Édition du 19 novembre 2024

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Asie/Proche-Orient

La Corée du Sud vit une bataille épique entre le féminisme et une misogynie profondément ancrée

En septembre dernier, l’édition coréenne de Maxim, un magazine pour hommes, affichait en page couverture Byeong-ok, un acteur ayant joué dans le film-culte « Oldboy ». Il posait, cigarette à la main, à côté d’une voiture, dont émergeait du coffre une paire de jambes de femme, les chevilles ligotées. Le titre du reportage était « Le Vrai Méchant ».

tire de : 2016 - 51 *17 décembre : Notes de lecture, textes, liens.

Un groupe féministe en ligne récemment formé, Megalia, a immédiatement transmis cette couverture à plusieurs médias et organisations féministes partout dans le monde. Le tumulte résultant a obligé le bureau-chef de Maxim, aux États-Unis, à publier des excuses.

L’activisme en ligne de Megalia constituait une avancée audacieuse dans un pays où les femmes continuent d’être sujettes à la discrimination au foyer, au travail et dans la rue. Mais alors que de plus en plus de femmes s’opposent à des attitudes conservatrices profondément ancrées en Corée, elles rencontrent un violent mouvement de réaction. Les jeunes hommes coréens, qui ne jouissent plus de la sécurité économique et de leur position de pouvoir traditionnelle, se défoulent virtuellement et littéralement sur les femmes.

« La guerre sexiste est très violente en Corée, surtout chez la jeune génération », explique Katharine Moon, professeure de science politique au Wellesley College du Massachusetts. « Les hommes sentent qu’ils perdent pied, qu’ils n’arrivent pas à progresser dans un océan qui change autour d’eux. »

Un problème de nature économique

Comme d’autres changements sociaux ailleurs, la guerre sexiste qui se manifeste en Corée trouve ses racines dans l’économie. Quand le PIB coréen a connu une croissance rapide dans les années 1970 et 1980, beaucoup d’hommes avaient des emplois stables et bien rémunérés. Les femmes étaient appelées à demeurer au foyer et, avec des maris pourvus de bons emplois, elles pouvaient se permettre de le faire. Cela a facilité la survie du système patriarcal hoju, qui stipulait en loi que l’homme était le chef du ménage ; ce système n’a été aboli qu’en 2005.

À la fin des années 1990, la crise financière asiatique a bouleversé la stabilité de « l’homme salarié » coréen. Bon nombre d’hommes qui avaient perdu leur emploi se sont retrouvés en concurrence avec des femmes sur le marché du travail. « Beaucoup de stéréotypes négatifs sur les femmes, beaucoup d’expressions péjoratives très genrées ont fait leur apparition au début des années 2000 », dit James Turnbull, un résident de longue date à Busan, une ville du sud du pays, qui signe des textes sur les enjeux féministes.

Des passagères d’un wagon de métro lors du projet-pilote de wagons réservés aux femmes à Busan, en Corée du Sud, le 22 juin 2016, une innovation destinée à protéger les femmes contre les agressions masculines.

Aujourd’hui, l’économie coréenne connaît une nouvelle crise. Un ralentissement mondial a durement touché l’économie du pays, axée sur les exportations, en particulier les industries du transport maritime et de la construction navale, très importantes pour la Corée. Les chaebols, des conglomérats géants, sont également en difficulté et embauchent moins de personnes. La dette des ménages augmente ; en pourcentage du PIB, elle se situe parmi les plus élevées du monde industrialisé.

Pendant ce temps, la population coréenne est en général devenue surqualifiée pour les emplois disponibles. Comme une proportion plus élevée de jeunes atteignent l’université que dans n’importe quel autre pays de l’OCDE, beaucoup de diplômé.e.s n’arrivent pas à trouver de travail et beaucoup de celles et ceux qui y arrivent n’ont accès qu’à des emplois temporaires. Le taux de chômage des jeunes atteint près de 10%, soit environ trois fois la moyenne nationale. Les jeunes hommes et femmes, qui pouvaient coopérer et se marier en des temps plus prospères, se retrouvent plutôt en concurrence féroce pour les quelques bons postes disponibles.

