Édition du 17 décembre 2024

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G-20

G8/G20

Chronique d’un fiasco annoncé

Éditorial n°33 de la Lettre du Conseil scientifique d’Attac-France

Le G20 qui s’est tenu à Toronto les 26 et 27 juin s’est achevé par un échec que les gouvernements n’ont même pas cherché à masquer. On est loin des déclarations tonitruantes du G20 de Londres d’avril 2009 qui avaient affirmé urbi et orbi que les grands de ce monde allaient construire « un nouvel ordre mondial » !

Lors de la soirée débat « Face à la crise : désarmons la finance » organisée par Attac le 19 juin à Paris, et qui a rassemblé plus de 300 personnes dans une salle bondée, nous avions annoncé que ce G20 serait une mascarade et un échec. Nous ne prenions pas trop de risques !

Aucune des mesures annoncées lors du G20 de Londres n’a reçu un début d’application. La lutte contre les paradis fiscaux s’est traduite par le classement de ces derniers en trois groupes – blanc, gris et noir – ce qui revient à considérer qu’il y aurait de « bons » paradis fiscaux : les paradis « blancs » dans laquelle se trouvent tous les paradis européens dont Luxembourg et Monaco … Concernant les fonds spéculatifs (hedge funds), la Commission européenne a fait semblant de s’attaquer au sujet en proposant que les gestionnaires de hedge funds soient enregistrés (ce qui reviendrait à « normaliser » ces acteurs). Mais le gouvernement britannique a refusé cette timide proposition, car cela aurait nui à la City – la place financière de Londres – où le nombre de fonds spéculatifs est le plus élevé au monde.

Autre mesure envisagée pour « moraliser » la finance : réformer les marchés de gré à gré, qui ne font l’objet d’aucun contrôle, en leur imposant des chambres de compensation qui auraient permis de briser leur opacité. Que constate-t-on ? Les marchés de gré à gré continuent de faire leurs dégâts en toute liberté : c’est en effet à partir du plus grand des marchés de gré à gré – celui des CDS (Credit Default Swaps) - que les attaques spéculatives contre la dette publique grecque ont été lancées en 2010 !

Sous la pression des mouvements sociaux et du mouvement altermondialiste, les gouvernements ont été obligés de s’attaquer à la question des taxes sur les transactions financières (TTF). Cette conversion tardive s’est faite d’une manière parfois pathétique, ce qui montrait que la question n’est pas vraiment prise au sérieux. Il suffit de se rappeler à ce sujet la déclaration de B. Kouchner, qui a affirmé se rallier à la TTF dans une tribune dans le journal Le Monde, à condition que celle-ci soit volontaire, et qu’elle ne perturbe pas les marchés financiers ! B. Kouchner avait tout compris…

Le FMI a été mandaté à l’issue du G20 de Pittsburg pour faire des propositions au sujet des TTF. Là aussi, cela relevait de la manœuvre politique quand on sait que D. Strauss-Kahn, directeur du FMI, a toujours affirmé son incrédulité face aux TTF, fidèle en cela à la doxa néo (socio) libérale. Les conclusions du FMI ont été conformes à ce que l’on pouvait attendre. Plutôt qu’une TTF jugée inadaptée, le FMI a proposé un système de taxation des banques. Mesure inefficace et dangereuse car il était proposé que les taxes prélevées sur les banquiers servent à abonder un « fonds de secours » destiné à aider les banques en difficulté, c’est-à-dire les banques qui auront spéculé … Bravo M. Strauss-Kahn !

Finalement, cette proposition de taxation des banques n’a pas été adoptée à Toronto par le G20 car plusieurs pays y étaient opposés … Notons que Sarkozy et Merkel avaient déclaré soutenir cette proposition … sachant qu’elle serait rejetée lors du G20. Manœuvre qui n’a trompé personne. De déni en déni, ainsi vont ceux qui gouvernent le monde. Nous savions à l’avance que le G20 de Toronto serait un non-évènement car les choses sont claires depuis longtemps : les élites politiques ont fait alliance avec les élites financières et ne sont pas disposées à changer la logique actuelle de la finance qui domine le monde au profit des détenteurs (et des profiteurs) du capital financier. Cela saute aux yeux quand on constate que l’objectif prioritaire de nos gouvernants est de « rassurer les marchés », et non de leur imposer des règles contraignantes.

Une conclusion s’impose : tant que nous n’auront pas créé un rapport de force nous permettant d’imposer un désarmement des marchés, les G20 se suivront et se ressembleront. Une note d’espoir : la crise a été l’occasion d’une prise de conscience d’une partie croissante des populations de la planète sur les méfaits de la finance et sur le cynisme et la duplicité de ceux qui nous gouvernent. Cette prise de conscience constitue un levier sur lequel nous devons nous appuyer dans notre travail d’éducation populaire. C’est dans cette perspective qu’Attac France lance à la rentrée une campagne « Changer les banques, changer de banque ».

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