De nombreuses femmes en Tunisie considèrent que la victoire des islamistes d’Ennahda est de nature à mettre en péril le maintien de leurs droits acquis depuis des décennies.
Jeunes ou âgées, voilées ou non, issues de toutes les classes sociales, les manifestantes sont demeurées pendant près de deux heures sur la place du gouvernement. Elles ont entonné des chants, scandé des slogans (« dehors les rétrogrades ») et brandi des pancartes réaffirmant que les femmes en Tunisie sont des « femmes libres » et que la prochaine constitution à laquelle va s’atteler l’assemblée devra se porter « garante de leurs droits ».
Un groupe de dix-huit femmes avait auparavant été reçu par le Premier mMnistre par intérim Beji Caid Essebsi qui, selon elles, a cherché à les rassurer, affirmant qu’il y avait « une ligne rouge à ne pas dépasser » en Tunisie.
« Les acquis de la femme remontent à longtemps et personne ne pourra les confisquer », a affirmé Hosnia Eloujoud, 38 ans, en rendant compte de la teneur de sa conversation avec le Premier ministre.
Selon ce dernier, tous les partis politiques représentés à la nouvelle assemblée se sont mis d’accord pour ne pas dépasser « cette ligne rouge », a pour sa part rapporté Ahyet Ayarai, une infirmière d’une quarantaine d’années.
Au même moment, des centaines d’universitaires ont manifesté à la Cité des Sciences à Tunis pour « la défense des libertés académiques et individuelles ».
Le rassemblement —quelque 500 personnes- était organisé par le Forum universitaire tunisien à la suite d’incidents survenus ces derniers jours à l’Ecole supérieure du commerce (ESC) à la Manouba (ouest).
Selon des sources syndicales, deux enseignantes ont été agressées pour leur tenue vestimentaire jugée indécente par un groupe de jeunes gens. L’une a été secourue par un vendeur ambulant alors qu’elle recevait des coups de poing au visage dans un parking.
La seconde a dû être évacuée par ses étudiants quand « des jeunes, dont certains étaient barbus », l’ont empêchée de terminer le cours en chahutant, sa jupe ayant été jugée trop courte.
Une grève de protestation a déjà eu lieu lundi dans cette école et d’autres mouvements similaires sont prévues dans les établissements universitaires de Tunis.
« Aujourd’hui, ils (les islamistes) mettent en question la liberté vestimentaire et demain ils vont interférer dans le contenu des cours », s’est indignée une enseignante.