« Les jeunes sont très frustrés, surtout les hommes, quand ils comparent leur vie à celle de la génération de leurs parents », explique Lee Mi-Jeong, chercheuse à l’Institut coréen de développement des femmes (ICDF). Et cette frustration est projetée sur les femmes. »

Un nouveau mouvement féministe

Une bonne part de cette antipathie n’a fait que bouillonner sous la surface jusqu’à l’apparition de Megalia ; en fait, l’histoire de sa création montre l’intensité et l’amertume des tensions actuelles en Corée. L’organisation est apparue au moment de l’éclosion en Corée, en mai 2015, du Syndrome respiratoire du Moyen-Orient, ou SRMO, une maladie qui a été identifiée pour la première fois en Arabie saoudite en 2012. Cette maladie a été associée à deux Coréennes qui l’avaient apparemment contractée à bord d’un avion les conduisant de Séoul à Hong Kong pour des vacances.

Après qu’elles aient refusé d’être placées en quarantaine à Hong Kong, ces femmes ont été brutalement attaquées par des participants à un réseau social coréen très populaire, DC Inside (hyperlien en coréen), l’équivalent du réseau Reddit aux États-Unis. Elles ont été qualifiées d’égoïstes, sous prétexte qu’elles avaient terni la réputation de la Corée à l’étranger. Même si ces femmes furent finalement placées en quarantaine, les propos tenus en ligne à leur sujet dégénérèrent au point où beaucoup les qualifiaient de « chiennes Kimchi », c.-à-d. de femmes obsédées par la richesse, et de « doenjang girls » ou « mangeuses de pâte de riz », une référence aux jeunes femmes qui économisent pour acheter des biens de luxe en se privant de denrées essentielles (le doenjang étant un type de ragoût bon marché).

Irritées par ces accusations liées au SRMO, certaines femmes ont répondu sur le même réseau social, en adoptant une pratique controversée que les militantes appellent « la stratégie du miroir », soit l’imitation du langage utilisé par les hommes contre les femmes. Elles ont traité leurs interlocuteurs d’« hommes Kimchi » en se moquant de leurs « pénis de 6,9 cm ».

Ces femmes ont quitté en masse le réseau DC Inside pour créer leur propre site, Megalian.com, qui fut perçu comme une provocation instantanée : le logo du site montre une main dont le pouce et l’index rapproché suggèrent un petit pénis.

Beaucoup de gens, y compris certaines féministes, disent que les tactiques de Megalia ont exposé l’organisation à des accusations de misandrie et qu’elles exacerbent la guerre sexiste. Certaines positions et actions controversées de Megalia incluent la divulgation du nom d’hommes gays mariés à des femmes. En ligne, des hommes qualifient les membres de Megalia de « chiennes folles », « complètement dédiées à haïr le sexe opposé », et certains hommes comparent même à Megalia à l’Organisation de l’État islamique (DAESH).

Mais les membres du groupe accueillent cette controverse. « Avant cela, le féminisme était très ennuyeux et académique en Corée », affirme une activiste de Megalia, une diplômée de l’université très cotée Ewha Women’s University de Séoul ; elle travaille pour une société étrangère et a parlé à Quartz sous la condition de l’anonymat. « 2015, dit-elle, a été une année incroyable. »

Meurtre, Gangnam style

L’activisme en ligne de Megalia et d’autres féministes a été, dans une certaine mesure, une réponse à la réalité d’une violence croissante à l’égard des femmes. En mai, une femme de 23 ans a été poignardée et tuée à Gangnam, un quartier abritant certains des plus grands et luxueux immeubles de bureaux, magasins et boîtes de nuit du pays. C’est arrivé alors qu’elle quittait une salle de bains dans un immeuble situé près de la sortie 10 du métro Gangnam, une zone aussi achalandée que Times Square à New York ou Oxford Street à Londres.

L’assassin, un homme de 34 ans, a dit à la police avoir commis ce crime parce qu’il avait été maltraité par des femmes dans le passé.

Des femmes ont afflué à cette sortie du métro dans les jours suivants pour rendre hommage à la victime en collant des affichettes sur les murs et en tenant des discussions publiques sur la misogynie. Selon des femmes ayant assisté à ces événements commémoratifs, des groupes de défense des droits des hommes ont contre-manifesté, en clamant qu’étiqueter ce crime comme un acte misogyne encourageait simplement la discrimination à l’égard des hommes.

