Par Sergio de Rosemont en collaboration avec Luc Bordeleau
Malgré le fait que Jean-François Lisée ( lors de sa campagne à la chefferie ) et Véronique Hivon ( https://www.youtube.com/watch?v=ttTJWjeJzbA ) aient officiellement annoncé que le Parti québécois (PQ) embarquait dans le combat aux côtés de Québec solidaire, la Coalition Avenir Québec, d’Option Nationale, et le Parti vert du Québec pour l’instauration d’un mode de scrutin proportionnel au Québec, plusieurs militantEs péquistes continuent de prétendre que ce mode de scrutin serait dangereux.
Dangereux car il permettrait supposément au Parti libéral du Québec (PLQ) d’obtenir des gouvernements majoritaires à quasi perpétuité.
Désolé chers / chères amiEs péquistes, mais vous êtes dans l’erreur.
Voyez-vous justement si nous aurions été avec un mode de scrutin proportionnel au Québec, il aurait été impossible à ce gouvernement de Philippe Couillard d’imposer unilatéralement sa politique d’austérité car il aurait été MINORITAIRE et qu’il ne l’avait pas annoncée pendant la campagne électorale.
Le mode de scrutin de type proportionnel est loin d’être négatif, au contraire il est la meilleure sécurité contre de tels gouvernements.
Car sous un mode de scrutin proportionnel si vous désirez appliquer une politique vous vous devez de l’annoncer pendant la campagne électorale en cours.
Pourquoi ?
Parce qu’en mode de scrutin proportionnel les gouvernements majoritaires sont rares. Possibles mais rares.
De plus en proportionnelle il est de tradition que lorsque le parti est ayant obtenu le plus de votes n’a pas une majorité absolue (50% +1) à lui seul, il est déclaré gagnant, mais se doit de négocier avec un ou d’autres partis afin de former un gouvernement de coalition représentant plus de 50 % des votes obtenus.
Et évidemment lorsque vous négociez avec un ou d’autres partis dans le but de composer un gouvernement, vous le faite sur la base de votre plate-forme électorale.
Donc imaginez une élection sous mode proportionnel, où un Parti libéral du Québec proposerait comme plate-forme un programme d’investissements massifs en santé et en éducation et qu’il récolte le plus de votes (ex. 30%), mais pas une majorité absolue et est déclaré gagnant de l’élection étant celui qui a remporté le plus de votes et qu’il soit appelé à former le prochain gouvernement, en tentant de s’adjoindre ou d’autres partis.
Maintenant imaginez que vous avez un parti qu’on appellera le « Parti ABC » qui a obtenu 22 % des votes, avec lequel le PLQ négocie afin de créer un gouvernement majoritaire et avec 50 % + 1 des votes obtenus et qu’il réussit à s’entendre avec lui. Donc, les deux partis associés formeraient ensemble le nouveau gouvernement.
Et imaginons maintenant que 6 mois plus tard que le PLQ sorte d’un agenda secret un programme d’austérité jamais évoqué auparavant et décide de l’imposer.
Alors le « Parti ABC » s’il ne veut pas perdre sa crédibilité auprès de l’électorat, n’a simplement qu’à ce retirer de ce gouvernement et alors ce dernier risque fort de tomber, puisqu’a la merci d’un vote de défiance, puisqu’il ne disposera plus d’une majorité à l’Assemblée nationale.
Non chers / chères militantEs péquistes récalcitrantEs cesser de craindre le mode de scrutin proportionnel qui est le seul sécuritaire contre de tels gouvernements. Au contraire c’est le mode de scrutin actuel qui a permis à un PLQ avec moins de 50% d’appui populaire de gouverner seul 12 années sur 14 entre 2003 et 2017.
Votre parti a fait le choix de progresser côté démocratie, prenez ce même chemin.
Il est vrai que le PQ a déjà profité du système actuel dans le passé. Mais avec la division du vote francophone qui est là pour rester, que l’on aime cela ou non, un tel espoir est illusoire dans le futur. Donc ce n’est pas seulement par conviction démocratique, mais par intérêt bien compris que les dirigeants du PQ se sont joints au mouvement initié par les autres partis d’opposition. Le PQ peut encore espérer diriger un gouvernement dans le futur, mais seulement s’il a l’habilité de s’entendre avec des partenaires sur un programme commun, avant ou après les élections.
