La réalité est que les personnes atteintes de problèmes de santé mentale ne sont pas toutes violentes. Particulièrement, les services en santé mentale, lorsqu’ils sont offerts adéquatement, bénéficient directement ou indirectement à des centaines de milliers de Québécoises et Québécois, chaque jour.
Or, depuis longtemps, la santé mentale est le parent pauvre du réseau de la santé, tant en matière de prévention et de détection que d’intervention. Pourtant, on estime que 20 % de la population du Québec souffrira d’une maladie mentale au cours de sa vie. Les troubles anxieux et dépressifs sont les plus fréquents et comptent pour près de 65 % de l’ensemble des troubles mentaux.
Les bénéfices associés notamment à la psychothérapie sont clairement reconnus et même chiffrés. Sur les aspects strictement humains, des milliers de personnes peuvent trouver une raison de continuer à s’accrocher à l’essentiel. C’est sans parler des bénéfices économiques qui permettent d’épargner des coûts supplémentaires avec des interventions en amont. Malgré ces faits, comment donc expliquer la situation de sous-financement dans laquelle nous nous trouvons ? Les coûts humains sont beaucoup trop importants pour ne pas agir.
Briser les tabous
Il faudra un jour ou l’autre briser les tabous associés à la santé mentale et cesser la stigmatisation. Cela signifie que l’on devra nécessairement commencer par en faire une priorité collective… et en parler. Pour y arriver, il faudrait d’abord connaître l’étendue du problème auquel nous faisons face. Un portrait général mériterait d’être réalisé. À l’heure actuelle, la réalité est qu’il n’est même pas possible d’avoir en main des données d’enquêtes récentes sur la prévalence réelle des troubles mentaux au sein de la population québécoise puisque ces données ne sont pas mises à jour sur une base régulière.
Peu importe notre âge, notre statut socioéconomique et nos origines, personne n’est à l’abri de vivre de telles difficultés. Les problèmes de santé mentale peuvent survenir n’importe quand au cours d’une vie, et durer malheureusement très longtemps. D’où l’importance de mettre en place un réseau de services et de soutien social stable afin d’aider tous ces gens, de nous aider comme société. L’instauration d’une couverture publique universelle de la psychothérapie, une solution de plus en plus préconisée, doit se faire dès que possible. Au moment d’écrire ce blogue, une pétition est d’ailleurs en ligne à ce sujet sur le site de l’Assemblée nationale du Québec.
Remplir le vide
La pandémie que l’on vit met d’ailleurs l’accent sur la détresse et le sentiment de vide ressentis par bon nombre d’individus confinés chez eux depuis mars dernier. Ce contexte nous amène dans une situation paradoxale : tout le monde convient que l’enjeu de la santé mentale prend plus de place que jamais auparavant, alors qu’en matière de prévention et d’intervention les personnes atteintes de troubles de santé mentale sont devant un vide.
Pratiquement restreints entre quatre murs depuis bientôt neuf mois, il est permis de croire que les citoyennes et citoyens applaudiraient des investissements significatifs du gouvernement dans les services en santé mentale, tel que celui de 100 millions de dollars annoncé hier. Plus encore, il s’agirait de donner un sens collectif à la mort tragique de deux personnes assassinées par quelqu’un qui a échappé à notre filet social. La fenêtre semble ouverte comme jamais, le gouvernement entendra-t-il l’écho historique qui résonne partout sur le territoire ? Saura-t-il remplir le vide causé par le sous-investissement chronique des dernières années ?
En terminant, je souhaite exprimer au nom de la CSQ ma profonde sympathie aux familles et aux proches en deuil de François Duchesne et de Suzanne Clermont, décédés tragiquement le 31 octobre dernier. Nos pensées et notre solidarité les accompagnent.
Un message, un commentaire ?