Hebdo L’Anticapitaliste - 687 (14/12/2023)
Par Dan La Botz
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Wikimedia commons
Le président vénézuélien Nicolás Maduro revendique la région d’Essequibo, voisine du territoire vénézuelien et a organisé un référendum à l’appui de cette revendication. Maduro a ensuite produit une nouvelle carte vénézuélienne qui inclut l’Essequibo. Un accord conclu en 1996 entre les deux pays donne à la Cour internationale de justice des Nations unies le pouvoir de résoudre ces différends, mais Maduro a rejeté sa participation. Tout cela est perçu comme un prélude à une action militaire visant à s’emparer de la province et de ses richesses pétrolières.
Le président du Guyana, Irfaan Ali, a déclaré : « L’Essequibo est à nous, chaque centimètre carré », et a envoyé des troupes pour renforcer la frontière du pays avec le Venezuela. Le Brésil, voisin des deux pays, a également envoyé des forces armées dans la région. Le président brésilien Luiz Inacio « Lula » da Silva s’est dit préoccupé par la situation : « Nous allons la traiter avec beaucoup de prudence, car ce que nous ne voulons pas ici en Amérique du Sud, c’est la guerre ».
Le Venezuela, un pays en crise
Pourquoi Maduro revendique-t-il l’Essequibo en ce moment ? Maduro, un quasi-dictateur, sera confronté à une élection en 2024 et il n’est pas certain qu’il puisse remporter un scrutin libre et équitable. Le pays est en proie à une crise économique, entravé par les sanctions américaines et confronté à une émigration massive. Le Venezuela, qui comptait 30 millions d’habitants en 2015, a vu 7,7 millions de ses habitants émigrer, principalement vers d’autres pays d’Amérique du Sud, bien que près d’un quart de million d’entre eux aient migré vers les États-Unis.
Lors des précédentes élections de 2018, Maduro n’a remporté le scrutin qu’après que la plupart des partis et candidats de l’opposition ont été déclarés inéligibles, dans le cadre d’un processus entaché d’irrégularités, et alors que relativement peu d’électeurs se sont rendus aux urnes. En 2019, l’opposant conservateur Juan Guidó s’est proclamé président par intérim et a été reconnu par plus de 60 pays, dont les États-Unis, plongeant le pays dans une crise qui a duré des années, bien que Guidó n’ait pas réussi à prendre le pouvoir.
Par ailleurs, d’importants gisements de pétrole ont été découverts en 2015 dans l’Essequibo. Revendiquer l’Essequibo permet à Maduro de faire miroiter une amélioration de la situation économique et il peut se draper dans le drapeau. En cas de guerre, il pourrait déclarer une urgence nationale et reporter les élections. Mais il pourrait se retrouver en guerre non seulement avec le Guyana, mais peut-être aussi avec les États-Unis.
La politique étrangère des États-Unis et les lobbys du pétrole
Le commandement sud des États-Unis, qui supervise l’Amérique centrale, l’Amérique du Sud et les Caraïbes, mène déjà des opérations aériennes conjointes avec les forces de défense du Guyana. Le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est entretenu avec le président Ali pour réaffirmer le soutien de Washington « à la souveraineté du Guyana et à notre solide coopération en matière de sécurité et d’économie ». M. Maduro a critiqué le Guyana pour avoir impliqué les États-Unis.
Depuis l’élection du gouvernement de gauche du président Hugo Chávez en 1999, les États-Unis sont un adversaire du Venezuela. En 2006, le président George W. Bush a imposé des sanctions au Venezuela pour son manque de coopération dans la lutte contre le terrorisme et la drogue. Le président Barack Obama a imposé de nouvelles sanctions en 2014 en raison des violations des droits humains au Venezuela. L’administration de Donald Trump a élargi les sanctions, bien que le président Joseph Biden les ait ensuite modérées, autorisant la vente de pétrole. Avec la reconnaissance de Guidó en tant que président par intérim, les USA ont tenté de renverser Maduro.
Déjà impliquée dans le soutien à l’Ukraine et à Israël, l’administration Biden souhaiterait sans doute éviter une nouvelle guerre. Mais des compagnies pétrolières américaines et étrangères, telles qu’Esso Exploration & Production Guyana, un descendant d’ExxonMobil et de Standard Oil, ont déjà des activités dans l’Essequibo. Les compagnies pétrolières ont toujours joué un rôle important dans la politique étrangère des États-Unis.
La guerre ? Pas encore. Mais nous serons attentifs et prêts à nous opposer à l’implication des États-Unis.
Traduction Henri Wilno
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