La jeunesse…
Comment ne pas être fier de cette jeunesse !
Les étudiants ont de plus en plus toute mon admiration !
Avons-nous été jeunes ?
Étions-nous comme eux ?
Beaux, articulés, avec une tête bien en place ?
Probablement que oui même si parfois, lorsqu’on se regarde dans le miroir de l’actualité, on se le demande !
Les époques…
Je crois qu’on ne peut pas vraiment comparer les époques, comparer les jeunesses.
Nous étions sûrement bien semblables, mais notre temps était assez différent.
Nous mettions des fleurs dans les fusils et les canons.
Nos médias nous avaient montré l’horreur de la guerre du Vietnam.
Nous avions marché pour la Paix, nos (sic) soldats étaient rentrés.
Nous étions le « Flower Power », nous étions la Paix et l’Amour. Nous avions de la fumée et plus que de l’espoir plein les yeux.
La révolution de nos vieux était tranquille, nos cheveux étaient longs et nous sentions bon l’herbe.
Nous vivions dans un Pays qui se faisait. Un Pays qui semblait naître quoi que l’on fasse.
Aujourd’hui, nos jeunes vivent dans un Pays qui semble bien trop souvent se défaire (je ne parle malheureusement pas du Canada).
Nous étions un peu plus allumés (à s’en allumer) et un peu moins "branchés". On se rencontrait sur le pouce et non sur Facebook. On baisait !
Les époques…
L’espoir, le système, la « contre »-culture…
On étudiait pour savoir sans vouloir produire.
On étudiait par amour de connaître sans vouloir rentabiliser notre connaissance.
C’était une autre époque !
Il y avait bien sûr le "système", cette maudite machine.
« La maudite machine qui t’a avalé, a marche en câline, faudrait la casser… »
Nous étions d’Octobre, de la crise à la chanson.
Nous étions d’automne, et non de printemps.
Un bel automne, comme si l’automne ne précédait pas l’hiver, comme un automne éternel où les magnifiques feuilles colorées ne tomberaient jamais.
Nous étions d’Harmonium et de Séguin, de Louar Yaugud, de Doors, et de Pink Floyd, nous n’avions pas besoin d’espoir, nous vivions déjà dans un monde meilleur qui ne pouvait irréversiblement que s’améliorer.
Nous bossions un peu, nous vivions de peu, il nous en fallait peu.
Nous vivions en commune, on mangeait nos tomates et nos patates en fumant notre pot qui poussait dans le bosquet et entre les rangs.
Nous avions nos chicanes de commune.
Parfois la fumée se dissipait et les réalités sociales nous montraient que tout n’était pas nécessairement "amour".
Il y avait de l’emploi, nous avions des industries de textiles, si elles fermaient nous devenions Tricofil.
Nous avions des industries de toutes sortes, il y avait un peu de cochonneries « Made in Japan », mais pour l’ensemble c’était « j’achète du Québec d’abord ».
Acheter du Québec, ce n’était pas seulement pour les légumes et les produits "bio". Il n’y avait pas de "bio" nous avions les deux pieds dans le fumier et Monsanto s’occupait à produire du gaz moutarde sans trop obliger à utiliser ses graines.
On peut difficilement comparer notre époque des Golden Sixties à leur époque de Ipad et de Facebook. Grolier n’a rien à voir avec Google.
Nous avions la même énergie, mais une conscience différente reliée à une époque différente.
On chantait avec rage :
« Quand il faut dormir dans les fonds d’ruelles, ça peut pas être pire, rien dans l’fond d’l’écuelle. Peux-tu t’en sortir ?
Si tous les pognés dans leur p’tite misère se disaient : "Calvaire ! Y est temps d’arrêter" ça irait p’t`être mieux ! »
On se disait aussi :
« Un coup d’pied dans l’cul, ça peut réveiller quand personne sait pus pourquoi travailler !
Dépêche-toé bonhomme, sors vite de ta crasse, prouve donc que t’es un homme pis trouve-toi une place… »
On peut dire que nos étudiants d’aujourd’hui au lieu de chanter, mettent en pratique la chanson.
« Dépêche-toé bonhomme, sors vite de ta crasse »
C’est ce qu’ils font.
« Prouve donc que t’es un homme (et une femme) »
C’est ce qu’ils et elles font. Ils et elles nous le prouvent depuis 3 mois de lutte héroïque !
Nos jeunes savent très bien que lorsqu’il faut dormir dans les fonds d’ruelles, ça peut pas être pire !
Oui, on nous dit périodiquement que le fossé se creuse de plus en plus entre les indécemment bien nantis, ceux-là qui concentrent la richesse et ceux qui dorment dans les fonds d’ruelles.
Notre gouvernement au service des riches a comme unique solution (sic) d’offrir aux étudiants l’endettement comme le FMI l’offre depuis des années aux Pays pauvres. L’endettement, ce boulet qui les empêche de s’affranchir de ceux qui contrôlent l’outil économique.
L’endettement que l’on veut imposer aux étudiants est une sorte d’assurance esclavage pour offrir de la main-d’œuvre prête à tous les petits salaires pour espérer payer leur dette. Cette dette que l’on peut faire croître comme on veut en utilisant les intérêts.
Le parallèle entre l’endettement chronique des Pays pleins de richesses et dits en développement éternel vu que l’on exploite honteusement leurs ressources naturelles, et l’endettement étudiant n’est pas inapproprié.
Les chaines de l’endettement sont aussi contraignantes tant pour les États que pour les individus. Les seuls gagnants sont les banques qui tiennent les esclaves à la gorge. On peut vous affamer si vous résistez à laisser aller vos richesses ou si vous refusez le travail indigne et sous-payé.
À notre belle époque, on nous parlait de la société des loisirs, les machines travailleraient en bonne partie pour nous…
Un peu plus tard on nous a parlé de la liberté 55 !
Force est de constater que les merveilles de la technologie n’ont pas du tout été mises au service de l’Être Humain, mais plutôt au service du profit.
Produire plus au moindre coût.
Réduire le salaire des humains à celui des machines. Ou encore, utiliser les populations affamées pour réussir à produire sous les coûts des machines.
Nos étudiants sont confrontés à ce monde de cupidité. Ce monde où la guerre est devenue « humanitaire ». Ce monde où la démocratie est « gueule toujours », ce n’est pas toi qui décides.
Les étudiants ont une cause juste.
Elle va bien au-delà des frais de scolarité.
Cette cause met en lumière nos priorités de société.
Le savoir doit-il être réservé à ceux qui peuvent se le payer, ou tous ont-ils le droit de l’acquérir comme un besoin tout aussi vital que l’eau et le soleil ?
Avons-nous les moyens d’offrir la connaissance gratuitement ?
Oui, absolument. (L’indécence des chiffres le prouve éloquemment.)
C’est ici que la lutte idéologique prend tout son sens.
Bravo à nos étudiants COURAGEUX et lucides.
Je crois que toute la société doit vous remercier pour l’énergie que vous déployez et les sacrifices que vous vous imposez.
Courage ! Ensemble vous vaincrez !
Ensemble nous vaincrons !
Portons le carré rouge et manifestons à leur côté.
Serge Charbonneau
Québec