Tiré du blogue de l’auteure.
Nous avons toutes et tous eu notre moment d’apesanteur quand Nelson Mandela est sorti de prison, quand il est devenu le premier président noir d’un pays qui pendant des décennies avait fait du racisme sa raison d’être.
Et puis nous avons déchanté quand Thabo Mbeki et sa ministre de la santé, Docteur Betterave ont nié que le VIH tuait des milliers de leurs concitoyens.
Nous nous sommes alarmé.e.s quand nous avons appris que Jacob Zuma avait été acquitté pour un viol et que la victime avait été traitée de sorcière qui méritait le bûcher.
Nous avons été estomaqué.e.s quand nous avons appris qu’une famille de commerçants indiens, les frères Gupta, avaient réussi à faire la pluie et le beau temps pour la nomination des ministres.
Nous nous sommes indigné.es quand nous avons appris que les Guptas avaient pompé des millions dans les caisses de l’état ; que la corruption était devenu la gangrène de la société sud-africaine.
Mais nous n’avions encore rien vu.
Depuis quelques jours les nouvelles plus étonnantes les unes que les autres sont relayées par les agences de presse
Le 10 novembre dernier, le bureau de la Procureure générale a émis un mandat d’arrêt pour Ace Mashagule, secrétaire général de l’Anc, le parti au pouvoir. Le vendredi 13 il se présentait devant le tribunal qui lui accordait une liberté sous caution.
Que pouvait-on reprocher à ce dignitaire, un des six de la direction de l’Anc ? D’avoir extorqué de l’argent pour un soi-disant contrat de désamiantage. Ce n’était pas une histoire isolée. Alors qu’il était à la tête de la province Libre d’Orange, il avait été au cœur du scandale du projet Estina, un projet de laiterie, concocté par les Guptas pour faire des finances de la province une vache à lait. Les vaches destinées à aider des petits agriculteurs sont, elles, mortes de faim, et leurs malheureux propriétaires n’ont jamais réussi à mettre du beurre dans leurs épinards.
Grand supporter du Président Zuma il rejoindra ce dernier devant la justice pour s’expliquer sur ses malversations
Jacob Zuma a réussi à éviter, grâce à la stratégie de Stalingrad qui consiste à mentir, nier, argumenter pour ralentir la chute, sa comparution devant la justice.
Depuis ce qu’on appelle The Arms Deal, l’achat de matériel militaire à grands coups de dessous de table avec les compagnies d’armement, en particulier Thalès, dont le représentant doit accompagner Zuma devant le tribunal, les charges pour fraude, corruption, blanchiment d’argent se sont accumulées contre l’ancien président, en tout plus de 700.
En 2016, l’ancienne médiatrice de la République Thuli Madonsela, avait bouclé son rapport sur le State Capture, ou captation de l’Etat, mais Zuma avait réussi grâce à sa tactique à retarder sa comparution devant la justice. Depuis les frères Gupta ont pris le large et vivent leur vie entre Dubaï et l’Inde.
Le Juge Zondo a été chargé par le Président Cyril Ramaphosa, de faire toute la lumière sur le pillage systématique des ressources de l’Etat par la classe politique et leurs complices dans le monde des affaires et de la banque.
Il a convoqué Jacob Zuma à se présenter du 16 au 20 novembre devant la commission d’enquête qu’il préside. Zuma a encore essayé de tergiverser, mais ayant épuisé sa réserve de mensonges, de mauvaise santé, de mémoire défaillante, il a opté pour une démarche innovante et radicale : il a quitté le tribunal en déclarant qu’il n’avait rien à y faire puisqu’il n’avait rien fait de mal !
Une fois passée la stupeur, le Juge Zondo a eu un coup de sang et vient ce lundi 23 novembre de charger son secrétariat de porter plainte au pénal contre Jacob Zuma en expliquant ainsi sa décision : « Etant donné la gravité de la conduite de Mr Zuma et l’impact que sa conduite peut avoir sur le travail de la commission et pour donner son plein effet aux dispositions constitutionnelles, à savoir que nul n’est au-dessus des lois, j’ai décidé de demander au secrétariat de la commission de porter plainte au pénal contre Mr Zuma… »
La stratégie de Stalingrad a atteint ses limites, la justice va-t-elle enfin pouvoir agir ?
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