Édition du 19 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Débat sur les politiques d’alliance

Jean-François Lessard réoriente sa campagne vers un illusoire raccourcis !

Jean-François Lessard réoriente sa campagne comme candidat au poste de co-porte-parole de Québec solidaire. Il ne se contente plus de proposer d’entreprendre des « discussions avec le Parti québécois en vue d’un pacte électoral impliquant un nombre limité de circonscriptions ayant une députation libérale ou caquiste, un pacte qui minimise les pertes financières pour le parti et qui amoindrit les coûts organisationnels pour nos instances locales et régionales. « . Il propose maintenant de soutenir la proposition 1.1 B déposée par l’Association d’Hochelaga-Maisonneuve. Que dit cette proposition ? Jean-François Lessard la résume ainsi : ‘tenter une alliance avec les cinq principaux partis d’opposition (PQ, CAQ, QS, PVQ, ON) afin d’établir un gouvernement majoritaire au sein « d’une assemblée nationale intérimaire qui n’aurait qu’une seule et unique mission : réformer la loi électorale afin de modifier le mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire, pour aboutir à de nouvelles élections provinciales anticipées, dans un délai raisonnable et crédible (6 à 12 mois) . »

Si une telle proposition avait rencontré le scepticisme qu’elle mérite, il aurait été sans doute possible d’ignorer le virage de Jean-François Lessard, mais l’accueil qu’elle a rencontré jusqu’ici nous oblige à apporter notre contribution critique à cette nouvelle dérive.

Construire un front avec des partis de la droite néolibérale (y compris avec un parti identitariste comme la CAQ) dans le but de former un gouvernement technique c’est opter pour la recherche désespérée de raccourcis. Entrer dans un gouvernement de coalition avec des néolibéraux et affirmer qu’un tel gouvernement pourrait mener les affaires courantes sans partisanerie (point f de la proposition), c’est à proprement parler délirant. Un an c’est long y compris pour un gouvernement supposément technique, et les mauvais coups que pourrait faire un gouvernement dominé par des partis de droite ne laissent présager rien de bon pour la population. Croit-on réellement qu’on peut accorder la moindre confiance à des politiciens néolibéraux liés par mille façons à l’oligarchie ?

En plus, on nous dit que ce fameux gouvernement technique où les partis nationalistes bourgeois seraient majoritaires appellerait à une élection dans les 12 à 18 mois après son élection. Vraiment ? Qu’elles seraient donc les conditions de bloquer la reprise du pouvoir par le PLQ ? Il serait nécessaire de s’engager dans une nouvelle coalition sinon à laisser le PLQ reprendre le pouvoir.

La recherche de raccourcis nous conduit sur des sentiers bien particuliers. Et je n’ai rien dit encore sur la faisabilité d’un tel projet. Le point d est particulièrement bizarre. On y affirme qu’on pourrait former une telle coalition sans tenir compte de la force réelle des partis dans la formation de la coalition. Pourquoi ces partis de l’oligarchie nous feraient-ils cette concession ? Voyons donc. Et ce serait ce genre de proposition qu’on ferait à Lisée dans le cadre d’éventuelles négociations ? Quand on sait que toute l’opération « main tendue » de Lisée a visé essentiellement à convaincre la base électorale de Québec solidaire, que le vote stratégique pour le PQ est la seule perspective réaliste et que malgré les divergences avec QS, le PQ est dans le camp des progressistes. Son opération est un appel à cesser de chipoter sur ce qu’il définit comme l’essentiel, battre Couillard et reporter le PQ au pouvoir.

Jean-François Lessard ne s’explique pas réellement sur les fondements de cette réorientation. Que des militant-e-s se laissent fasciner par une telle lubie est déconcertant. Que Facal nous propose de faire un tour dans une telle galère devrait pourtant éveiller notre prudence. [[Joseph Facal, Sortie de secours ? http://www.journaldemontreal.com/2017/05/04/sortie-de-secours

Québec solidaire porte un projet politique d’une indépendance qui lie la lutte pour l’indépendance à un projet de société inclusive, égalitaire, féministe et démocratique. C’est autour d’un tel projet qu’il faut rassembler la majorité populaire au Québec. Ce projet s’enracinera dans le cadre de la résistance active aux politiques néolibérales de la classe dominante. Toute tactique ou toute posture qui mine l’autonomie politique de la majorité populaire face aux manoeuvres de l’oligarchie dresse des obstacles à la réalisation de ce projet d’émancipation.

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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