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Je dois mentionner, au départ, que je ne suis pas très favorable à la construction d’un troisième lien à court terme entre Québec et Lévis. À mon point de vue plusieurs arguments militent en défaveur du projet : l’achalandage prévu n’est pas suffisant, le projet ne réglera pas vraiment les problèmes de congestion sur les ponts à l’ouest, entraînera de l’étalement urbain, augmentera un réseau d’autoroutes déjà sur-développé dans la région et sera un gouffre sur le plan financier. De plus, comme l’indique le dernier sondage de mai 2020 sur l’à-propos d’un tel projet, à peine 50% de la population est en faveur. J’observe toutefois que le gouvernement de la CAQ est très volontaire pour sa réalisation. Voyons, par conséquent, comment optimiser cet ouvrage.
Faisons d’abord un peu d’historique. Le gouvernement a au départ étudié un tracé dit à l’est, lequel comprenait un tunnel passant sous la pointe ouest de l’île d’Orléans avec certaines variantes associant un pont pour la traversée du chenal nord et un tunnel pour le chenal sud. Ensuite un nouveau projet de tunnel reliant les centre-villes de Lévis et de Québec a été présenté . Les deux projets comportaient de grandes difficultés, mais le gouvernement a finalement fait son nid avec la dernière option. Depuis son dépôt, il y a quelques jours, ce projet reliant les deux centre-villes soulève beaucoup de questions restant sans réponses, certaines contestations même et une indignation généralisée relativement à son coût pharaonique. Pour la CAQ, c’est devenu rapidement une véritable patate chaude.
Mentionnons que de toute façon un nouveau pont doit être construit à court terme pour relier l’Île d’Orléans à la rive nord. De même, il apparaît évident qu’une amélioration de la communication entre Québec et Lévis sera nécessaire à moyen terme. Pourquoi alors ne pas construire un pont entre la rive nord et l’Île et un tunnel pour relier l’Île à la rive sud ? Cette option a peut-être été écartée trop rapidement dans les études préliminaires d’alternatives. Celle-ci permettrait de profiter de l’un pour aider à construire l’autre.
Cette approche semble soutenue par plusieurs constatations. D’abord les matériaux extraits de l’excavation d’un éventuel tunnel traversant le chenal sud pourraient servir à la construction d’une jetée du futur pont traversant le chenal nord, ce qui optimiserait considérablement les travaux. En effet, la disposition de quantité considérable de mort terrain est un des principaux coûts de ce genre de projet. De plus, cette jetée réduirait de beaucoup la taille de l’ouvrage surélevée nécessaire pour traverser le chenal nord.
Une autre constatation est que la largeur de la traversée entre l’Île et la rive nord est minimum entre l’autoroute Félix Leclerc, au point le plus avancé dans le fleuve et l’extrémité ouest de l’Île. De plus, la longueur du tunnel pour la traversée du chenal sud serait d’environ 5 km comparée au 9 km pour le projet actuellement soutenu par le gouvernement. Aussi, la localisation du futur troisième lien à l’est est très stratégique car elle pourrait assurer un départ du centre-ville de Lévis, tout comme le projet de la CAQ et une arrivée à la jonction des autoroutes Dufferin-Montmorency et Félix Leclerc. Cette dernière localisation permettrait un accès facile et rapide au centre ville de Québec par l’autoroute des Battures et à sa partie nord par l’autoroute de ceinture. Finalement, sur la plan du transport en commun une connexion avec le terminus d’Estimauville du futur tramway serait relativement facile.
Mentionnons que les gens de l’Île d’Orléans ne subiraient pas de préjudice significatif car le tunnel pourrait s’enfoncer dans le sol dès son départ sur l’île afin de prendre de la profondeur pour la traversée du chenal sud. Évidemment, tout ces travaux devraient débuter assez rapidement car le pont de l’Ile actuel a besoin d’être remplacé au plus tôt. Cette nécessité ne semble toutefois pas un obstacle pour la CAQ qui a promis de lever la première pelletée de terre de ce projet avant la fin de son mandat.
Concernant la problématique de l’étalement urbain, celle-ci demeure entière quelque soit la localisation du projet.
À propos de la taille du projet, on peut se demander si six voies, telles que proposées dans le projet de la CAQ sont nécessaires. Y aurait-il vraiment lieu de prévoir des voies réservées pour autobus puisque aucune congestion n’est en vue pour plusieurs dizaines d’années sur ce tronçon ? Par conséquent, quatre voies seraient de toute évidence suffisantes.
Sur le plan des coûts, la construction d’un pont pour la traversée du chenal nord et d’un tunnel pour le sud apparaît très avantageuse. D’abord ça élimine l’équivalent de la double traversée du chenal nord. Ensuite ça réduit considérablement les coûts de transport de matériaux d’excavation et la taille du pont proprement dit. De plus, la longueur du tunnel est diminuée de presque la moitié et si on fait passer le projet de six à quatre voies, on peut imaginer une diminution globale du coût du projet de moitié au moins.
Donc, s’il faut vraiment construire un 3ième lien à court terme, ressuscitons une option à l’est d’un pont pour le chenal nord et un tunnel pour le sud puis optimisons le projet. Ainsi celui-ci deviendra réalisable tout en réduisant son coûts de moitié.
Pascal Grenier, bachelier en génie forestier
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