Dans ce contexte, craindre un mode de scrutin proportionnel, révèle selon moi plus d’une appréciation irréaliste de la réalité politique du Québec actuel, que d’une mauvaise foi non justifiée.
Le but de mode de scrutin n’est pas d’être au service d’un parti politique mais à celui des électeurEs et de respecter le plus parfaitement possible leur volonté.
Ah oui, je vous entends aussi me dire qu’un mode de scrutin proportionnel nuirait à la tenue d’un 3ème référendum.
Désolé mais l’argument ne tient vraiment pas la route.
En Écosse où s’est tenu un référendum portant sur l’indépendance, c’est justement un mode de scrutin proportionnel qui est en vigueur et le parti indépendantiste qui a organisé ce référendum était au pouvoir en vertu de ce mode de scrutin.
Enfin, une démonstration des distorsions amenées par le mode de scrutin uninominal à un tour à partir du résultat des élections de 2014, tirée d’un autre article publié en février 2016. À cette occasion, Philippe Couillard se disait fort heureux de sa majorité obtenue. Pourtant, regardons les chiffres si vous permettez : Si nous vous disons 41 % des votes = 56 % des sièges = 100 % du pouvoir, est-ce que cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Il s’agit des résultats du PLQ de Philippe Couillard lors de l’élection du 7 avril 2014.
41 % qui se transforme « magiquement » en 56 % peut-on vraiment appeler cela une majorité ? Non, puisque évidemment au plan mathématique une majorité absolue devrait correspondre à 50 % + 1 des votes obtenus.
Dans un mode de scrutin équitable, donc proportionnel, un parti n’ayant obtenu que 41 % des votes n’aurait droit qu’à environ 41 % des sièges et non pas à 56 % et ce parti n’aurait surtout pas droit à 100 % du pouvoir pour lui tout seul puisqu’il devrait gouverner au sein d’une coalition pour lui permettre de dépasser la barre du 50%.
Maintenant portons attention au pourcentage de 41 %. Il représente le pourcentage des votes obtenus et non pas celui des électeurs inscrits. Si vous prenez le temps d’aller vérifier sur le site du Directeur général des élections du Québec (DGEQ) pour l’élection du 7 avril 2014, il est mentionné que le taux de participation est de 71,43 % qui représente le pourcentage des électeurs ayant utilisé leur droit de vote. 1,04% des bulletins ont été rejetés, de sorte qu’il reste un solde de 70,4% de votes valides.
Donc mathématiquement, si on revient aux votes exercés : 100 % – 71,43 % = 28,57 %. Vous avez saisi que 28, 57 % équivaut au nombre d’électeurs qui se sont abstenus ou si vous préférez n’ont pas voté. Plus du quart des électeurs ! Ce qui signifie en fait que le 41 % des votes obtenus par le PLQ, n’équivaut qu’à 29,2 % des électeurs soit un peu plus du quart mais moins que le tiers des électeurs inscrits. Une majorité absolue et 100 % du pouvoir obtenue avec seulement 29,2 % des électeurs ayant le droit de vote, est-ce logique, est-ce respecter la démocratie ? Non !
Voici des chiffres plus détaillés concernant l’élection du 7 avril 2014 pris sur le site du DGEQ :
Électeurs inscrits : 6 012 440 (100%) ; Votes exercés : 4 295 055 (71,4%) ; Votes rejetés : 62 793 (1,04%)- Votes valides : 4 232 262 (70,4%).
Et les résultats par parti :
PLQ : 1 757 071 votes exprimés (56% des députés élus pour 41,5% des votes valides équivalant à 29,2% des électeurs inscrits). Surreprésentation importante ;
PQ : 1 074 120 votes exprimés (24% des députés élus pour 25,4% des votes valides équivalant à 17,9% des électeurs inscrits). Sous-représentation mineure, c’est le résultat le plus « proportionnel » ;
CAQ : 975 607 votes exprimés (18% des députés élus pour 23,1% des votes valides équivalant à 16,2% des électeurs inscrits). Sous-représentation importante ;
QS : 323 124 votes exprimés (2% des députés élus pour 7,6% des votes valides équivalant à 5,4% des électeurs inscrits). Sous-représentation importante ;
Autres partis et indépendants : 102 340 votes exprimés (0% des députés élus pour 2,4% des votes valides équivalant à 1,7% des électeurs inscrits). Aucune représentation.