Une alliance de plusieurs groupes écologistes au Canada a soumis à la CCSN une demande de respect intégral de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires de 1997. Concernant les activités nucléaires, cette loi peut se résumer comme suit. Alinéa a) : voir à ce que « le niveau de risque inhérent à ces activités [...] demeure acceptable ». Alinéa b) : « informer objectivement le public sur les plans scientifique et technique... ».
Dans une lettre ouverte collective adressée au président de la CCSN, le Dr. Michael Binder et au personnel de la CCSN, l’alliance souligne que la CCSN n’a pas encore pleinement informé le grand public canadien sur les problèmes de sûreté qui affligent les réacteurs CANDU. En juin 2011, la CCSN a accordé à Hydro-Québec un permis de réfection de Gentilly-2 sans avoir en main le Rapport d’analyse de sûreté, lequel est normalement obligatoire. Cette décision de la CCSN va à l’encontre de la Loi de 1997.
La lettre comprend 10 questions précises et demande une réponse de la CCSN d’ici le premier octobre. L’original de cette lettre est disponible au complet sur le site web du Mouvement Sortons le Québec du nucléaire : http://www.sortonsquebecnucleaire.org /
Question 1 : pourquoi la CCSN a-t-elle eu recours à l’Article 7 de la Loi de 1997, qui lui permet d’exempter toute firme de l’application de la loi. Par ce recours, la CCSN permet à Hydro-Québec de soumettre son Rapport d’analyse de sûreté, d’ici le 31 décembre 2011. Ce rapport était dû le 31 décembre 2010.
Question 3 : depuis Fukushima, la CCSN admet la possibilité d’un accident nucléaire grave avec les réacteurs CANDU. Pourquoi la CCSN ne divulgue-t-elle pas au public les problèmes qui ont empêché Hydro-Québec de soumettre son Rapport d’analyse de sûreté à temps ?
L’alliance a noté la déclaration suivante dans le document de la CCSN accompagnant leur décision de juin 2011 : « La Commission s’attend fortement qu’Hydro-Québec commence les activités de réfection aussitôt que possible, si elle est décidée à s’engager dans cette voie. »
Ceci soulève la question 5 : est-ce que « le niveau de risque inhérent à ces activités... demeure acceptable » quand la CCSN encourage Hydro-Québec à entamer la réfection « aussitôt que possible » sans connaître les modifications qui seront introduites et qui devraient être décrites dans le Rapport d’analyse de sûreté en décembre 2011 ? Est-ce que la Loi de 1997 autorise la CCSN à faire la promotion des réacteurs nucléaires ?
L’alliance souligne que le 7 avril 2008 la CCSN a rejeté un rapport de sûreté soumis par la Ontario Power Generation (OPG, firme genre Hydro-Québec) en donnant comme explication les défaillances de OPG et les problèmes génériques de sûreté affectant tous les réacteurs CANDU. Cette situation a été confirmée dans un rapport de 268 pages complété en août 2009 par la CCSN. Le premier paragraphe de ce rapport résume bien la situation :
« L’expérience du régulateur et de l’industrie avec les réacteurs actifs CANDU a conduit à l’identification de plusieurs problèmes génériques de sûreté. En dépit d’efforts soutenus visant le maintien et l’accroissement de la sûreté des centrales actives, ces problèmes de sûreté demeurent encore à divers stades de résolution ».
L’alliance pose la question 6 : pourquoi les nombreux problèmes de sûreté affectant les réacteurs CANDU ont-ils été invoqués pour justifier le refus du rapport de sûreté d’OPG en avril 2008, alors que les mêmes problèmes de sûreté ont été tout simplement ignorés par la CCSN en s’appuyant sur l’article 7 pour prendre sa décision de juin 2011 autorisant la réfection de Gentilly-2 ?
Prenant note de séismes de 6-Richter au Québec et au Nouveau Brunswick, l’alliance pose la question 9 : quelles données possèdent la CCSN concernant la résistance sismique des tuyaux à haute pression une fois que ceux-ci ont été fragilisés et corrodés après plusieurs années d’opération dans les réacteurs CANDU ? Quelle est la probabilité qu’un de ces tuyaux éclate durant un séisme de 6-Richter ?
