Il faut, dit-il, reprendre le pays des mains des oligarques (comme les frères Koch), ce qui est ni plus ni moins une « révolution politique ». Ce discours a une résonnance concrète au sein d’une population qui continue de subir les suites de la crise de 2007-08. En plus, Bernie affirme que sa campagne n’est pas seulement pour sa propre élection, et qu’elle vise dansa le fonds à favoriser la construction d’un mouvement politique et populaire. On sent par ses propos un certain réveil de la gauche américaine, qui était devenue fragmentée sur le plan social et organisationnel, une situation qui s’est aggravée à la suite de la déception face aux reculs de la présidence d’Obama.
Inconnu ou très peu connu à l’extérieur du Vermont, Bernie avec son message de lutte de classe est le premier qui affirme de telles positions depuis le grand leader socialiste américain, Eugene V. Debs, la seule personnalité qui est devenue nationale dans les États-Unis début du 20e siècle.
Aujourd’hui, même s’il reste en arrière de Clinton, Sanders persiste et signe. Il a peu de chances de l’emporter au final, d’autant plus que Clinton dispose de l’appui de l’establishment et des soi-disant super délégués, qui ne sont pas élus lors des primaires, mais nommés par le Parti Démocrate. Malgré cela, la course reste chaude puisque Sanders dispose maintenant, après les victoires spectaculaires en Alaska (82% des délégués), à Hawaï (71%) et l’état de Washington (73%) de 1012 délégués, contre 1251 pour Clinton. Il ne fait pas de doute que l’enthousiasme de l’électorat démocrate est du côté de Sanders, surtout parmi les jeunes qui savent que leur avenir est menacé par le 1%. Sanders va même chercher l’appui des jeunes femmes qui voient le lien entre leurs revendications féministes et la nécessité de confronter les distorsions du néolibéralisme. Même chose du côté de la base syndicale qui appuie Sanders, en dépit des liens entre la direction des grands syndicats et Clinton.
Les organisations de gauche entre temps s’interrogent. Aucune n’a une grande envergure nationale, mais plusieurs sont actives dans certaines régions (ce dont témoignent les victoires de plusieurs militants de gauche lors des récentes élections municipales), ou encore dans des secteurs spécifiques de la société (syndicalisme, mouvement étudiant, écolo, etc.). Donc, c’est une erreur d’ignorer cette réalité de gauche si peu connue aux États-Unis et même dans le monde. Pour le moment, la plupart des socialistes appuient Bernie en estimant qu’un mouvement populaire est en train de lever dans le sillon de sa campagne, et qui pourrait, éventuellement, déboucher sur un parti progressiste indépendant. On est loin de cela, mais on se permet de rêver…