Sur les quelque 1600 listes enregistrées le 7 septembre, date de dépôt des candidatures, 1 300 ont été finalement acceptées, a-t-on appris mardi. Ils seront donc plusieurs milliers de Tunisiens à briguer une des 218 places de l’Assemblée constituante, qui sera élue par le peuple le 23 octobre prochain.
Les listes se répartissent entre indépendants 45% et partis politiques (55%), dont 105 ont été légalisés depuis la chute de Ben Ali). Des chiffres impressionnants qui risquent fort de donner le tournis à l’électeur, en général jeune et novice en matière de démocratie.
« Nous comptons sur la maturité des citoyens »
« Le grand nombre de listes a de quoi troubler l’opinion publique, mais nous comptons sur la maturité des citoyens pour que leurs voix se concentrent sur les organisations les plus crédibles, porteuses de vrais projets de société et de programmes », espère Mustapha Ben Jaafar, président du parti Ettakatol-Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL, gauche), dans les lignes du journal algérien l’Expression.
Mais faudrait-il encore que ces projets existent. Les maigres indications de certains (« les acquis de la femme sont intouchables », s’est contenté de déclarer par exemple mardi Rached Ghannouchi, leader du parti islamiste Ennahda), risquent bien de laisser les Tunisiens sur leur faim.
Stratégies électorales
Faute de se retrouver dans une proposition politique crédible, les électeurs seront sans doute tenter de choisir en fonction d’un nom. Et les candidats qui l’ont compris sont légions. Fi des projets, ils préfèrent mettre l’accent sur leur rôle dans la révolution, leur opposition historique à Ben Ali ou leur franc parler.
Ennahda, parti favori pour les élections de la Constituante, ne cache pas sa stratégie électorale : la répression subie sous l’ancien régime comme un tremplin pour la notoriété et les fonctions politiques. « Nous avons mis en tête de liste des militants qui ont fait de la prison sous Ben Ali et qui sont connus pour ça », admet Rached Ghannouchi.
Les hommes politiques ne sont pas les seuls à tirer profit de leur engagement passé. Le bloggeur Yassine Ayari, en lice pour la formation « Les jeunes libres » à la circonscription Djebel Oust/Bir Mcherga (Gouvernorat de Zaghouan), semble compter sur son militantisme contre la censure web avant le 14 janvier pour récolter les voix des citoyens.
Trois heures de message politique par jour
Autre personnalité devenue publique grâce au web social et désormais reconvertie en élu potentiel, Astrubal, l’un des fondateurs du célèbre blog collectif Nawaat, candidat pour la liste « Al-Jalaa » à la circonscription de Bizerte.
Une profusion de candidatures, et des « programmes » uniquement basés sur la défense de la démocratie, de la liberté ou de la religion… Mais plus d’un tiers des Tunisiens ne savent d’toujours pas pour qui ils voteront, selon un sondage réalisé par l’institut tunisien Sigma.
Le grand nombre de candidatures illustre toutefois la jeunesse et la vitalité de la toute jeune démocratie tunisienne. Et si l’électeur aura fort à faire pour faire son choix au milieu d’une offre pléthorique, il ne regrettera surement pas l’époque où même les morts étaient appelés à glisser un bulletin mauve dans l’urne.
Les citoyens auront en outre, dans quelques jours, un petit aperçu des diverses propositions politiques. Si la publicité politique vient d’être interdite, à compter du 1er octobre, début officiel de la campagne, les médias publics nationaux diffuseront les 3 minutes de message électoral par liste. Soit, au total, trois heures environ de déclarations politiques.
Jeune Afrique