La décision finale de cette « préparation » d’accident nucléaire revient au premier ministre Jean Charest qui doit considérer toutes les données de ce dossier, sans aucune influence indue du lobby nucléaire, pour le bénéfice des générations présentes et futures.
Michel A. Duguay, professeur au département de Génie électrique et génie informatique, Université Laval, Coordonnateur du Mouvement Sortons le Québec du Nucléaire (MSQN)
et 71 co-signataires
Co-signataires : Adair Leticia (Council of Canadians, Saint John chapter), Bélisle André (AQLPA), Bois Sébastien (CMDN), Bombardier Yvan (La Famille), Bonneau Eugenie C. (Les AmiEs de la terre du Québec), Breton Daniel (MCN21), Chatillon Jean (Artiste - Bécancour), Coburn Stéphanie (Conservation Council N-B), Cyr Jean-Claude (Ste-Thècle), Dagenais Jacques (Montréal), Doucet Marie-France (Epsilon La Pocatière), Duchesne Robert (MSQN), Duguay Mary (Montréal), Dumas Alain ( Économiste, Coalition verte Trois-Rivières), Dworkind Michael (PSSM), Ennis Dan (The Wolastoqewiyik trad. Council of Tobic), Fafard Marc (SISUR), Ferland Éric ( Groupe écosphère), Flatt Sharon (Nuclear-free New Brunswick), Foisy Pierre (Québec Solidaire-Mauricie), Fugère Michel (MVM), Gagnon Rose-Anne (Québec), Gauthier Yves (Euréko), Gauthier Jean-François( CMDN), Gauthier Raymond (Iles/Madeleine), Gingras Isabelle, Md (Sept-Îles), Giroul Philippe (MSQN), Gretchen Fitzgerald (Sierra Club Atlantic N-B.), Harley Mary Lou (Green Party of Nova Scotia), Jasmin Pierre (APLP), Jetté Marcel (Trav.Vict.Nucléaire), Julien Pierre-André (UQTR), Karon Alain (Organisme Jeunéthiquement Modifié, Lachapelle François A. (Retraité H-Q), Lack Larry (Sierra Club Atlantic N-B.), Laliberté Brigitte (enseignante), Lamothe Hélène (CMDN), Lambert Pierre (MSQN), Lanouette Diane (Champlain), Lapierre François (APEHL), Lapointe Ugo (QMM), Larose Gérald (UQAM), L’Homme Denis (Ex-sous-ministre/Énergie - MRNF Qc), Leblanc Jacinthe (R.Q.G.E,), Lemieux Julie (Écrivaine), Levasseur Jacques MD (APPEL), MacDougall Jack (Green Party of New Brunswick), Mayrand Karel (Fondation SUZUKI), Mélançon Carmen (Ligue des Citoyens du Secteur Beaurivage Shawinigan), Nolan Willy (IICPH), Notebaert Éric,MD (PSSM ACMD), Nourry Diane( Bécancour), Piché Claudette (Ste-Thècle), Primeau Daniel-Jean (APLP), Proulx Jean-Yves (AREQ-Maurice), Rés.Environ.Nouveau-Brunswick, Robichaud Dawn (New-Brunswick), Romey (New-Brunswick) , Rouse Chris (Conservation Council Bay of Fundy), Roy Julie (USherbrooke), Ruest Gaëtan (RMQ-FÉSA), Saint-Pierre Carolane (cinéaste), Saladzius Alain (Fondation Rivières), Sauvé Lucie (CRC-Éd.Rel.Env UQAM), Stone Iwaassa Raymond (Conseil Traditionnel Mohawk), Louise Vandelac (ISE-UQAM), Veilleux Jean-François (Étud. UQTR), Pierre Veronneau (AQLPA / VERTECH), Ward Lee Ann (Sierra Club Atlantic N-B.), Waridel Laure (Éco-sociologue)
Cette lettre a d’abord été publiée sur Cyberpresse du 11 août 2011