Édition du 17 décembre 2024

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Fiscalité

Réponse de l’IRIS aux porte-paroles de la droite

Les cerises, la médiane, la moyenne et une erreur

Nous avons reçu beaucoup de réactions à notre note d’hier. Il semble y avoir une certaine confusion quant à la méthode employée. Nous voulons y réagir tout de suite, pour éviter que le débat se fasse sur des choses qui n’existent pas. Nous nous concentrerons sur deux questions : ce que certaines personnes qualifient de cherry picking et le doute soulevé par plusieurs comme quoi nos données ne couvriraient pas une part suffisamment grande de la population. De plus, une erreur s’est glissée dans un graphique ; bien qu’elle ne change pas la tendance observée et renforce en fait nos conclusions, nous tenions à la signaler.

Tiré du site de l’IRIS.

Le temps des cerises… bien choisies

L’expression cherry picking en anglais désigne l’action de choisir des cas individuels qui confortent nos données plutôt que de montrer l’ensemble de la situation. Certaines personnes semblent croire que c’est ce que nous avons fait dans la première partie de notre étude.

Rappelons que dans cette partie nous avons repris la méthodologie que l’OCDE utilise pour comparer les différents taux d’imposition. Cette méthode nous impose à la fois des ménages types et des données (comment calculer le salaire, les impôts, les déductions, les cotisations, etc.). Comme on peut le constater après une rapide vérification, nous avons publié dans notre note socio-économique non pas des cas bien choisis qui conforteraient nos données, mais bien l’ensemble des ménages-types rendus disponibles par l’OCDE. Dans certains cas l’impôt est plus bas au Québec, parfois il est plus bas ailleurs.

Tout ce que nous avons fait, c’est de reproduire cette méthode pour le Québec et l’inclure dans le calcul. Il est un peu exagéré de reprocher à l’IRIS les choix méthodologiques fait par l’OCDE : tant sur la quantité de ménages-types que sur les aspects inclus dans la fiscalité.

Salaire moyen et revenu médian

Parmi les données que l’OCDE nous oblige à utiliser, il y a le salaire moyen. C’est-à-dire qu’au lieu de prendre le revenu moyen (qui comprend des gens qui ne font pas de revenus), l’OCDE utilise, en gros, la moyenne des salaires de ceux et celles qui en reçoivent. Pour fin de comparaison avec les autres pays de l’OCDE, nous avons suivi cette procédure. Dans ce cas la moyenne est pertinente, car elle est un outil de comparaison entre différents cas et non une tentative de savoir quelle part de la population a un taux d’imposition de quel niveau.

Cependant, pour se donner une idée de quelle portion de la population il est question (car c’est ce qui est toujours difficile d’évaluer avec des ménages-types précis) nous avons comparé ces montants à la médiane des revenus des ménages comparables. La médiane est une mesure de tendance centrale différente de la moyenne, elle est la donnée au centre de la population étudiée, c’est donc dire que 50% des gens font un revenu moins élevé que la médiane et 50% des gens font un revenu plus élevé que la médiane.

Donc, comparer nos ménages-types à la médiane nous permet d’avoir une idée de quelle part de la population fait des revenus équivalents ou inférieurs à nos exemples. Le tableau 1 résume cette comparaison.

Tableau 1 : Revenu médian des ménages et revenu de ménages-types utilisés

Source : Institut de la statistique du Québec.

Ce que nous constatons c’est que le revenu médian au Québec arrive soit au même niveau que les exemples que nous avons utilisé ou bien largement en-deçà des exemples utilisés (qui représentent la presque totalité des ménages totaux selon Statistique Canada). Donc, au moins 50% de ces types de ménages ont des revenus égaux ou inférieurs aux ménages étudiés. Or, tous ces ménages étudiés ont des taux d’imposition plus bas que le Canada ou les États-Unis. Une exception, les couples sans enfants dont la charge fiscale nette est légèrement supérieure (1,25%) à celle des Etats-Unis. Or, dans leur cas, la médiane est à 13 000$ plus basse que le salaire moyen utilisé dans notre ménage type, nous pouvons sérieusement envisager qu’une bonne part des ménages au revenu médian et sous le revenu médian aura un taux d’imposition plus bas que celui du ménage étudié (au Québec, si on ramène leur salaire au salaire médian, leur taux d’imposition diminue de 5%, mais il nous est impossible de dire ce qu’il en est au Canada et aux Etats-Unis).

Comme le niveau d’imposition tend à baisser en fonction du revenu et comme le Québec impose moins les bas revenus (comme le montre la comparaison des graphiques 3, 6 et 7 de notre note avec les autres graphiques), cette moitié des ménages a des taux d’imposition soit similaires, soit inférieurs à ceux de nos voisins immédiats. Comment alors peut-on affirmer que les Québécois-es sont les plus imposés en Amérique du Nord si une majorité sont soit au même niveau d’imposition, soit à un niveau plus bas ?

Autre erreur beaucoup entendue sur les ondes : cela ne veut pas dire que 50% des contribuables sont plus imposés qu’aux Etats-Unis et au Canada. Il est évident que certains le sont et que d’autres non, mais il est impossible d’en situer les proportions.

Erratum

Il y avait néanmoins une erreur qui s’est glissée dans cette publication, une dont personne n’a parlé, car ce n’est pas une donnée qui a été beaucoup discutée. Le graphique 15 comporte une erreur qui vient fausser ses données. Cependant, la tendance de l’impôt dans le PIB qu’il représentait ne change pas, seule les proportions changent et amplifient l’écart entre 1991 et 2010, ce qui vient donc renforcer nos conclusions. Voici le nouveau tableau, la note a été mise à jour en conséquence.

Graphique 15 : Impôts sur le revenu, les bénéfices et les gains en capital fédéraux et provinciaux dans le PIB (1991-2010)

Sources : Statistique Canada, CANSIM, Tableaux 385-0032 et 384-0002, calcul des auteurs.

Un grand merci à Mario Jodoin (expert en graphiques) pour nous avoir signalé cette erreur.

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