Tout cela d’ailleurs a mené à la création d’un nouveau réseau, « Black Lives Matter » (BLM), en réaction devant l’inaction d’organisations afro-américaines traditionnelles telles la NAACP et l’Urban League. Celles-ci avec l’appui de leaders religieux et politiques ont dénoncé BLM comme étant « trop radical. Des personnalités proches des Clinton se sont impliquées dans cette dénonciation du « radicalisme », tels le révérend Al Sharpton et le congressman John Lewis. Plusieurs de ces personnes avaient travaillé pour Bill Clinton au moment de son élection en 1992.
La montée de Sanders et de son discours de classe a déplu à ces leaders afro-américains. Ils ont joué la carte nationaliste-raciale contre Sanders en prétendant que Clinton était plus ouvert aux questions touchant les Afro-Américains. Cela n’a pas toujours marché comme dans le Michigan où la ville de Détroit, peuplée à 80% par des Afro-Américains, a voté pour Sanders qui dénonçait le monopole du pouvoir par le 1% et les corporations comme General Motors qui ont longtemps dominé la ville avant de transporter leurs usines vers le Mexique.
À New York, la communauté afro-américaine s’est divisée, certains suivant Sharpton du côté de Clinton. Il faut dire que les Clinton, Bill comme Hillary, sont bien implantés dans la grosse pomme. Le bureau personnel de Bill est même localisé à Harlem, le grand quartier afro-américain. Par ailleurs, les jeunes, ce qu’on appelle parfois la génération Hip-Hop, sont beaucoup moins attirés par Clinton.
Il se peut également que l’apparente indifférence de Sanders face aux problèmes raciaux n’a pas aidé sa cause. Des intellectuels afro-américains comme le professeur Cornel West, le cinéaste Spike Lee et quelques autres se sont identifiés à Sanders. Mais il s’agit d’une minorité.
En réalité, le problème de Sanders est un peu le même que le problème de la gauche dans son ensemble aux États-Unis. Les revendications des Afro-américains pour l’égalité ont été appuyées par la gauche, mais on ne peut pas dire que la gauche s’est enracinée dans ces communautés ni qu’elle a fait de la question raciale un des axes principaux de sa lutte. C’est une problématique qui affectait les organisations socialistes et communistes dans les années d’avant-garde. Même le mouvement syndical, en dépit du fait qu’une partie importante des travailleurs sont afro-américains, n’a pas combattu de manière résolue l’oppression raciale. Et donc aujourd’hui, le clivage reste là, au profit de Clinton, et au détriment de Sanders.