Hebdo L’Anticapitaliste - 616 (19/05/2022)
Par Julien Salingue
Fusil d’assaut (sur lequel le mot « nègre » était peint en blanc), gilet pare-balles, tenue militaire, casque : rien ne manquait dans l’accoutrement du tueur, qui s’était en outre équipé d’une caméra pour diffuser la tuerie en direct sur la plateforme Twitch.
Si la libre circulation des armes aux États-Unis a été immédiatement mise en cause, c’est la dimension raciste de l’attentat qui s’est rapidement imposée. Comme Brenton Tarrant, qui avait tué 51 personnes dans deux mosquées de Christchurch (Nouvelle-Zélande) le 15 mars 2019, Payton Gendron n’a en effet pas fait mystère des motivations politiques de ses actes. Il a d’ailleurs publié lui aussi un manifeste, reprenant des éléments de celui de Tarrant. Racisme, islamophobie et antisémitisme imprègnent la logorrhée suprémaciste de Payton Gendron, qui se pose comme un militant « anti-remplaciste » : « C’est un remplacement ethnique. C’est un remplacement culturel. C’est un remplacement racial. C’est le génocide blanc ».
Payton Gendron a donc commis un acte terroriste meurtrier au nom de la lutte contre le « grand remplacement », ce néfaste fantasme complotiste de l’extrême droite identitaire selon lequel un processus de substitution des populations blanches serait à l’œuvre dans les pays occidentaux, progressivement remplacées par des populations « arabo-musulmanes ». Fantasme qui, on le sait malheureusement, n’est plus cantonné aux forums de la fachosphère et aux réunions confidentielles des groupuscules néonazis, mais a désormais pignon sur rue, avec les invitations faites à l’idéologue Renaud Camus et, plus encore, la candidature d’Éric Zemmour et la banalisation de ses thèses identitaires-racistes.
Il existe un continuum raciste et islamophobe au bout duquel on trouve des assassins comme Payton Gendron. Pour le dire simplement : les idées mortifères des Trump et Zemmour tuent. C’est l’une des leçons de l’attentat de Buffalo, n’en déplaisent à ceux qui voudraient l’attribuer à la « folie » de Payton Gendron. Et ce n’est malheureusement pas la première fois que de tels passages à l’acte se produisent, soulignant l’urgence de lutter sans aucune forme de compromis contre les extrêmes droites. Antifascistes, parce qu’il le faut, et tant qu’il le faudra.
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