Édition du 12 novembre 2024

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Manifeste pour les droits des femmes à l’égard de leur maternité

GRÈVE DE L’ACCOUCHEMENT

Dépôt public du Manifeste sur les droits des femmes à l’égard de leur maternité

Montréal, le 25 mars 2011 – Le Groupe MAMAN procède ce matin au dépôt public du Manifeste pour les droits des femmes à l’égard de leur maternité. Ce Manifeste, qui s’adresse aux décideurs élus du
gouvernement et, plus précisément, au ministre de la santé Yves Bolduc, a mobilisé plus de 4000 signataires1.

Ces derniers demandent à leurs éluEs :

 De voir à ce que les administrateurs du réseau et les professionnels de la santé, notamment les médecins, collaborent avec professionnalisme avec les sages-femmes (SF), et qu’ils soient informés adéquatement sur leurs compétences et leurs qualifications, de sorte qu’ils ne fassent plus obstacle au développement
de cette profession par simple méconnaissance ;

 De soutenir concrètement et reconnaître officiellement le rôle de premier plan des familles usagères dans l’orientation, l’organisation et l’appréciation des services des SF, notamment en adoptant une définition du concept « maison de naissance » (MdN) qui en respecte l’essence et qui inclut le rôle desfamilles ;

 D’enjoindre les administrateurs des CSSS, notamment du CSSS du Grand Littoral, à soutenir les familles dans l’exercice de ce rôle complémentaire indispensable notamment par le maintien d’un
comité de parents ;

 De reconnaître formellement le principe fondamental que la grossesse et l’accouchement appartiennent aux femmes et d’ajuster les lois professionnelles en conséquence.

Pour souligner l’événement, outre sa présidente Lysane Grégoire et sa vice-présidente et comédienne Alexandrine Agostini, le Groupe MAMAN a invité Françoise David, porte-parole de Québec solidaire et
signataire du Manifeste, de même qu’Andrée Rivard, historienne et membre de « feu » le Comité de parents de la MdN Mimosa, rattachée au CSSS du Grand Littoral, à prendre la parole.

L’événement a été ponctué d’une performance sur le thème de la Grève de l’accouchement où plusieurs incohérences ont été soulevés avec ironie et où des femmes, ayant cadenassé leur ventre pour le symbole, ont affirmé qu’elles n’accoucheraient plus tant et aussi longtemps que leurs droits ne seraient pas respectés !

Le Groupe MAMAN rappelle que la renaissance de la pratique des SF au Québec fait suite aux demandes répétées des femmes qui voulaient accoucher et non se faire accoucher. La légalisation des SF en 1999 a marqué un gain majeur pour la réappropriation de la grossesse et de l’accouchement par les femmes, et pour la démédicalisation de ces événements normaux et physiologiques.

Cependant, la lutte n’est pas terminée ; trop de femmes se font encore accoucher ! Seulement 2% des québécoises peuvent accoucher à l’extérieur de l’hôpital avec une SF, alors que 26% le souhaitent. Ainsi, plusieurs groupes citoyens à travers le Québec revendiquent l’accès aux SF et la mise en place de MdN. De son côté, le ministre Bolduc souhaite que les MdN soient initiées par une impulsion citoyenne, ce qui est actuellement chose faite dans 14 communautés aux 4 coins du Québec. Le problème c’est que le ministre exige que ces impulsions se traduisent en projets concertés entre tous les acteurs impliqués. Or, les groupes citoyens font face à des obstacles majeurs dont le manque d’engagements financiers du gouvernement et la méconnaissance de la pratique SF par les médecins, élément majeur
soulevé par le Manifeste.

« Comme pour les infirmières praticiennes spécialisées, les médecins freinent le déploiement de la pratique des SF » soutient Lysane Grégoire. Pourquoi cette résistance ? « Il semble que les préjugés sont
tenaces » ajoute t’elle. Dans le cadre de ses activités de réseautage avec les groupes citoyens, le Groupe MAMAN entend de nombreux témoignages révélateurs comme cette menace de démission évoquée par une poignée de médecins, si leur CSSS continue à travailler à un projet de MdN. Les propos sont parfois extrêmes : « Si tu voulais un moyen pour faire mourir ton bébé, tu l’as trouvé » a déclaré un médecin à une femme qui venait de l’informer qu’elle poursuivrait son suivi de grossesse avec une SF ; cet autre médecin affirme que la formation des SF est inadéquate et qu’elles devraient être encadrées et supervisées par des médecins pour des accouchements à l’hôpital uniquement. « Tout cela dépeint l’ampleur de la méconnaissance qu’ont les médecins de la pratique des SF » explique madame Grégoire.

Ce que l’expérience terrain permet de constater, c’est que les médecins ont un véritable droit de regard sur l’application de la Loi sur les SF et de la Politique de périnatalité du Québec. À titre d’exemple, le Comité citoyen du Saguenay-Lac St-Jean a multiplié ses démarches depuis 2006 afin d’avoir une MdN. En 2007, elles obtiennent qu’un budget de 40 000$ soit affecté à une étude de faisabilité ; quelques
mois plus tard, le projet est mis sur la glace et l’étude ne sera jamais réalisée, sans qu’on sache ce qui est advenu du montant affecté. En 2008, l’hôpital d’Alma signifie sa fermeture totale face à la venue des SF.

