Une méthode chère à l’ex-ministre Bolduc
Beaucoup d’autres firmes implantent actuellement la fameuse méthode Toyota ou elles forment les dirigeantes et les dirigeants des établissements du réseau afin qu’ils l’implantent. Cette méthode se répand largement, car elle s’avérait être la sacro-sainte bible du Dr Bolduc, le prédécesseur du ministre de la Santé et des Services sociaux. Ce dernier en avait fait sa méthode de prédilection pour atteindre son objectif de recherche d’économie budgétaire dans la foulée de la loi 100 de Raymond Bachand. Il a engagé les établissements du réseau à l’utiliser dans le cadre de l’application de mesures d’optimisation.
Si la méthode Toyota a pu faire ses preuves dans certains départements où la logistique opérationnelle prime, par exemple pour la gestion des approvisionnements et la distribution des médicaments, l’application de cette méthode a donné lieu à plusieurs dérives lorsqu’elle s’adresse à des services destinés aux personnes, les services sociaux au premier chef. Des observateurs ont fait remarquer que « dans plusieurs établissements, la qualité des services aux usagers s’est détériorée suite, entre autres, au minutage des actes professionnels ».
Optimiser une chaine de distribution n’est pas de même nature qu’optimiser des services censés être fournis avec humanisme. Cela relève du simple bon sens ! Bon sens qui se perd de plus en plus en cette ère de productivité, de rendement et de performance.
Une méthode qui conduit au minutage à outrance des interventions
Alors que dans l’esprit de la méthode Toyota les solutions d’amélioration doivent venir de l’équipe d’intervenantes et d’intervenants elle-même, son application actuelle s’avère le plus souvent répondre aux objectifs de réduction budgétaire définis par les employeurs. Son implantation conduit généralement à une intensification du travail, à une normalisation à outrance des interventions à la suite du minutage et donc, forcément, à une détérioration des conditions de travail du personnel. Quant à la qualité des services rendus, on est loin de l’humanisation des soins et des services.
Il faut respecter le jugement clinique des professionnelles et des professionnels de la santé
Même d’autres types de méthode, qui n’ont pourtant rien à voir avec la recherche de performance, sont servis à la sauce de la nouvelle gestion publique. C’est le cas de l’instauration de normes comme Entreprises en santé, Hôpitaux promoteurs de santé et Planetree. Plusieurs de nos syndicats membres ont exprimé le fait que sous prétexte d’implanter des modes de gestion visant à accroître le bien-être au travail du personnel, les employeurs se servent de ces méthodes pour atteindre leurs objectifs de rendement accru, un détournement de fonction en quelque sorte. On peut certes former les gestionnaires à certaines méthodes, mais on ne change pas nécessairement par là le style de gestion de certaines personnes !
C’est pourquoi, le ministre Hébert doit viser plus large dans son analyse de la situation. S’il veut vraiment ramener la qualité des interventions, il faut revenir à une humanisation des soins et des services et cela passe par le respect du jugement clinique de l’ensemble du personnel de la santé et des services sociaux. Le lean manufacturing (littéralement fabrication à coûts faibles) pose problème. Quelqu’un peut-il m’expliquer comment l’expression fabrication (manufacturing) est entrée dans le vocabulaire du monde de la santé qui, faut-il le rappeler, a pour mandat de prendre soin d’êtres humains