Édition du 19 novembre 2024

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Logement

Payer un loyer quand on est à l'aide sociale : une mission de plus en plus impossible (RCLALQ)

MONTRÉAL, le 22 avril 2016 - À l’approche de la Journée des locataires, le 24 avril prochain, les groupes de défense du droit au logement s’associent à ceux travaillant auprès des personnes assistées sociales pour exiger du ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MTESS), François Blais, qu’il renoncer à pénaliser les prestataires qui partagent un logement.

Depuis le 1er juillet 2015, conformément à une modification apportée à l’aide sociale, le MTESS considère que les prestataires qui ont deux colocataires ou plus qui ne sont pas inscrits au bail touchent un revenu de location de chambres, et ce, quel que soit l’arrangement financier des colocataires, même si, par exemple, les 3 personnes paient chacune un tiers du loyer, ou même si les autres occupants sont logés gratuitement.

Sur le terrain, les effets des modifications récentes aux règlements sont dramatiques pour plusieurs prestataires. C’est le cas de Rosario Tapia alors que, considérant qu’elle tire un revenu de la « location » de chambres à ses deux enfants majeurs, le ministère a coupé son chèque de 125$ par mois, sur une prestation de 747$. Mme Tapia est atterrée par cette décision : « Mes enfants sont étudiants et travaillent à temps partiel. Ils sont endettés et ne peuvent contribuer au loyer. Avec un loyer à 605 $, j’avais déjà un budget très serré, comment ma famille va-t-elle survivre avec cette nouvelle coupure ? » C’est aussi le cas de Mario Paquet qui vit en colocation dans le Témiscouata, après plusieurs années dans la rue à Montréal. « Nous sommes quatre personnes qui partageons un logement avec un bail signé par seulement deux d’entre nous. Pour le ministère, nous nous retrouvons avec un chambreur de plus que ce qui est permis, entraînant une coupure de 125 $ pour les signataires du bail. Pourquoi pénalise-t-on l’entraide ? »

Isabelle Monast-Landriault du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) s’insurge : « Si beaucoup de personnes prestataires doivent recourir à la colocation, c’est que le coût des loyers a augmenté dramatiquement, sans que la prestation mensuelle d’aide sociale, aujourd’hui de seulement 623$, suive cette augmentation ! »

Émilie E. Joly du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) renchérit : « Et c’est sans parler du fait qu’on doive attendre des années avant d’obtenir un logement subventionné ! Alors que Québec vient de réduire de moitié ses investissements en logement social, il faut s’attendre à de plus en plus de locataires en difficulté. »

« Le MTESS pénalise des personnes qui tentent simplement de s’en sortir en partageant le coût de leur loyer. Il rend les prestataires dépendants de la bonne volonté de leur propriétaire », explique Nathalie Rech de la Coalition de l’accessibilité aux services des centres locaux d’emploi. Le changement de 3 à 2 chambres louées signifie qu’un plus grand nombre de ménages est maintenant concerné. Le MTESS a aussi modifié le montant déduit des prestations d’aide sociale pour le porter à 125$ par chambre, à partir de la 2e chambre.

Ce règlement est en contradiction avec un jugement du Tribunal administratif du Québec (TAQ) d’avril 2015 qui s’oppose à la définition du MTESS selon laquelle « pour avoir le statut de colocataire, il faut être signataire du bail » et que « quand les gens vivent ensemble, en communauté d’entraide » et partagent les coûts du logement, « ce n’est pas le comportement d’un locateur ou d’un gestionnaire de maison de chambres ».

Les groupes logement et d’aide sociale qui s’unissent pour demander au gouvernement de retirer cette disposition s’opposent également au projet de loi 70 présentement à l’étude qui constitue un recul supplémentaire pour les personnes assistées sociales.

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