Il a fallu deux nuits et une journée de temps supplémentaire au calendrier officiel pour y arriver. Bien sûr, beaucoup d’éléments essentiels manquent, mais l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) veut attirer l’attention sur le verre à moitié plein en soulignant la portée sans précédent de cet accord obtenu sous le leadership décisif - et respectueux de toutes les Parties - du président de la COP20, M. Manuel Pulgar Vidal, le ministre péruvien de l’Environnement.
« Il faut mesurer l’importance historique du pas franchi hier à Lima. Pour la première fois, tous les pays du monde signataires de la Convention cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) reconnaissent qu’il faut aller vers des réductions substantielles de gaz à effet de serre (GES) pour 2050 et des émissions nettes négatives d’ici 2100. Pour la première fois, tous les pays du monde, en fonction de leurs responsabilités communes mais différenciées et de leurs capacités respectives, sont d’accord pour présenter un plan de réduction des émissions en 2015 au plus tard avant le 1er novembre. Ce plan devra représenter un progrès par rapport à la situation antérieure, en plus d’être équitable, transparent, clair et compréhensible. Enfin, il devra absolument inclure un volet sur l’adaptation », précise Alain Brunel, directeur climat-énergie de l’AQLPA, présent à Lima.
« En d’autres mots, les représentants du monde entier prennent acte de la nécessité d’engager, d’accompagner et de soutenir une nouvelle révolution industrielle basée sur l’énergie renouvelable et impulsée par les constats scientifiques des experts intergouvernementaux du climat. Certes, de nombreuses décisions difficiles sont en suspens, notamment le financement à long terme, l’atténuation pré-2020 et la mise en œuvre du mécanisme sur les Pertes et préjudices visant à compenser les pays les plus vulnérables. Ces enjeux devront être pris de front au cours des négociations qui continueront cette année et à Paris en 2015, mais l’accord de Lima pose des fondations qui permettent de continuer à bâtir le futur accord universel sur le climat » ajoute Alain Brunel.
« Nous saluons l’accord de Lima, mais le Canada devra maintenant prendre ses responsabilités et prouver par ses actes ce qu’il a signé dans l’accord de Lima. Il doit retrousser ses manches et proposer une contribution solide, à la hauteur de ses capacités, afin de rehausser ses ambitions avant 2020. Dans le régime international en devenir visant à juguler la crise climatique, le projet d’oléoduc Énergie Est de TransCanada n’a clairement plus sa raison d’être.
Il faut désormais sortir de l’ère fossile et rétablir la confiance entre les Parties, notamment des pays en développement et moins avancés, mise à mal par l’inaction de pays riches comme le Canada. Deux fois le Canada a manqué à ses engagements, soit lors des accords de Kyoto et de Copenhague, il doit maintenant démontrer un réel sens des responsabilités » conclut André Bélisle, président de l’AQLPA.
En résumé...
Les deux points les plus positifs :
L’accord peut être qualifié d’historique, car il visera pour la première fois l’ensemble des émetteurs. Paris sera donc vraisemblablement un accord universel. Les 195 Parties devront se livrer à des réductions de leurs émissions de GES – des contributions prévues déterminées au niveau national ou INDCs - en fonction de leurs capacités respectives. Ces contributions devront être basées sur la transparence, la clarté et la compréhension. Les Parties qui sont prêtes devront communiquer leur contribution nationale au Secrétariat de la CCNUCC au plus tard lors du premier trimestre de 2015 ou sinon le plus tôt possible pour permettre au secrétariat de produire un rapport synthèse le 1er novembre 2015 ;
Tout indique que le prochain accord sera basé sur la science qui recommande d’atteindre des niveaux d’émissions nettes négatives d’ici 2100. Un nouveau régime climatique est en construction. Mobilisation massive de la société civile mondiale en faveur de la justice climatique, d’actions urgentes pour tourner le dos à l’énergie fossile et transiter vers un avenir 100% renouvelable.
Les deux points les plus négatifs :
Il n’y a pas eu de consensus ni de détails spécifiques sur le contenu et la portée des contributions nationales ainsi que de leurs dispositifs de révision, le financement à long terme, la mise en œuvre du mécanisme de Pertes et préjudices et les réductions de GES pré-2020 ;
Les Parties n’ont pas réussi à traduire l’urgence climatique rappelée par la société civile et les rapports scientifiques en engagements concrets. Ils ont préféré retarder les décisions cruciales et choisi de s’attaquer aux enjeux corsés lors du grand rendez-vous de Paris. Cette conférence tant attendue devra traduire le projet de Lima en actions ambitieuses et en soutien effectif aux pays les plus vulnérables aux dérèglements climatiques.