Édition du 17 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Environnement

Cri du cœur d’un citoyen.

Pour quiconque se tient le moindrement informé, il ne se passe pas une semaine exempte de désastres environnementaux. Or, grâce à l’omniprésence des moyens de communication d’aujourd’hui, les populations sont plus que jamais conscientes que les entreprises incriminées réagissent généralement en sous-estimant largement l’ampleur des dommages, quand ce n’est pas carrément en camouflant tout ce qu’elles peuvent.

Quant à la réparation des dégâts, leurs interventions restent superficielles, de telle sorte que les formes de vie tributaires des territoires contaminés subissent des séquelles persistantes qui menacent de plus en plus leur survie. Ainsi, devant l’accumulation de ces cas, une perception bien lourde de conséquences s’est enracinée dans l’opinion publique, qui n’y voit plus que mensonge, duperie et supercherie, allant même jusqu’à accuser vertement les gouvernements de complicité. Ce qui discrédite radicalement l’intégrité des politiciens, pourtant essentielle à la santé démocratique.

Devant ces faits préoccupants, les questions suivantes trouvent toute leur pertinence :
Depuis le lancement des consultations gouvernementales sur les évaluations environnementales stratégies (ÉES), pour quelles raisons l’industrie ferait-elle subitement volte-face et agirait-elle avec transparence et honnêteté ?
Pareillement, pourquoi cesserait-elle d’exercer son tout-puissant pouvoir d’influence auprès des instances gouvernementales ? Éventualités bien difficiles à imaginer, en effet…

Ces nouvelles consultations, prétendument « démocratiques », ne sont en fait qu’un « sondage du pouls populaire ». Dès le départ, leur énoncé nous détourne du débat sur le fond, car il oriente a priori les discussions dans une direction qui, de toute évidence, envisage déjà sérieusement d’exploiter les hydrocarbures. De plus, bien que les citoyens puissent « librement » se prononcer à l’encontre, on leur demande de formuler simultanément des moyens à mettre en œuvre pour susciter une certaine acceptabilité sociale… de leur part ! Ce qui renforce la croyance que les dés sont déjà pipés.

Mais quoi qu’on en dise pendant l’exercice actuel, il restera une bien dure réalité à laquelle il nous faudra faire face lorsque d’autres désastres écologiques se produiront. Aux prises avec l’empoisonnement des écosystèmes qui les nourrissent et les abreuvent, et qui sont la plupart du temps impossibles à restaurer intégralement, les victimes seront confrontées à un cauchemar quotidien, dont même une économie en croissance et une richesse florissante ne pourront les sortir. Faute de moyens, ces populations n’auront d’autre choix que de rester captives de leur malheur. Seuls les mieux nantis pourront conserver leur qualité de vie supérieure en s’éloignant vers de meilleurs cieux.

Ces considérations ne devraient-elles pas nous inciter à remettre de l’ordre dans nos priorités ? Et à nous impliquer davantage ? Ainsi, entre économie (court terme) et environnement, quel serait le meilleur choix ? Poser la question après cet argumentaire, c’est y répondre. Mais il y a mieux que de les opposer, et c’est là notre seule voie de salut. En effet, comme le démontrent quantité d’acteurs socio-économiques chevronnés, ces deux « nécessités » peuvent avantageusement s’allier l’une à l’autre, à condition d’envisager le développement sous un angle nouveau ; d’où la naissance des concepts de développement « durable » et d’équité, qui gagnent en popularité.

Comme nombre d’organisations écoresponsables et tout un contingent de la population, je suis d’avis qu’il s’avère tout à fait hors de question de favoriser davantage les hydrocarbures. Notamment, l’exploitation des gaz de schiste est à proscrire complètement, car les preuves accablantes existent quant aux dommages irréparables que subissent de nombreuses régions du globe qui ont laissé ces procédés s’implanter. La protection de l’eau, de l’air et des sols ne peut être dissociée du domaine de la santé publique. Et s‘il est un devoir dont la primauté s’impose aux élus, c’est bien celui-là.

Par ailleurs, il n’est pas plus envisageable de permettre le passage chez nous du pétrole de l’Ouest canadien, réputé le plus polluant de la planète, que ce soit par voie terrestre ou maritime. D’abord parce que cet or noir est destiné à des marchés outre-mer, et qu’il ne produira de richesse tangible que pour un petit clan de l’establishment, ne laissant que des miettes passagères au « petit peuple », qui courra encore tous les risques. Refus catégorique également parce que, de surcroît, les prix se sont effondrés sur les marchés à l’échelle planétaire, et que leur volatilité ne garantit rien pour le futur. Alors, vu sous cet angle, qui pourrait encore y voir un quelconque avantage ?

Et d’un point de vue plus global, j’ajouterai que je presse instamment le gouvernement de se consacrer plus résolument à l’élaboration de politiques plus vigoureuses et rigoureuses pour stimuler l’émergence et promouvoir de nouvelles formes d’énergies plus « vertes ».

En finale, je joins ma voix au cri des cohortes qui réclament depuis longtemps un véritable débat de société sur le fond de la question énergétique au Québec.

Pour toutes ces raisons, et tellement d’autres, affranchissons-nous de l’emprise « moyenâgeuse » des énergies fossiles. Luttons pour la survie des espèces (dont nous sommes), pour maintenir notre qualité de vie, et pour favoriser une répartition plus équitable de la richesse. Mais d’abord et surtout pour redonner espoir à nos enfants d’avoir un avenir meilleur. Ce demain, aux allures menaçantes, dans lequel ils ont déjà le bout du pied…

Martin Bouchard
St-Anaclet-de-Lessard

Résumé du mémoire présenté au Ministère de l’énergie et des ressources naturelles du Québec.
Consultation publique sur les hydrocarbures, (Novembre 2015).

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