Printemps 2010, le CSSS de Chicoutimi exprime une ouverture pour l’intégration des SF en centre hospitalier seulement, ce qui ne correspond ni aux demandes des femmes, ni au cadre légal de la pratique.

Les Saguenéennes ont constaté que si les médecins acceptent les SF, c’est aux conditions qu’ils décrètent seulement. Les comités citoyens, avec toute la force de leurs convictions et de leur motivation, ont bien du mal à faire le poids face à la puissance du lobby médical. Les groupes s’épuisent au fil de longues démarches auprès des répondants du réseau de la santé dans leur région. Bien souvent, les Agences et l’administration des CSSS sont ouverts à l’idée d’introduire les SF et les MdN sur leur territoire. Mais, coincés entre la résistance
de leurs médecins, particulièrement précieux dans un contexte de pénurie de ressources, et l’absence d’argent annoncé par le gouvernement, il est facile d’imaginer l’Everest que doivent franchir les
groupes citoyens pour faire avancer le dossier. En effet, la volonté politique semble bien faible. Le ministre de la santé a annoncé des enveloppes budgétaires pour tous les nouveaux programmes prévus dans sa Politique de périnatalité, sauf pour les SF et l’implantation des 13 nouvelles MdN qui y sont pourtant promises.

De plus, le Manifeste souligne la précarité des comités de parents à l’intérieur des MdN. En effet, si la majorité de ces comités sont bien intégrés à la vie communautaire de leur MdN, l’absence de reconnaissance claire de leur rôle a permis une situation inacceptable, soit la cessation des activités du Comité de parents de la MdN Mimosa (CPM) à St-Romuald après plus de 10 ans d’engagement exemplaire.

Bien que le CPM ait reçu en 2006 le Prix Aurore Bégin soulignant l’excellence de son action communautaire, cela n’a pas empêché ce coup de théâtre : « Le CSSS du Grand Littoral nous a mis à la porte sous prétexte que notre comité ne figurait pas à l’organigramme instauré par la nouvelle organisation du système de santé »
déclare Andrée Rivard.

Madame Rivard déplore cette situation et l’échec des démarches du CPM pour faire valoir son simple droit d’exister. Elle ajoute : « Au-delà de notre déception et de nos frustrations, un tel entêtement du CSSS
suscite un questionnement de fond sur la place des usagères et des usagers dans les MdN, une place qui est loin de leur être reconnue. Ce qui est oublié, c’est la nécessité absolue pour les parents, à titre
d’usagers, de citoyens, de membres d’une communauté, de rester proches de ces petits milieux de vie et de naissance que constituent les MdN, et d’y être des participants non seulement actifs mais influents. »

À ce sujet, Françoise David souligne que « Québec Solidaire tient à ce que les Québécoises aient accès aux différents lieux de naissance (MdN, domicile ou hôpital), avec le type de suivi de leur choix : sage-femme ou médecin ». Madame David précise également que, tel qu’inscrit dans leurs engagements électoraux de 2008 :

« Québec solidaire souhaite reconnaître la MdN comme établissement communautaire public de première ligne, établi dans un lieu distinct du centre hospitalier, où les parents sont impliqués au premier plan dans la vie communautaire de la maison » C’est pourquoi elle a tenu à signer le Manifeste. « Depuis longtemps, les féministes plaident pour que le corps des femmes leur appartienne véritablement et pour qu’elles s’épanouissent comme des personnes à part entière. Québec solidaire est un parti féministe qui prône l’autonomie des femmes dans tous les domaines de leur vie » conclue Françoise David.

De son côté, Alexandrine Agostini insiste sur l’importance de respecter le choix bien légitime des femmes qui souhaitent accoucher à l’extérieur de l’hôpital avec une SF. « J’ai accouché de mon petit dernier dans l’intimité de notre chambre à coucher, avec son papa et son grand frère, accompagnée par une merveilleuse équipe de sages-femmes ». Elle ne s’explique pas pourquoi le gouvernement tarde tant à implanter une pratique dont les effets préventifs sont bien connus : « Qu’on parle de réduction des interventions, et donc des coûts associés, ou de diminuer le fardeau des spécialistes, dont le nombre est insuffisant, les SF ne représentent-elles pas une solution idéale ? » demande t’elle au ministre Yves Bolduc.

Le Groupe MAMAN demande avec insistance au ministre Yves Bolduc de faire suite aux demandes des 4000 signataires du Manifeste en :

 soutenant l’impulsion citoyenne qui se manifeste à travers le Québec pour l’émergence de MdN ;

 finançant à 100% l’implantation des MdN ;

 contrant la résistance des médecins en voyant à ce qu’ils soient mieux informés sur la profession de SF et en refusant tout abus de pouvoir de leur part ;

 intervenant afin qu’aucun comité de parents ne puisse être évincé d’une MdN, au contraire, qu’ils soient soutenus et encouragés à oeuvrer avec les SF, à la création et à l’animation de milieux de vie
communautaires répondant aux besoins des familles lors de la venue d’un enfant.

Source : Groupe MAMAN, www.groupemaman.org / info@groupemaman.org

Renseignements : Lysane Grégoire, présidente, 450.664.0441 / 514.885.4789

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