Le 20 mai 2016, la ministre sud-coréen de l’Égalité des sexes, Kang Eun-hee,
examine sur le mur d’une sortie de métro de Séoul des affichettes placées
en signe de deuil après le meurtre brutal d’une femme de 23 ans,
dans un crime à caractère haineux. (EPA / Yonhap)

Le meurtre commis à Gangnam a fait ressortir le problème plus profond de la violence sexuelle infligée aux femmes. L’ICDF, financé par l’État, définit celle-ci comme le viol, les attouchements non consensuels et la prise sans consentement de photos ou de vidéos intimes. Les statistiques de l’ICDF révèlent une hausse du taux des violences sexuelles en Corée au cours des années récentes. Ces données ne font pas de distinction entre les hommes et les femmes, mais l’organisation précise que les victimes sont très majoritairement des femmes. Pour la chercheuse Lee Mi-Jeong, cette augmentation ne s’explique qu’en partie par le fait que plus de femmes sont prêtes à porter plainte que par le passé.

Évolution du nombre d’infractions de violence sexuelle en Corée du Sud : https://www.theatlas.com/charts/SyrYHW4h

Alors que les taux généraux de criminalité et d’homicide en Corée demeurent très faibles, les femmes sont plus nombreuses à être tuées que les hommes, ce qui est inhabituel dans un pays industrialisé, note M. Turnbull. L’Organisation des Nations Unies distingue le Japon, Hong Kong et la Corée comme certains des pays qui comptent les taux d’homicides les plus bas au monde, mais où la proportion de victimes masculines et féminines est proche de la parité. La violence contre les partenaires intimes est également un problème aigu au Japon (voir p.54-56 du document en hyperlien).

« En Corée, la proportion d’homicides qui se produisent au sein d’une relation intime est très élevée », souligne Madame Mi-jeong de l’ICDF. « Les hommes ont un pouvoir énorme dans la tradition confucéenne. Battre sa femme y était considéré comme une façon de la discipliner. »

Victimes masculines et féminines de meurtre dans divers pays en 2011 : https://www.theatlas.com/charts/rkS-Hfq6

Song Ran-hee, secrétaire générale de la Ligne téléphonique d’urgence des femmes de Corée, un groupe à but non lucratif qui fournit des services de conseil et d’hébergement aux femmes en ayant besoin, affirme que, bien qu’aucune statistique officielle ne soit tenue à ce sujet, les recherches de son organisation montrent qu’une femme est assassinée par un partenaire intime ou un ex-partenaire tous les trois jours en Corée.

Une femme est assassinée par un partenaire intime ou un ex-partenaire tous les trois jours en Corée.

« Il n’y a pas beaucoup d’armes à feu dans notre pays, mais on est plus en danger à la maison, » dit Song Ran-hee avec un rire amer. « L’idée que la Corée est un lieu sécuritaire ne s’applique qu’à nos rues. »

Harcèlement criminel et revenge porn

L’acte de rompre avec un copain est lui-même une décision lourde de danger en Corée, disent les jeunes femmes. Les crimes commis par des partenaires intimes ont augmenté ces dernières années, après le meurtre particulièrement horrible d’une femme par son partenaire l’an dernier quand elle a essayé de mettre fin à leur relation.

« Il existe une procédure qu’on appelle « la rupture sécuritaire » (anjeon ibeol) dont parlent les filles en Corée », explique Kim Ha-young, une militante de 23 ans et membre de Femidea, une organisation basée sur internet qui traduit en coréen des articles féministes rédigés à l’étranger. Plusieurs femmes ont confié à Quartz leurs craintes d’être harcelées, verbalement agressées, ou de voir des vidéos ou des photos prises en secret divulguées par un ex. Un article publié cette année dans le magazine Chosun Weekly (hyperlien au texte coréen) s’intitulait « Cinq conseils que je veux donner à ma fille pour rompre en toute sécurité » ; on y énumère des suggestions telles que « ne romps pas avec lui seule, dans un endroit isolé » et « menace de faire appel à la police s’il te harcèle ».

Le dénigrement des femmes se reflète dans l’industrie très prospère du porno en Corée et dans les médias en général. Alors que la pornographie est illégale dans ce pays, on trouve en ligne un véritable déluge d’images de femmes illégalement filmées sur des plateformes populaires comme Ilbe, une sorte de 4chan coréen animé par une idéologie de droite.

RPO (page Twitter en coréen) est une organisation féministe dont l’acronyme signifie « Non au revenge porn ». Elle est vouée à la suppression des sites Web qui hébergent des contenus tels que des photos prises sous les jupes des femmes, des vidéos filmées secrètement par des hommes et même des vidéos de viols en direct, nous a dit une membre de RPO, Yena (un pseudonyme), lors d’un récent rassemblement de féministes dans la ville d’Asan, juste au sud de Séoul.

