Édition du 19 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Écosocialisme

Principe No.6

Construire la résilience des territoires et des populations

Nous poursuivons la publication d’une importante brochure d’ATTAC-France, "La Transition énergétique". Nous publions cette semaine le chapitre intitulé : Principe no. 6 : "Construire la résilience des territoires et des populations ".

Confrontées aux dérèglements climatiques, à la raréfaction et au renchérissement des énergies fossiles, aux dévastations écologiques, aux guerres et compétitions pour l’énergie auxquelles se livrent les grandes puissances, les populations de la planète doivent oeuvrer collectivement pour assurer leur propre pérennité. On appelle résilience la capacité d’un écosystème ou de populations à s’adapter à des évènements extérieurs et des changements imposés transformant profondément l’environnement, l’économie, l’organisation sociale, leur permettant de ne pas disparaître. Mise en avant par les groupes villes ou territoires en transition [1], cette notion de résilience place le pouvoir d’agir de chacun et le pouvoir d’agir collectif au coeur du processus de transition. Il est alors proposé de “se préparer pour un futur plus sobre, plus auto-suffisant, et donnant priorité au local sur l’importé” pour s’adapter aujourd’hui, avec sérénité, à de futures pénuries ou transformations des écosystèmes plutôt que de le faire dans l’urgence, au milieu de désastres économiques et humanitaires majeurs.

La notion de résilience peut-être utilement complétée par les exigences de justice sociale. Ne pas perdre de vue les implications sociales des processus de transition, tout en luttant contre les inégalités, est un point cardinal d’une approche altermondialiste de la transition énergétique. Ainsi, le développement des énergies renouvelables pourrait être une occasion d’améliorer les conditions de travail et d’encourager la réappropriation sociale de la production énergétique, plutôt que d’accroître la prédominance du capital sur le travail et renforcer les logiques managériales néolibérales. De même, la reconversion des métiers que suppose une véritable transition écologique et sociale doit être définie et mise en oeuvre avec la participation active des salariés et de leurs organisations ou instances collectives. Enfin, les politiques de sobriété et d’efficacité énergétique doivent conduire à l’amélioration de la qualité de vie des populations les plus pauvres, précaires et démunies.

S’assurer que les processus de transition soient basés sur des principes de justice sociale clairement affirmés est clef pour que ces transformations soient désirées, et non imposées. Un scénario comme celui de Negawatt montre qu’une véritable transition énergétique est techniquement possible tout en conservant une qualité de vie suffisante pour désirer le changement. Construits sur l’idée essentielle que les plus grandes réserves d’énergie peu chères, accessibles et non polluantes sont celles que l’on peut économiser, ces scénarios démontrent que des modèles d’organisation sociale qui rompent avec les politiques énergétiques actuelles tout en satisfaisant une série d’exigences écologiques, sociales et démocratiques, sont possibles, faisables et désirables.

Par ailleurs, chaque territoire exige des solutions appropriées à ses spécificités, tant en termes de production, de distribution, d’efficacité, de sobriété, que d’usages de l’énergie. Il paraît donc essentiel d’encourager l’implication de toutes et tous, que ce soit sur les lieux de vie, de travail ou de sociabilité. En expérimentant concrètement le monde de demain, les initiatives concrètes telles que les villes en transition, les Cittàslow [2] ou les projets d’agriculture urbaine [3], cherchent à construire dès aujourd’hui un monde moins énergivore, plus solidaire, démocratique et juste socialement. Plus généralement, les initiatives visant à améliorer la qualité de vie, renforcer les liens sociaux, recréer de l’économie locale, tout en réduisant l’empreinte écologique, fourmillent. Ces expériences tracent les contours d’horizons d’émancipation individuelle et collective qui s’inscrivent dans les limites de la planète, dans la prise en compte du caractère fini des écosystèmes complexes dans lesquels nous vivons.

Mettre en oeuvre et financer des incubateurs sociaux et écologiques, de la médiation, des universités citoyennes, de la formation, la montée en compétence et l’emploi de milliers de personnes pour pour catalyser et démultiplier les dynamiques existantes etc. apparaît alors comme l’un des investissements clefs des politiques de transition écologique et sociale qui vont s’étendre sur des dizaines d’années.


[2Ralentir la ville : les Cittàslow contre le culte de la vitesse, www.bastamag.net/article2644.html

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