Pour élaborer sa position, l’organisme féministe a abordé le sujet sous trois angles : l’analyse féministe, la discrimination que vivent les femmes immigrantes ou racisées et le modèle québécois de laïcité.
L’analyse féministe
Dans le débat autour du port de signes religieux, le foulard islamique (hidjab) revient toujours.
L’analyse féministe, qui vise l’égalité entre les femmes et les hommes, ne peut ignorer l’existence d’inégalités entre les femmes elles-mêmes. On doit donc tenir compte du croisement des multiples discriminations subies par les femmes issues de groupes ethnoculturels et racisés, discriminations qui les contraignent à des situations de vulnérabilité et d’exclusion encore plus importantes que pour l’ensemble des femmes. Interdire le port de signes religieux dans les institutions publiques aurait pour effet d’augmenter la discrimination à l’égard de femmes déjà discriminées et d’entraver ainsi la poursuite de leur autonomie financière.
« Les principes de l’analyse féministe s’appuient, entre autres, sur la nécessité de respecter le rythme, les choix, les valeurs et les besoins des femmes concernées », d’ajouter Mme Asselin.
La discrimination vécue par les femmes immigrantes et racisées
La Fédération des femmes du Québec est d’avis qu’interdire le port de signes religieux dans les institutions publiques aurait pour effet d’augmenter la discrimination à l’égard de femmes déjà discriminées et de les stigmatiser au sein d’autres institutions ou milieux de travail, voire dans l’espace public. Le danger est réel qu’une mesure allant dans le sens de l’interdiction provoque un renfermement sur soi, un repli identitaire, de certains groupes minoritaires dans la société. Cette ghettoïsation favoriserait le maintien de traditions d’origine souvent défavorables aux femmes et, par conséquent, contraires à l’égalité entre les femmes et les hommes. Par sa prise de position contre l’interdiction du port de signes religieux, la FFQ prône plutôt le processus d’intégration à la société d’accueil, à ses valeurs et à ses droits fondamentaux, par un véritable accès à l’emploi tant dans les secteurs public que privé.
Le modèle québécois de laïcité
Le modèle qui prévaut au Québec en est un de laïcité ouverte, construit autour du devoir de tolérance. Il reconnaît la nécessité de la neutralité de l’État, mais aussi l’importance que plusieurs personnes accordent à la dimension spirituelle, et assure la protection de la liberté de conscience et de religion. Alors que la liberté de conscience inclut le droit de manifester sa croyance religieuse, la FFQ croit que les institutions publiques québécoises doivent permettre, autant à ses usagères et usagers qu’à son personnel, le port de signes religieux, visibles ou non. La neutralité de l’État est basée sur les actes que celui-ci réalise et non sur l’apparence des personnes qui le composent. En effet, des employées et employés pourraient faire de la propagande ou du prosélytisme tout en n’arborant aucun signe ou symbole religieux, et ainsi, nuire davantage à la neutralité de l’État.
« Les membres de la Fédération des femmes du Québec ont réaffirmé qu’elles sont pour la liberté religieuse, mais contre les intégrismes de toutes les religions. Nous entendons poursuivre sans relâche notre lutte contre les violations commises au nom des religions », de conclure Mme Asselin.