Édition du 19 novembre 2024

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Syndicalisme

La Cour suprême prive les travailleurs agricoles de l’Ontario de leurs droits

La décision de la Cour suprême refuse aux travailleurs agricoles de l’Ontario le droit de négocier collectivement

La Cour suprême du Canada a donné raison au gouvernement de l’Ontario de refuser aux travailleurs agricoles de la province le même droit de se syndiquer et de négocier collectivement comme les autres travailleurs ontariens. La décision du plus haut tribunal au pays constitue le dernier chapitre d’une lutte qui dure depuis des décennies dans le but de fournir aux 80 000 travailleurs agricoles canadiens et migrants de l’Ontario des protections en matière de droits ouvriers fixés par la loi et des droits de négociation collective.

« La Cour suprême du Canada a abandonné les travailleurs agricoles de l’Ontario dans leur lutte visant la dignité et le respect. Il ne fait aucun doute que le lobby des entreprises agricoles industrielles et le gouvernement McGuinty ontarien se réjouiront du fait que l’injustice envers les travailleurs agricoles puisse se poursuivre pour l’instant », a déclaré Wayne Hanley, président national des TUAC Canada. « Mais pour certains travailleurs qui se trouvent parmi les plus vulnérables et les plus exploités en Ontario, c’est un jour triste et désastreux. »

Les TUAC Canada forment le plus important syndicat du secteur privé au pays et depuis deux décennies, ils mènent la campagne pour la justice envers les travailleurs agricoles. Les TUAC Canada ont plaidé la cause devant la Cour suprême en décembre 2009 parce qu’ils avaient contesté la violation de la Charte des droits et libertés devant les tribunaux inférieurs avec succès, soutenant que la Loi sur la protection des employés agricoles (LPEA) – la loi ontarienne actuelle qui empêche les travailleurs agricoles de l’Ontario de former des syndicats pour obliger les employeurs à négocier collectivement enfreint la Charte des droits et libertés.

Le gouvernement de l’Ontario en a ensuite appelé de la décision. Il s’agissait de la deuxième fois en dix ans que les TUAC Canada contestaient l’interdiction de l’Ontario relative aux syndicats agricoles devant la Cour suprême aux termes de la Charte. En 2001, le tribunal avait statué que la législation ontarienne interdisant aux travailleurs agricoles de se syndiquer violait leurs droits à la liberté d’association.

Cependant, dans une décision écrite rendue aujourd’hui, la Cour suprême a appuyé la province de l’Ontario et cassé un jugement de la Cour d’appel de l’Ontario en 2008 qui donnait raison sans réserve aux travailleurs et aux TUAC Canada.

Le tribunal de dernière instance au pays a statué que la LPEA suffisait pour les travailleurs agricoles, malgré que celle-ci ne confère aucune garantie prescrite par la loi obligeant un employeur à négocier avec ses employés ou même à les écouter.

La Cour suprême a rendu sa décision seulement cinq mois après que l’Organisation internationale du travail (OIT), un organisme des Nations Unies, ait déclaré le Canada et l’Ontario tous deux coupables d’avoir enfreint les conventions internationales et les droits de la personne et du travail en imposant la LPEA aux travailleurs agricoles de l’Ontario. Pourtant, la Cour suprême n’a fait aucune référence aux conclusions de l’OIT dans sa décision.

« Si la décision de la Cour suprême est un fait, il est un fait également que le Canada et l’Ontario sont devenus, à juste titre, des parias sur la scène internationale en raison de l’attaque qu’ils ont livrée contre les droits de certains travailleurs parmi les plus opprimés au pays, a poursuivi Wayne Hanley, le dirigeant national du syndicat qui a porté la question devant l’OIT. »

« La décision laisse aux travailleurs la LPEA – une loi qui est à peu près impraticable et ne leur offre presque pas de protections. Cette loi existe certes, mais le principe du respect élémentaire de la personne humaine existe également. Les libéraux ontariens de Dalton McGuinty peuvent se réjouir aux dépens des travailleuses et travailleurs maltraités, ou ils peuvent agir comme il se doit et changer la loi afin d’accorder aux travailleurs agricoles les mêmes droits de négociation collective dont jouit chaque autre travailleur de la province. Maintenir l’état actuel des choses est honteux et inhumain. »

« La réalité est que les appels judiciaires sont terminés. La prochaine étape consiste à en appeler à la justice des électrices et électeurs », maintient Wayne Hanley. « Ce dossier est aussi un enjeu politique. La plupart des Canadiens seraient consternés de voir dans quelles conditions vivent et travaillent des dizaines de milliers de travailleurs agricoles en Ontario bon nombre desquels sont des travailleurs étrangers temporaires ayant peu de recours efficaces face à leurs conditions de travail et de vie ardues. Une élection provinciale doit avoir lieu et, avec nos alliés et nos membres, nous comptons en faire un enjeu électoral. »

« Nous sommes désappointés mais pas découragés », de dire M. Hanley. « Nous continuerons à exploiter nos centres de soutien pour travailleurs agricoles en Ontario et répondre aux besoins de ces travailleurs car il est clair qu’ils ne sont pas satisfaits. Nous demeurons fermement engagés dans le lutte pour les travailleurs agricoles de l’Ontario jusqu’à ce qu’ils aient les mêmes droits et protections que les autres travailleurs ontariens. »

Plus de 100 000 membres des TUAC Canada travaillent et vivent en Ontario, et au-delà de 250 000 membres des TUAC Canada travaillent d’un océan à l’autre dans tous les secteurs de l’industrie alimentaire, des champs de culture à la table. Les TUAC Canada représentent des travailleuses et travailleurs à un grand nombre d’exploitations agricoles au Québec et en Colombie-Britannique. En association avec l’Alliance des travailleurs agricoles, les TUAC Canada gèrent également dix centres de soutien pour travailleurs agricoles situés dans les régions agricoles les plus peuplées au Canada.

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