Édition du 17 décembre 2024

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France

Il y a une alternative à l’austérité budgétaire : c’est la justice fiscale, Monsieur Barnier

Imposer les plus fortunés, supprimer les privilèges fiscaux nuisibles à l’environnement, renforcer les moyens de lutte contre l’évasion et les fraudes fiscales… Un collectif d’associations et de personnalités de la société civile rappellent les divers moyens d’éviter l’austérité budgétaire.

19 septembre 2024 | tiré du site entre les lignes entre les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/09/19/il-y-a-une-alternative-a-lausterite-budgetaire-cest-la-justice-fiscale-monsieur-barnier/#more-85815

Engager des coupes budgétaires drastiques tout en se refusant « en même temps » d’imposer les plus riches et les grandes entreprises : telle est l’orientation de la politique fiscale injuste et inefficace impulsée par Emmanuel Macron. Le président de la République a eu beau reconnaître le problème que pose la diminution des recettes fiscales, il a pourtant déclaré qu’aucune augmentation d’impôt n’était envisagée. En qualifiant l’idée d’une hausse d’impôt de « maladie française », il a confirmé qu’il n’y avait, à ses yeux, aucune alternative à l’austérité budgétaire. Loin des aspirations des Français·es qui sont favorables, selon les enquêtes d’opinion, à des hausses d’impôts à condition qu’elles ciblent les entreprises qui font le plus de profits et les plus aisés.

Ce choix a déjà eu de lourdes conséquences : les financements des services publics, de la protection sociale et de la lutte contre le dérèglement climatique sont frappés de plein fouet. Si cette politique fiscale était maintenue, il est à prévoir que les besoins sociaux et écologiques seront une fois de plus sacrifiés sur l’autel de l’austérité, aggravant davantage les inégalités. Dans une période d’affaiblissement du consentement à l’impôt, de distension du lien social, d’inquiétude face à l’avenir, l’extrême droite ne peut que tirer profit de cette politique injuste et injustifiée. Le chef de l’Etat, qui entend imposer ces vues malgré des désaveux électoraux et une situation politique complexe qu’il a lui-même créée, porterait alors une responsabilité immense dans cet échec global, démocratique, social, économique et écologique.

Répondre aux urgences sociales et écologiques

Sourd aux attentes d’une immense partie de la population, le gouvernement a multiplié les attaques contre notre modèle social, pourtant déjà bien fragilisé. Il a engagé un plan de coupes budgétaires qu’il entend mettre en œuvre coûte que coûte pour 2025. Le financement des urgences sociales et écologiques est clairement dans le viseur : aux 10 milliards d’euros d’économies prévues pour 2024 [1] pourraient s’ajouter 16 milliards d’euros d’économies supplémentaires qui toucheraient notamment le travail et la transition écologique. Le choix des secteurs visés est éloquent… Pendant ce temps, des coups répétés sont portés au logement social, au financement de l’hôpital public et de la protection sociale, et le ministre démissionnaire de la Fonction publique, Stanislas Guerini, a engagé au cours des derniers mois un travail de sape de la fonction publique en remettant en cause le statut des fonctionnaires, l’un des piliers du modèle social français. Rarement un pouvoir n’aura été aussi dogmatique dans ses choix.

Face à cette orientation écologiquement, socialement et économiquement délétère, de nombreuses voix s’élèvent pour formuler des propositions à portée de la main visant à rétablir le principe de justice fiscale et rééquilibrer un système fiscal mis à mal par les politiques néolibérales. A l’évidence, un tel rééquilibrage permettrait de combattre les inégalités et de renforcer le consentement à l’impôt, pilier d’une démocratie digne de ce nom. Il permettrait également de dégager les recettes nécessaires pour répondre aux besoins sociaux, relever les défis écologiques et énergétiques et contribuer à la solidarité à l’égard des pays du Sud Global, en première ligne du dérèglement du climat.

Une solution : la justice fiscale

Pour faire face à ces enjeux, nous avons besoin d’une action publique ambitieuse et d’une meilleure répartition fiscale. Nous rappelons à ce titre plusieurs principes : l’action publique et la protection sociale doivent avoir les moyens nécessaires pour répondre aux besoins de la population et pour préserver l’environnement ; les choix fiscaux et budgétaires doivent poursuivre la satisfaction de l’intérêt général et non des intérêts particuliers, ils doivent faire l’objet d’un véritable débat citoyen ; une fiscalité plus juste suppose de mettre à contribution les personnes et les entreprises de manière progressive, en fonction de leurs richesses et de leurs capacités contributives. Cela suppose de rétablir l’égalité devant l’impôt et de combattre résolument son évitement.

Sur cette base, et pour répondre au « ras-le-bol des injustices fiscales », plusieurs pistes se dessinent pour engager, à court terme, un rééquilibrage : d’abord mettre davantage les plus fortunés à contribution à travers une imposition du patrimoine juste et efficace. Ensuite, mettre fin aux privilèges fiscaux nuisibles à l’environnement et bénéficiant aux plus riches, mieux imposer les rentes de toutes sortes, comme les superprofits et les superdividendes, défendre la nécessité d’une véritable taxe sur les transactions financières et d’un relèvement de l’imposition des multinationales au sein de l’Union européenne, et enfin renforcer à tous niveaux les moyens de lutte contre les différentes formes d’évasion et de fraude fiscales.

