L’ancien président de Côte d’Ivoire Laurent Gbagbo est lui-même retenu à la Cour pénale internationale (CPI), à la Haye, aux Pays-Bas et attend son procès. Jugé pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre, tortures et viols commis durant sa présidence, de juin 1982 à décembre 1990, Hissène Habré a été condamné à la prison à vie, par les Chambres africaines extraordinaires (CAE). Quant à Simone Gbagbo, la Cour suprême ivoirienne a confirmé sa condamnation à vingt ans de réclusion pour « atteinte à l’autorité de l’État », pendant la crise post-électorale de novembre 2010 à avril 2011.
La concomitance des deux dates relèverait-elle d’un hasard du calendrier ou d’un fait pensé et décidé par des responsables politiques pour marquer les esprits ? Rien n’est moins sûr. La vraie question, ici, est de savoir si les deux procès ne sont-ils pas annonciateurs d’une nouvelle ère, l’ère de la justice, après celle d’une Afrique sans foi ni loi.
À l’analyse, l’Histoire nous montre un continent qui évolue en obéissant à un phénomène apparenté à l’effet de mode. N’y avait-il pas eu une « Afrique des colonels », puis une « Afrique des timoniers », enfin, celle en date des « tricoteurs des constitutions » pour s’incruster au pouvoir ? Avec, à chaque étape, de fervents disciples des différentes doctrines, tous versés au crime et à la notion d’impunité.
À cet égard, les procès de Dakar et d’Abidjan ont marqué la rupture. Pour Hissène Habré, les Chambres africaines extraordinaires, créées spécialement par l’Union africaine (UA), en 2006, ont suffisamment démontré la culpabilité de ce dernier. À la satisfaction générale. Tel n’a pas été le cas pour l’ex-première dame ivoirienne. Si les charges pour « crimes contre l’humanité » et « crimes de guerre » ont été abandonnées contre elle, la défense et une partie de l’opinion ont crié au « procès politique ». Mettant en avant le fait que l’accusation, pour le reste, n’avait pas présenté des preuves matérielles, en ce qui concerne surtout l’ « autopsie des victimes ». Quelque trois mille personnes, selon le rapport de l’ONU, avaient été tuées, à travers la bataille du pouvoir entre Gbagbo et Ouattara.
Quoi qu’il en soit, un bon procès, qu’il s’agisse du point de vue de l’accusation ou de celui de la défense, est celui qui repose sur la démonstration de la matérialité des faits. Le procès de Dakar, conforté par les témoignages des ONG internationales et une enquête de la justice belge, s’est clôturé sans anicroche. Celui d’Abidjan, par contre, promet des étincelles.
Qu’en penser, de manière globale ? La grande leçon à tirer est que, malgré tout, l’Afrique judiciaire est en train de se forger. Le pas qui vient d’être franchi doit être salué, car le crime et l’impunité ont été débusqués. Et traqués. Si cette option s’élargit et gagne en efficacité, l’Afrique pourrait se charger seule de ses dossiers judiciaires. Dans un avenir proche. Quant à la Côte d’Ivoire, le « verdict Simone » reste préoccupant. Ne peut-on pas le contourner, au nom de la paix civile ? Le président Ouattara, dont on vente la sagesse, a la clé...
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