Ces mêmes chroniqueurs et chroniqueuses de la gauche, par leurs analyses de cette élection présidentielle, ont conclu que l’autoritarisme et le glissement vers le néofascisme de Trump ont été remplacés par l’impérialisme de Biden. En somme, la classe capitaliste américaine en avait assez du comportement de Trump. Cette classe n’était pas contre son programme, d’ailleurs dicté par les capitalistes afin d’assurer l’hégémonie des États-Unis pour le 21e siècle, mais le comportement de Trump devenait un problème pour l’image du pays, et surtout pour la classe capitaliste américaine. Ils se sont ainsi dirigés vers un politicien traditionnel, qui avait bien servi les intérêts de cette classe capitaliste durant ses mandats comme sénateur du Delaware et comme vice-président sous Obama. Comme colistière de Biden, Mme Harris peut aider à promouvoir l’image de cette administration avec sa politique de retour à l’impérialisme américain et de consolidation de l’hégémonie, si nécessaire pour le capitalisme et l’économie de ce pays.
Certes, il va y avoir un changement de style à la Maison-Blanche, mais la politique de Biden, soutenue par Mme Harris, sera la même : défendre les intérêts de la classe capitaliste, suivre les dictats de cette classe, mais le faire avec un sourire, pour faire croire à la population et au monde qu’avec Biden et Harris, l’Amérique a profondément changé pour le mieux. Quelle hypocrisie !
Comme l’a souligné Karl Marx, « Les opprimés sont autorisés, une fois toutes les quelques années, à décider quels représentants particuliers de la classe oppressive vont les représenter et les oppresser ». Ce changement de Trump à Biden démontre, pour la gauche socialiste et les progressistes américain-e-s, que la « crise hégémonique mène à une crise d’autorité au sein du capitalisme », comme le soulignait Antonio Gramsci.
Tout au long de cette pandémie, qui continue de s’attaquer à la population, il y a eu des actions contre le manque de direction de Trump, pour avoir aidé des hôpitaux privés à accueillir des clients aux frais du gouvernement et ainsi de présenter à ses amis riches une opportunité de faire des profits énormes, particulièrement dans la ville de New York. Il y a eu aussi des grèves dites générales contre les politiques de Trump dans les quatre coins du pays. La lutte contre le racisme systémique, provoquée par l’assassinat de George Floyd et d’autres, a mené à l’occupation (un retour au mouvement Occupy, que plusieurs journalistes même ici pensaient mort et éphémère) du centre-ville de Seattle, sans compter les émeutes de trente jours et nuits à Portland en Oregon. Ces stratégies vont continuer sous l’administration Biden-Harris. La lutte continuera indépendamment de qui est au pouvoir. Les démocrates et les républicains sont du pareil au même.
Nous pouvons reconnaître, par les différentes discussions à travers le pays, que la lutte va continuer. Les actions de rue deviendront encore plus fortes, surtout quand les militantes et militantes qui ont voté pour Biden, en pensant qu’il y aurait une amélioration, vont constater que la situation ne change pas. Cette cohorte de la gauche qui a voté pour Biden sera la première à dénoncer et a à mener la charge contre cette administration. D’ailleurs, dans un discours électoral de Biden devant les grands donateurs de sa campagne électorale, il a déclaré que « rien ne va changer » et que l’avenir sera « business as usual ».
Depuis la fin de cette élection présidentielle, nous avons pu remarquer que les rencontres virtuelles ont augmenté considérablement. Les militants et les militantes de la gauche socialiste, appuyé-e-s par les progressistes, maintiennent le cap sur la lutte contre le capitalisme.
Un autre aspect, encore plus central dans la construction d’un mouvement socialiste aux États-Unis que les actions de rue contre l’administration Biden-Harris, est le développement et l’amélioration de nos théories sur la lutte des classes. Pour maintenir et renforcer l’alliance socialiste à travers le pays et mener la lutte d’une façon conséquente, nous devons renforcer l’éducation populaire des militants et militantes, mais aussi de la classe ouvrière en générale, comme l’indiquait déjà Rosa Luxembourg au début du siècle dernier (Réforme et révolution).
Organiser des manifestations et des luttes directes doit s’accompagner d’une éducation de classe, d’une stratégie de classe et de tactiques de classe. La lutte des classes comprend les manifestations et les luttes directes pour attaquer la classe capitaliste américaine, et toutes les classes capitalistes, afin de gagner des réformes radicales qui changent les conditions de la classe ouvrière, mais aussi pour solidifier la stratégie de classe au sein du mouvement socialiste. L’ultime but, pour les militants et militantes socialistes, c’est de mettre le capitalisme aux poubelles de l’histoire.
L’éducation populaire de classe demeure, pour la gauche socialiste américaine, aussi importante que de mener des luttes au quotidien contre l’administration Biden-Harris. Détruire le système capitaliste nécessite une convergence entre les luttes et l’éducation populaire des masses. La création d’un mouvement socialiste demeure toujours le tremplin pour tendre vers la création d’un véritable Parti socialiste à moyen terme, afin de mener la lutte de classe à long terme pour la révolution socialiste. L’éducation de classe permet l’intégration de ces différentes étapes comme les anneaux d’une même chaîne révolutionnaire.
La gauche socialiste américaine vit un moment très important, d’une part pour consolider les victoires au niveau municipal, dans les législatures des États et au niveau fédéral, et d’autre part pour créer une dialectique entre l’éducation populaire et leur stratégie révolutionnaire, pour créer une symbiose entre les différentes étapes de la chaîne et enraciner la lutte de classe pour un avenir socialiste.
Lotta Continua
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