Tiré du blogue de l’autrice.
Depuis le 7 octobre 2023, un non-débat domine la scène médiatique française. De l’autocensure flotte dans l’air, quand ce ne sont pas des menaces bien plus réelles et violentes. Très vite, chacun·e a été renvoyé·e dans son « camp », sa « communauté », sa religion, sa couleur de peau... La peur, l’incompréhension, la colère, la haine aussi, sans aucun doute, sont les émotions qui nous ont cloué·es sur place (cloué le bec aussi !), et souvent nous ont fait préférer le familier, quand ce n’est pas l’entre-soi. Alors que les massacres s’enchaînent à Gaza depuis les attaques meurtrières du Hamas en Israël, ici, en France, c’est l’autre qui disparaît peu à peu.
Le Club, l’espace de contributions extérieures de Mediapart, n’a pas échappé à cette glaciation mentale. Alors que les grandes crises provoquent en général une envie de témoigner, d’exprimer son désarroi, de comprendre, après le 7 octobre, les contributions se sont faites rares. Puis timidement, telle une pluie fine, elles ont commencé à arriver, quelque peu essoufflées et graves, mais toujours singulières et éclairantes. Et une fois mises à la une, elles ont lancé le signal à d’autres, et les textes, écrits par une personne seule ou en collectif, sont arrivés en nombre.
Rien de ce qui est humain ne nous est étranger
Avec l’équipe du Club, Livia Garrigue, Guillaume Chaudet Foglia et, plus tard, Sarah Bosquet, nous avons alors pris plusieurs décisions pour filtrer et chercher des contributions :
a) Tout d’abord, nous assurer de donner une place à toutes et à tous, le plus possible, quelle que soit l’identité affirmée ou seulement induite par les noms. Et puis, multiplier les lieux d’ancrage, les âges et les couleurs politiques. Une attention particulière a été donnée aux voix palestiniennes, si peu entendues dans les médias français ;
b) « … Rien de ce qui est humain ne m’est étranger », disait Térence, l’ancien esclave carthaginois devenu poète à Rome. Notre filtre avait aussi un maître mot : l’humanisme. Des témoignages, des analyses, des tribunes… tout pouvait bénéficier de visibilité, si cela permettait de comprendre – un peu ! – ce qui nous arrivait. Tout ? oui, sauf la haine, le mensonge et la propagande.
Le florilège que nous proposons dans cet e-book n’est qu’une partie de ce qui a été publié dans le Club et mis en avant à la une de Mediapart. Outre la qualité de l’écriture et des propos tenus, c’est la marque du souci de l’autre qui a présidé à notre sélection. Ces textes sont adressés. Ils tentent de se faire entendre par l’autre rivage. Et parfois y parviennent ! Car même si certains débats ont créé remous et crispations dans notre agora – comment y échapper ? –, nous n’avons jamais perdu l’espoir de les faire exister. Que d’une façon ou d’une autre soit entendue la voix de l’autre.
Plusieurs thèmes, plusieurs tons...
Dans ce recueil comprenant 21 textes déjà publiés dans le Club, entre le 14 octobre 2023 et le 18 mars 2024, une grande variété de thèmes sont abordés. Certains textes ont suscité des débats bien au-delà du Club, à l’instar de la « déclaration » de Judith Butler, la philosophe et professeure à l’université Berkeley, après son intervention à Pantin.
« Anti-israélien ? », par l’historien Thomas Vescovi, « antisémitisme ? », par le collectif juif décolonial Tsedek, invisibilisation des voix palestiniennes par l’écrivain Karim Kattan, interpellations féministes, biais médiatiques, plusieurs textes traitent frontalement des sujets polémiques qui ont scandé l’actualité depuis six mois.
Ces textes essentiels ne sont pas pour autant la seule tonalité de ce livre numérique. Tout aussi remarquable, ce florilège comporte trois témoignages en direct de Gaza : celui d’un père de famille, du metteur en scène Hossam al-Madhoun, et d’Ahmed Q, un étudiant francophone. Ils décrivent avec des mots aussi puissants que déchirants la monstruosité de cette guerre qui s’abat sur eux.
Tout aussi sensibles, deux contributions écrites à la première personne s’interrogent sur leur judéité. Naruna Kaplan de Macedo s’interroge sur ce qu’elle va transmettre à ses fils, Valentine Fell se demande ce que son grand-père, « un rescapé de la Shoah » aurait dit de Gaza.
Enfin, nous avons aussi sélectionné deux analyses géopolitiques, une de Hassina Mechaï, l’autre de Ziad Majed, qui permettent de mettre en lumière les impensés de cette guerre : le rôle du « monde occidental ». Et un texte sur les pièges annoncés d’une « fausse paix », par Muzna Shihabi, ancienne conseillère de l’OLP.
Last, but not least, deux textes proposent de faire un pas de côté (Jewish Currents aux EU et une tribune sur le maccarthysme à l’université de Jérusalem). Et deux autres pointent spécifiquement les répliques politiques en France, entre « retour du bâton » antiféministe et régression de la liberté d’expression.
Car la guerre là-bas, on le sait bien, ne nous laissera pas indemnes « ici ».
... Et quelques coulisses :
Pour certains textes, nous vous proposons des coulisses qui racontent comment ils sont arrivés dans le Club, car si la plupart de nos abonné·es publient sans connaître aucune personne de l’équipe de Mediapart, il arrive que les contributions transitent par l’un·e ou l’autre d’entre nous. Après une interview, une enquête, un reportage…
Le Club est l’espace de nos abonné·es, il est aussi fait de nos liens avec elles et eux.
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