Dans sa lettre envoyée deux heures avant l’échéance, le président catalan demandait à nouveau d’entreprendre des discussions avec le gouvernement de Madrid. La première ministre du gouvernement de Madrid Soraya Saenz de Santamaria a affirmé que sa demande n’était pas crédible et que le parlement national d’Espagne est la seule place pour discuter. Mariano Rajoy lui donne jusqu’à jeudi pour se conformer.
Pendant ce temps le gouvernement de Mariano Rajoy augmente la pression politique et économique en même temps que la répression. Il a abaissé les prévisions de croissance économique pour l’année 2018 de 2,6 à 2,3% et a prévu un déficit plus élevé de 0,1% faisant porter le blâme sur la situation politique incertaine en Catalogne.
Durant la même journée Jordi Cuixart, président de l’organisation nationaliste catalane Omnium Cultural et Jordi Sanchez, président d’une autre organisation nationaliste l’Assemblée Nationale Catalane ont été arrêtés et devront subir un procès pour sédition, considérant le rôle qu’ils ont joué dans l’organisation des manifestations pro-sécession à Barcelone. Plus tôt dans la journée un juge du tribunal espagnol a libéré le chef de la police régionale catalane et son adjoint qui étaient également accusés, mais sous condition de remettre leur passeport et de se rapporter au tribunal aux deux semaines. Le juge a averti que les conditions pouvaient changer si les intimés ne respectaient pas les conditions. On se rappelle que les Mossos d’Esquadra (Police régionale catalane) avait été accusée de mollesse et de ne pas avoir respecté les ordres.
L’étau se resserre
Rajoy se dirige vers une prise en main de la Catalogne au moyen de l’article 115 de la constitution ou vers un assujettissement de la direction catalane représentée par Puigdemont. À ce jeux la stratégie du président de la Catalogne, celle qui joue à la négociation tout en laissant la population sans stratégie et sans plan de mobilisation ne fait que laisser toute latitude au gouvernement de Madrid pour mettre en place son plan d’intervention, qui ne peut être que répressif. La leçon donnée au chef de la police régionale catalane est un signe avant-coureur. Rajoy a déjà prévu de leur retirer l’autorité le cas échéant.
Mais la population catalane résiste, aujourd’hui elle a manifesté bruyamment contre l’arrestation des dirigeants des mouvements nationalistes au moyen des casseroles à Barcelone et dans plusieurs autres villes de Catalogne. Des pompiers ont contribué en faisant résonner les sirènes des camions dans les casernes. Une manifestation est organisée pour mardi le 17 devant les bâtiments du gouvernement espagnol dans les quatre provinces de Catalogne : Barcelone, Lleida, Girona et Tarragona et l’annonce d’une grève générale de quelques heures a été lancée par Omnium Cultural.
Solidarité internationale
L’Union européenne a condamné la Catalogne pour avoir tenu un référendum illégal et s’est donc rangée derrière Rajoy. La gauche catalane sait très bien qu’elle doit élargir la solidarité. La gauche, surtout européenne, ne doit pas laisser la Catalogne isolée comme ce fut le cas pour le peuple grec il y a deux ans.
À l’initiative de plusieurs militantes et militants de différents mouvements sociaux et politiques un appel a été lancé pour la formation de mouvements de solidarité partout dans le monde. Voici un extrait de l’appel :
« Le 1er octobre, alors que des millions de Catalans étaient en train de voter sur leur autodétermination, le gouvernement espagnol nous a brutalement attaqués en envoyant des milliers de policiers paramilitaires conte nous. La violence utilisée contre le peuple et, en contraste, la détermination démocratique de centaines de milliers de personnes qui ont défendu pacifiquement leurs bureaux de vote, illustre parfaitement ce conflit.
Lors du référendum sur l’autodétermination du 1er octobre, plus de deux millions de personnes ont voté pour une république catalane indépendante, plus de 90% des personnes votantes. Le taux de participation était plus élevé que lors des consultations sur l’actuel statut d’autonomie et sur la constitution européenne, et personne n’a remis en question la validité de ces référendums. Le taux de participation est même plus impressionnant si on tient compte de la répression. Sur les 2300 bureaux de vote, quelques 400 ont été fermés par la police ou par des interventions administratives, ce qui a affecté quelques 770 000 personnes enregistrées dont le droit de vote a été affecté.
Durant les dernières semaines et les derniers mois, plusieurs personnes ont fait l’objet d’enquêtes judiciaires, ont été poursuivies en cour ou même arrêtées à cause de leurs idées ; la police paramilitaire espagnole a effectué des descentes dans des bureaux du gouvernement catalan ainsi que dans plusieurs locaux des médias ; ils ont fermé quelques 150 sites web… L’état d’urgence actuellement imposé à la Catalogne ramène à notre mémoire plusieurs souvenirs de la dictature de Franco. `
Nous ne pourrons y arriver avec la suppression des droits démocratiques - et probablement sociaux – qu’impliquerait une victoire de la répression.
L’État espagnol ne veut pas nous entendre, pas plus qu’il n’a voulu le faire durant toutes ces années, et pour l’instant les autres États l’appuient. Il est clair que sans une forte pression de la part de leurs propres citoyens et citoyennes, ils ne seront pas plus à l’écoute de nos revendications démocratiques.
Pour cette raison, la société civile mondiale doit dénoncer la répression et appuyer le droit de décider du peuple catalan.
Nous appelons toutes les différentes organisations et toutes les personnes à agir, à créer des mouvements de solidarité avec les droits démocratiques de la Catalogne et contre la répression. La lutte du peuple catalan démontre que notre force réside dans la participation populaire. »
En Écosse un mouvement a déjà été mis sur pied et une page web est en ligne. https://catalandefence.org/
Au Québec
Plusieurs manifestations ont déjà eu lieu et plusieurs représentants et représentantes de mouvements sociaux et de formations politiques dont Manon Massé et moi-même sont allés exprimer notre solidarité en Catalogne. Nous devons maintenant aller plus loin et coordonner nos actions au niveau international en soutien avec le peuple catalan. Québec solidaire y travaille et sera de la partie.
(1) Manifestation contre l’arrestation des dirigeants nationalistes catalans. La photo a été prise lundi le 16 octobre à Girona, une petite ville de 90 000 habitants
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