Ces mesures sont légitimes et nécessaires. Nous appelons à participer aux différentes initiatives qui seront engagées pour défendre leur mise en œuvre, en particulier à l’occasion de la discussion sur le projet de loi de finances 2025. Nous appelons également la population à s’emparer de ces questions qui n’appartiennent qu’à elle, pour qu’un vrai débat citoyen s’engage et débouche sur des mesures de justice qui permettraient ainsi de « refaire société ».

[1] Avec notamment 200 millions de coupes sur le budget de l’apprentissage et autant sur la formation professionnelle, 400 millions d’euros pour le Fonds vert censé aider les collectivités territoriales, un milliard d’économies sur la rénovation énergétique et autant sur l’aide au développement.

Les signataires
Alexandre Derigny, secrétaire général de la fédération CGT Finances
Vincent Drezet, porte-parole d’Attac
Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de Droit Au Logement
Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France
Soraya Fettih, chargée de campagnes France 350.org
Anne Guyot Welke, porte-parole de Solidaires Finances Publiques
Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne

Organisations syndicales
Nathalie Bazire, membre du Bureau confédéral de la CGT
Caroline Blanchot, secrétaire générale de l’UGICT-CGT
Bernard Dantec, secrétaire général CGT Caisses d’épargne Ile-de-France
Daniel Fayard, secrétaire national-e du Mouvement National Lycéen
Judith Krivine, présidente du Syndicat des Avocats de France
Florentin Martorell, secrétaire général de la Fédération Indépendante et Démocratique Lycéenne (FIDL)
Julie Ferrua et Murielle Guilbert, co-déléguées de l’Union Syndicale Solidaires
Hania Hamidi, secrétaire générale de l’UNEF
Ismaël Nureni Banafunzi, membre du groupe d’animation du Syndicat de la Médecine Générale
Kim Reuflet, présidente du Syndicat de la Magistrature
Eléonore Schmitt, porte-parole de l’Union Étudiante
Benoît Teste, secrétaire général de la FSU

Associations et collectifs
Ana Azaria, présidente de Femmes Egalité
Farid Bennaï, référent national du Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP)
Jean Marie Bonnemayre, président du Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL)
Sylvie Bukhari-de Pontual, présidente du CCFD-Terre Solidaire Lucie Charlès, membre du bureau national des Effronté-es
Collectif d’Accès au Droit
Coordination Féministe
Fabien Cohen et Franck Gaudichaud, secrétaire général et co-président de France Amérique Latine
Marie Cohuet et Laura Thieblemont, co-présidentes des Amis de la Terre
Sandra Cossart, directrice de SHERPA
Marie-José Del Volgo, secrétaire générale de l’Appel des appels
Noura Elouardi, coordinatrice exécutive du CRID
Enima, Riposte Alimentaire
Catherine Faucogney, présidente du Comité de Vigilance pour le maintien des services publics de Haute Saône
Charlène Fleury, coordinatrice du réseau Rester sur Terre
Pascal Franchet, président du CADTM France
Antoine Gatet, président de France Nature Environnement
Karl Ghazi et Marie-Pierre Vieu, co-président·e·s de la fondation Copernic
Léa Geindreau, porte-parole d’Action Justice Climat
Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France
Eddie Jacquemart, président de la Confédération Nationale du Logement
Stephen Kerckhove, directeur général de Agir pour l’Environnement
Christian Khalifa, président d’INDECOSA-CGT
Martin Kopp, coordinateur national de GreenFaith
Noam Leandri, président du Collectif ALERTE
Isabelle Mathurin, co-présidente de Convergence services publics
Laetitia Navarro, présidente nationale de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC)
Gaëlle Nourry-Gardien, porte-parole d’Action non-violente COP21 (ANV-COP21)
Claire Nouvian, fondatrice et directrice de BLOOM
Silène Parisse, porte-parole d’Alternatiba
Evelyne Perrin, présidente de Stop Précarité
Jean-François Quantin, co-président du Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP)
Suzy Rojtman, porte parole du Collectif national pour les Droits des Femmes
Kahina Saadi, secrétaire générale d’Anticor
Antoine Sueur, président d’Emmaüs France
Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous
Eric Toussaint, porte-parole du réseau international CADTM
Marie Youakim, co-présidente de ritimo

Personnalités et universitaires
Christophe Alévêque, humoriste
Bruno Amable, économiste
William Bourdon, avocat
David Dufresne, fondateur du média Au Poste
Thomas Coutrot, économiste
Alexis Cukier, philosophe
Antoine Deltour, lanceur d’alerte
Bertrand Faivre, producteur de cinéma
Eric Fassin, sociologue
Bruno Gaccio, humoriste
Yannick Kergoat, réalisateur
Razmig Keucheyan, sociologue
Thierry Lambert, président de l’Institut international des sciences fiscales (2iSF)
Raphaël Liogier, professeur des universités, Sciences Po Aix-en-Provence
Yvan Le Bolloch’, artiste
Olivier Le Cour Grandmaison, universitaire
Lumi, vidéaste
Monté de Linguisticae, auteur et videaste
Noël Mamère, écologiste
Gustave Massiah, économiste
Guillaume Meurice, humoriste
Corinne Masiero, actrice
Gilles Peret, réalisateur
Edwy Plenel, journaliste
Denis Robert, journaliste
Anne-Sophie Simpere, journaliste et consultante
Alexis Spire, directeur de recherche au CNRS
Fanny Taillandier, écrivaine
Dominique Vidal, journaliste et historien

https://blogs.mediapart.fr/attac/blog/160924/il-y-une-alternative-lausterite-budgetaire-cest-la-justice-fiscale-monsieur-barnier

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