Nous sommes membres du Comité Vigie Santé et Services sociaux des Premières Nations du Québec*, dont le mandat principal vise à procurer une veille objective, avertie et continue de l’état de santé et du bien-être des populations des Premières Nations du Québec.
En ce qui concerne le phénomène des dépendances, les chiffres sont alarmants : en 2002, une enquête menée dans les communautés des Premières Nations du Québec révélait qu’il y avait près de 1,5 fois plus d’adultes aux prises avec une consommation élevée d’alcool chez les Premières Nations que dans l’ensemble de la population adulte au Canada et au Québec. En ce qui concerne la consommation de drogues ou de médicaments sans ordonnance, cette proportion était plus de 3 fois plus élevée chez les adultes des Premières Nations que chez ceux de l’ensemble de la population. Depuis 2002, les avis recueillis dans différents milieux nous indiquent que le problème s’amplifie.
À la suite du Sommet sur les dépendances, les membres du Comité Vigie incitent personnellement chacun des chefs des Premières Nations du Québec à poursuivre la mise en oeuvre du plan d’action élaboré au cours de cet événement. Ce plan constitue une source de mobilisation importante, mais à la condition que les responsables politiques des communautés en fassent une réelle priorité et que les partenaires gouvernementaux et institutionnels leur fournissent un soutien tangible. Le plan d’action couvre plusieurs aspects de la lutte à la dépendance. Sans vouloir en négliger aucun, nous pensons nécessaire qu’une attention particulière soit accordée à la mise sur pied de groupes d’entraide ou d’autres formes d’encadrement et de soutien pour accueillir les personnes vulnérables à leur sortie des centres de désintoxication ou de traitement. Il faut aussi accepter que ce soutien par la communauté se poursuive pendant une durée plus longue que ce qui est préconisé dans les milieux allochtones. Il nous apparaît donc essentiel, là aussi, que des moyens additionnels soient déployés par les responsables politiques des communautés avec leurs partenaires institutionnels et gouvernementaux, afin de créer un milieu d’accueil approprié à l’intention des personnes qui veulent s’affranchir de leur problème de dépendance.
Par ailleurs, au Québec, il n’existe aucun centre de désintoxication autochtone, même si plusieurs centres de traitement sont bien établis dans différents milieux. Cette lacune a eu pour effet de priver les Premières Nations d’un service de première ligne essentiel. Pour cette raison, les membres du Comité s’adressent aux instances gouvernementales du Canada et du Québec et demandent le soutien des conseils de bande, afin que le financement nécessaire à l’établissement d’un premier centre de désintoxication autochtone soit fourni rapidement aux Premières Nations du Québec.
Nous terminons en réitérant publiquement notre appui aux Chefs des Premières Nations du Québec qui doivent composer avec un contexte économique et social des plus difficiles. L’avenir des jeunes, des communautés et des territoires repose en grande partie sur la volonté et le leadership dont ils feront preuve dans cette lutte sans merci contre les dépendances.
*Notre comité a été créé en 2008, sous l’égide de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador (CSSSPNQL) avec l’appui de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL).
Signataires :
Mme Claudette Dumont-Smith, directrice générale, Association des Femmes autochtones du Canada
M. Aurélien Gill, retraité, ancien membre du Sénat
M. Pierre Joubert, expert conseil en évaluation de programmes et de politiques
Me Andrée Lajoie, professeure de droit, Université de Montréal
Mme Louise Montreuil, coordonnatrice, RUIS-UL
Mme Marcelline Picard, retraitée du milieu de l’éducation
Dr Eric Poirier, médecin
Dr. Evans Villeneuve, psychiatre
Dr.Stanley Vollant, médecin