter des professionnelles et professionnels compétents, diplômés des meilleures universités du monde, à alléger et assouplir leurs pratiques. Cela fera d’eux des complices d’un gouvernement disant vouloir relancer l’économie, et ce, au détriment des plus élémentaires règles d’éthique censées régir la fonction publique.
Les professionnelles et professionnels de l’État ne peuvent jouer le rôle de quelconques faire-valoir et béni-oui-oui au service d’un projet de loi de relance économique qui, dans sa mouture actuelle, se limite à des investissements gouvernementaux dans l’infrastructure où l’ajout de ressources humaines et de formation est anormalement absent.
La fierté d’un travail bien fait en prend pour son rhume quand le gouvernement agit comme un employeur délinquant. Non seulement il néglige de rendre disponible le matériel dont ont besoin ses employés pour accomplir les missions de l’État en télétravail, mais il reconnaît candidement que le matériel de travail doit normalement être fourni par l’employeur.
Si tel est le cas, pourquoi le gouvernement omet-il d’offrir une compensation pour l’utilisation du matériel personnel ? Pourquoi utilise-t-il la pandémie et le télétravail comme prétextes justifiant des modifications arbitraires et infondées aux conditions de travail de son personnel ? Pourquoi continue-t-il d’exiger de son personnel qui utilisait la voiture, le paiement mensuel pour des espaces de stationnement inoccupés depuis mars ?
Pour plus de 90 % des membres du SPGQ, le télétravail est pourtant devenu une réalité impliquant qu’elles et ils doivent être outillés conformément afin de répondre aux vastes missions de l’État. Un gouvernement qui cherche à s’enrichir sur le dos d’employés non responsables de cette situation est certainement un vecteur de transmission de cynisme. Bref, rien pour aider à retrouver la fierté au travail.
Line Lamarre
Présidente
Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec
Un message, un commentaire ?