Dans une grande victoire pour les féministes du pays, le site Web illégal Sora.net, qui hébergeait des photos prises sous les jupes des femmes et d’autres images et vidéos voyeuristes, a été fermé cette année après une intense campagne de pression du public et de groupes féministes en ligne. Ce site accueillait également des discussions invitant les hommes à violer leurs copines inconscientes et des conseils sur les sources auprès de qui acheter des drogues de viol lors de fréquentations.

Madame Song Ran-hee, de la Ligne d’urgence des femmes de Corée, dit également que les drames télévisés « tendent à donner une image romantique à la violence des hommes envers les femmes » ; elle se saisit un poignet d’une main et fait le geste de pousser quelqu’un contre le mur. « Ce genre de comportement est dépeint comme romantique. »

Les femmes parlent aussi de l’infantilisation, dans la culture populaire coréenne, et de critères de beauté qui sont également hypersexuels. La chirurgie plastique est très répandue, et est même encouragée par certains parents, vu l’importance de l’apparence personnelle dans la promotion sociale des femmes.

Montée du mouvement de revendication des droits des hommes

Si les femmes ont acquis une certaine mesure de pouvoir et d’autonomie en Corée, une préférence exprimée pour des enfants mâles au cours des années 1970 et 1980 a entraîné un excès d’hommes, et cette disparité contribue à des tensions. En 1990, la disponibilité de l’avortement sélectif a porté à 116,5 le ratio des sexes à la naissance en Corée, ce qui signifie que 116,5 garçons naissaient pour 100 filles. Ce ratio s’est égalisé depuis mais bon nombre de ces bébés mâles des années 1990 sont maintenant des hommes adultes incapables de trouver des copines et des épouses, dit M. Turnbull. Par ailleurs, un plus grand nombre de Coréennes choisissent de ne pas se marier du tout.

Revendiquer plus de droits pour les hommes n’est pas une idée marginale en Corée ; c’est devenu un phénomène courant. « Ce qui est frappant à propos de la situation actuelle, c’est la mesure dans laquelle … des hommes semblent très à l’aise de qualifier d’erronées les revendications des femmes pour plus de droits ou une plus grande protection », déclare Koo Se-woong, un ex-enseignant universitaire devenu directeur du site libéral de nouvelles Korea Expose.

Dans une manifestation de masculinisme extrême, le fondateur lourdement endetté du groupe des droits des hommes Man of Korea (hyperlien en coréen), Song Jae-gi, a décidé en 2013 de faire un coup d’éclat en sautant d’un pont pour amasser une centaine de milliers de dollars pour son organisation. Des caméras de télévision ont couvert en direct son saut dans la rivière Han. Les objectifs de cette organisation comprenaient l’abolition du Ministère de l’Égalité entre les sexes et dans la famille et l’indemnisation des hommes coréens pour leur service militaire (tous les hommes coréens doivent servir deux ans dans l’armée). L’exploit a mal tourné et le cadavre de Song a été retrouvé quelques jours plus tard.

Son organisation est aujourd’hui connue sous le nom d’ONG pour l’égalité entre les sexes (hyperlien en coréen), et sa page Facebook compte 35 000 appuis. Un représentant du groupe, interviewé après le meurtre commis à Gangnam, a déclaré qu’alors que la situation économique des hommes s’était aggravée en regard de celle de la génération de leurs pères, les femmes progressaient en raison d’une « discrimination inverse », même si l’on continuait à attendre des hommes le rôle de soutien de famille.

D’autres membres du groupe appuient aussi l’abolition du Ministère de l’Égalité entre les sexes et dans la famille, sous prétexte que son soutien aux familles monoparentales favorise le divorce. « Le taux de divorce est tellement élevé ces jours-ci … les femmes obtiennent habituellement la garde des enfants, et elles reçoivent alors de l’argent du gouvernement aussi bien que du mari », a écrit en mai dernier Jong Chan Lee sur la page Facebook de l’organisation.

Un pays peu favorable aux travailleuses

En dépit des protestations des hommes trouvant que le progrès social des femmes usurpe leur rôle économique traditionnel, les femmes sont encore loin de la parité dans les milieux de travail. Selon le Rapport 2015 sur l’inégalité hommes-femmes du Forum économique mondial, la Corée se classait à ce titre au 115e rang sur 145 pays, au-dessous du Libéria, des Maldives et du Burkina Faso, et juste au-dessus de la Zambie. Dans la catégorie « participation économique et possibilités », la Corée n’obtenait que le 125e rang. Les femmes ayant une formation universitaire ne gagnent qu’environ 66% du salaire mensuel des hommes ayant la même instruction, selon les données de l’ICDF. L’écart salarial médian entre les hommes et les femmes de Corée est le pire des pays de l’OCDE, soit 36,7% en 2014.

