Tiré de Courrier international
Légende de la photo : "Il fait sacrément chaud pour la saison, hein ?" Sur le panneau : Sommet dur le climat. Sur la mallette : pays industrialisés. Dessin de Tom Paru dans Trouw, Amsterdam.
Le 6 novembre, l’Afrique, plus que toute autre partie de ce monde, avait les yeux rivés sur Charm El-Cheikh, cette ville balnéaire égyptienne nichée entre le désert de la péninsule du Sinaï et la mer Rouge. Car il se tient là-bas, jusqu’au 18 novembre, la 27e Conférence des parties sur le changement climatique (COP27). Le continent a mille raisons de rester aux aguets par rapport aux conclusions de ce rendez-vous sur le climat au pays des pharaons.
En effet, l’Afrique pèse seulement 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Or, selon les experts, c’est le continent le plus exposé aux conséquences de la déréglementation climatique, avec notamment 131 événements climatiques extrêmes, marqués par des tempêtes, des sécheresses et des inondations, ces deux dernières années. Autrement dit, le continent noir et sa population payent le prix fort, pour des actes irresponsables commis par les autres parties du monde.
Les participants à la COP27 vont-ils enfin trouver des solutions à cette injustice climatique à l’encontre de l’Afrique en apportant les réparations nécessaires ? Ou bien les autres continents de notre planète vont-ils continuer de se complaire dans l’impunité et dans l’insouciance absolue, en laissant le berceau de l’humanité se faire détruire ? Les prochains jours de la COP27 lèveront un coin du voile sur les réponses aux questions que les Africains se posent depuis belle lurette. Mais déjà, le sort réservé aux conclusions des précédentes rencontres sur le climat ne prête pas à l’optimisme.
L’on se souvient que l’accord de Paris avait souligné la nécessité d’investissements à grande échelle pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de manière significative. Et, de façon plus précise, que les pays développés doivent prendre l’initiative d’apporter une aide financière aux pays moins bien dotés et plus vulnérables aux conséquences du changement climatique. Par ailleurs, des fonds avaient été promis lors de cette COP21 à Paris.
Des promesses à la pelle, on n’en a récolté que du vent
Au bilan, l’on se rend compte que les flux financiers internationaux pour l’adaptation au climat, vers les pays en développement, en l’occurrence ceux d’Afrique, sont 5 à 10 fois inférieurs aux besoins estimés. Donc des promesses à la pelle d’hier, on n’en a récolté que du vent. Si bien que l’on est en droit de se demander, du côté de l’Afrique, si ces conférences sur le climat ne se suivent et ne se ressemblent pas, c’est-à-dire si elles ne sont pas sans résultats. À moins que l’étape de l’Égypte ne change radicalement la donne.
Dans tous les cas, le continent a posé sur la table de la COP27 sa feuille de route en guise de piqûre de rappel. En juillet dernier, la Fondation Mo Ibrahim faisait le plaidoyer pour positionner l’Afrique dans le débat global sur le climat en trois axes : prendre en compte la vulnérabilité spécifique de l’Afrique ; répondre au droit des populations africaines à l’accès à l’énergie ; mettre en évidence le potentiel de l’Afrique pour le développement d’une économie verte à l’échelle mondiale.
La voix de l’Afrique sera-t-elle entendue à Charm El-Cheikh ? C’est le wait and see. Mais une certitude se dégage : si ceux qui exploitent l’énorme potentiel de l’Afrique pensent que le sort de ce continent n’est pas leur “affaire”, ils ont tout faux. Car ils ne vont pas échapper, eux non plus, au “carnage climatique” auquel ils exposent, consciemment et de manière égoïste, le continent noir.
Michel Nana
Un message, un commentaire ?