Au premier ministre Jean Charest
Le premier ministre Jean Charest a mentionné à plusieurs reprises que le Québec irait chercher sa juste part des retombées pour le Plan Nord et que les redevances minières du Québec sont compétitives. Lors du dernier budget, le ministre des Finances, Raymond Bachand a même augmenté les droits miniers (redevances) de 12 à 16%.
Le vérificateur général du Québec, Renauld Lachance, écrivait dans son rapport en 2009, que les compagnies minières auraient extrait, dans la période de 2002 et 2008, plus que 17 milliards $ en ressources minérales, et ces compagnies auraient payé seulement 259 millions $ en redevances, soit un montant équivalent de 1,5% de la valeur brute. Le vérificateur a aussi constaté que pendant le même période, 14 entreprises minières n’avaient versé aucune redevance à l’état québécois, alors que le Québec a même versé plus de 624 millions $ en aide fiscale. Le régime en vigueur des droits miniers (redevances) met à la disposition diverses déductions permettant d’abaisser le taux de redevances.
Plusieurs compagnies minières ont récemment annoncé des investissements permettant d’augmenter leur production pour pouvoir prendre avantage des prix élevés des matières premières. Par exemple, Cliffs Resources investira 650 millions $ d’ici 2012 à la mine du lac Bloom, pour doubler sa production de 8 à 16 millions de tonnes de fer concentré. La compagnie prévoit que d’ici deux ans, la vente annuelle de la nouvelle production rapportera près de 2,8 milliards $, pendant que le coût de production devrait être moins que 800 millions $, soit un profit annuel de 2 milliards $.
Une valeur de 16 % d’un profit de 2 milliards $ est équivalent à 320 millions $. Le maigre montant estimé qui sera perçu pour les redevances de toutes les mines au Québec augmenteront de 327 millions $ à 570 millions $ durant les 5 prochaines années. Le ministre Bachand a déclaré au quotidien Le Soleil que sur les redevances perçues : « Comme peuple, on ne se fait pas fourrer. On va chercher notre juste part ». Malheureusement, le gouvernement Charest refuse catégoriquement de réformer la méthode de calcul des redevances pendant que les minières accumulent des milliards $ avec nos ressources minières non renouvelables.
Le gouvernement Charest sait comment faire saliver les minières avec le Plan Nord. Le plan prévoit investir 47 milliards $ pour différents projets électriques dans les prochains 25 ans. Le Plan Nord facilitera l’extraction de nos ressources minières par la construction et l’exploitation de centrales hydroélectriques particulièrement consacrées aux exigences énergétiques des différents projets industriels et miniers. Rien ne laisse présager que ces compagnies paieront le coût réel et dispendieux de cette électricité dans cette région nordique. À la fin utile des projets industriels et miniers, Hydro-Québec déterminera l’utilisation idéale de ces ressources électriques qui pourraient être jointes à notre réseau électrique à un certain coût additionnel.
Le développement minier et les infrastructures publiques principalement requises par les minières et projets industriels tels que les aéroports, port en eau profonde, routes, et infrastructures de télécommunications seront aussi aidés par un investissement de 33 milliards $. Selon moi, le gouvernement Charest devrait restreindre son élan de générosité à l’égard des minières. D’après Price Waterhouse Coopers, l’augmentation des prix des métaux aurait enrichi financièrement les minières dans le monde, à des niveaux records.
Le Québec possède en plus l’un des plus bas taux d’imposition des sociétés en Amérique du Nord, et ce, malgré que le Québec soit le plus endetté et que la population soit la plus taxée. Je crois que le niveau actuel perçu des redevances ainsi que le niveau d’investissement requis pour le Plan Nord ne compensent pas pour l’épuisement des ressources minières non renouvelables.
Mon opinion est que le Québec ne devrait pas aspirer à « privatiser les profits et socialiser les dépenses ». Bien qu’il soit admirable d’investir dans la création d’emplois payants pour les personnes possédant un diplôme d’études du secondaire V, il serait encore plus profitable entre autres d’investir dans la poursuite de leurs études.
M. Charest, veuillez remettre le Plan Nord dans un tiroir, jusqu’au jour où ce plan sera profitable aux Québécois et aux générations à venir. Je crois aussi qu’il serait sage, avant d’investir des milliards $ dans différents projets de construction du Plan Nord, d’écouter la population du Québec qui exige une commission d’enquête publique sur la construction et sur le financement des partis politiques.
Cette lettre d’opinion a été publiée sur Cyberpresse le 11 août 2011. L’auteur est de Sept-Îles.