Évolution du salaire mensuel moyen des diplômé.e.s universitaires en Corée du Sud : https://www.theatlas.com/charts/BkBIXZVn

Selon les données de l’OCDE, beaucoup de Coréennes quittent le marché du travail à 25 ans. Kim Ha-rin, une étudiante en philosophie de 19 ans qui travaille à temps partiel chez McDonald’s, dit que certaines de ses collègues sont des femmes d’âge moyen qui ont été encouragées à quitter leur emploi au moment d’une grossesse et qui n’arrivent plus à trouver aujourd’hui autre chose que des emplois de misère. Selon l’ICDF, 40,2% des femmes au travail occupent des postes dits « irréguliers » en Corée, soit des contrats à court terme qui ne bénéficient pas de tous les avantages sociaux, alors que ce ratio n’est que de 26,5% chez les travailleurs masculins. Bien qu’il soit illégal en Corée de congédier de but en blanc des employées enceintes, des médias ont signalé en 2014 que les infirmières qui travaillent dans les hôpitaux n’étaient autorisées à devenir enceintes que selon un ordre prédéterminé.

Taux de participation des femmes à la population active dans divers pays, par catégorie d’âge :

https://www.theatlas.com/charts/rJT7GKz0

Pour beaucoup de femmes, ces contraintes signifient qu’elles doivent choisir entre avoir une carrière ou se marier et fonder une famille, ce qui inquiète le gouvernement coréen à un moment où hausser le taux de natalité constitue une urgence nationale. Ce taux n’était que de 1,24 en 2015, selon Statistique Corée, bien en deçà du taux de remplacement de 2,1. Au Japon, le taux de natalité s’est lentement rétabli au cours des dernières années en raison d’une série d’initiatives visant à améliorer les ressources de garde d’enfants et la culture d’entreprise.

« La crise (de la fécondité) fait peser un lourd fardeau sur les femmes. Le gouvernement a lancé des campagnes pour tenter d’inciter les femmes à avoir plus d’enfants ; mais en même temps, le gouvernement et la société projettent des messages contradictoires selon lesquels les femmes ne devraient peut-être pas être aussi ambitieuses et tenter plutôt d’avoir plus de bébés », explique Madame Moon.

Les filles n’ont pas besoin d’un prince

La phrase en coréen : « Kim Ja-yeon, la comédienne qui incarnait la voix de ‘Tina’, a été congédiée pour avoir porté ce t-shirt. »
(page Facebook de Megalia4)

Il est peu probable que les guerres sexistes que connaît la Corée se dissipent bientôt. On a vu récemment une employée de Nexon, une grande société de jeux vidéo, congédiée de son emploi de comédienne en voix off pour avoir diffusé une photo d’elle portant un t-shirt de Megalia où apparaissait le slogan « Les filles n’ont pas besoin d’un prince ». En réponse à cette mesure, le Parti de la Justice (Opposition) a ouvertement critiqué Nexon pour avoir enfreint les droits syndicaux de cette femme.

Certains membres du Parti de la Justice ont cependant trouvé plus humiliant d’être qualifiés de « sympathisants de la Corée du Nord » et ont quitté la formation, a déclaré un membre masculin du Parti au journal JoongAng Daily. « Megalia a fait merveille pour attirer l’attention sur le féminisme », dit Madame Koo Se-woong. Mais « Megalia est au féminisme ce que la Corée du Nord est pour les militants de l’opposition ; c’est un stigmate, une façon très commode de marginaliser les féministes ».

Quelques jours plus tard, le Parti de la Justice a retiré son soutien à l’employée de Nexon, en annonçant qu’il organiserait plutôt une « discussion visant à créer des moyens efficaces de surmonter les problèmes de discrimination sexuelle ».

Isabella Steger, le 23 octobre 2016

Version originale : http://qz.com/801067/an-epic-battle-between-feminism-and-deep-seated-misogyny-is-under-way-in-south-korea/

Traduction : TRADFEM

https://tradfem.wordpress.com/2016/11/30/coree-du-sud-des-lignes-daffrontement-claires

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