Voilà ! C’est fait ! Dans le Devoir du 21 septembre 2017, nous apprenons que « le gouvernement a publié mercredi quatre projets de règlements dans la Gazette officielle, dans la foulée de l’adoption de la première Loi sur les hydrocarbures (adoptée sous le bâillon) de l’histoire de la province. »[1] Malgré de beaux discours au sujet de la réduction des GES pour se conformer aux accords de Paris, le gouvernement était déterminé à implanter une industrie gazière dans les basses terres du Saint-Laurent. Malgré des retards dus à l’obstination de citoyens et citoyennes qui veulent boire une eau libre d’hydrocarbures, Messieurs Couillard, Arcand et Heurtel peuvent dire à l’Association pétrolière et gazière du Québec(APGQ) que la voie est libre pour une exploitation intensive des hydrocarbures dès que les prix du gaz deviendront intéressants.
Pour les lacs et les rivières, ces projets de règlements sont plus permissifs que le Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (RPEP). Désormais, les gazières pourront forer dans des lacs et des rivières (sauf le fleuve Saint-Laurent). Le laxisme de ces normes super favorables au lobby pétrolier est en train de provoquer une levée de boucliers chez toutes les personnes qui ont un minimum de respect pour la qualité de l’environnement.[2] Les municipalités sont responsables de la qualité de l’eau destinée à leurs contribuables et près de 300 d’entre elles exigent une dérogation pour améliorer les distances séparatrices inadéquates du RPEP. Elles vont dire quoi lorsque qu’il y aura un forage dans un plan d’eau situé en amont de leur prise d’eau ?[3] Même un déversement mineur peut être grave pour les prises d’eau municipales. Souvenons-nous des inconvénients que quelque 2000 litres de diesel ont causés aux 300 000 citoyens et citoyennes de Longueuil en janvier 2015. [4]
Sur terre, un forage devra respecter une distance minimale de 175 mètres entre la tête du puits et « une concentration d’activités résidentielles... ». Quant aux établissements de santé, aux écoles et aux CPE, la distance serait de 275 mètres. Évidemment, les auteurs de ces normes croient que les bruits des camions, des moteurs et de la tour de forage ne dérangeraient pas les patients et patientes ni les enfants. Pour voir ce que cela pourrait impliquer, je vous invite à regarder l’émission « The Nature of Things » de la CBC.[5] Entre autres choses, vous pourrez voir une photo saisissante du terrain de jeu, d’un autobus scolaire, du site gazier et des habitations en arrière-plan de Saint-Louis-de-Richelieu.
Pour connaître ce que ce projet de norme bureaucratique implique, je cède la parole à (feue) Mme Odette Larin. Voici un extrait de son témoignage lors de la manifestation « pour le moratoire d’une génération » du 18 juin 2011.
« ...Je connais bien toutes les nuisances causées par le forage d’un puits de gaz de schiste, car nous en avons un à 100 mètres de notre résidence. Depuis 2007, la gazière Gastem et sa partenaire Forest Oil ont foré à 3 reprises derrière chez-nous. Elles ont tous les droits, nous n’avons rien à dire. À l’automne 2008, nous avons vécu une fracturation hydraulique et les travaux qui y sont reliés pendant 93 jours, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Nous avons subi la poussière, l’éclairage intense nuit après nuit, le bruit des tuyaux qui se frappent les uns sur les autres, le bruit des génératrices jour et nuit, le bruit assourdissant d’une quinzaine de pompes alimentées par d’immenses moteurs diesel, les sifflements et la lumière générés par la torchère, le smog qui brûle la gorge et les yeux, qui donne des palpitations et qui gruge l’énergie, la circulation de véhicules lourds sur notre rue résidentielle, deux explosions en pleine nuit qui ont fait trembler les fenêtres et les murs de notre maison, nous avons vécu l’insomnie, le désespoir et la révolte...
Quant aux cimetières, la distance séparatrice serait de seulement 100 mètres. Nous sommes heureux de constater que Messieurs Arcand et Heurtel sont persuadés que les « habitants » des cimetières ont moins besoin de quiétude que les personnes habitant dans des secteurs résidentiels et des enfants dans les CPE !!!
Comme ce projet de normes permettra éventuellement à des milliers de citoyens et citoyennes de connaître dans leurs entrailles ce que Mme Larin a vécu en 2007-2008, je propose que ces normes soient officiellement connues sous le vocable « Les normes de Mme Larin ».
Gérard Montpetit
Membre du Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l’environnement maskoutain
Le 23 septembre 2017
5] http://www.cbc.ca/player/play/2332794041, CBC, The Nature of Things, émission du 7 février 2013.
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