Édition du 19 novembre 2024

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France

France : Qui va trancher le nœud ?

Vendredi 23 août Macron a donc reçu une délégation des 4 principaux partis du NFP menée par Lucie Castets. Ensuite il a diné avec Attal, Philippe et Bayrou, a reçu Wauquiez et une délégation LR, le groupe LIOT, et même le PRG. Tous lui ont dit qu’un gouvernement Castets comprenant des ministres LFI serait l’abomination de la désolation, la fin du monde, la mort de la France et le suicide du petit cheval. Et nul ne doute que le RN, que Macron reçoit lundi, puis Mme Braun-Pivet et M. Larcher, lui diront la même chose.

25 août 2024 | tiré du site aplutsoc

La presse a donc titré vendredi soir : « Vers un refus de Macron à Castets pour Matignon » (Les Echos), « Comment la journée de consultation à l’Elysée a éloigné Lucie Castets de Matignon » (Le Monde).

Avant de poursuivre, constatons à nouveau l’effarant déni non seulement de la démocratie en général, mais des propres procédures rodées de fonctionnement des institutions de la V° République elle-même jusque-là, amplifiant leur caractère anti-démocratique à un niveau jamais atteint alors que jamais le président n’a été aussi isolé, discrédité, délégitimé : un gouvernement « démissionnaire » qui fait un budget d’austérité pour l’année prochaine et gouverne ad vitam aeternam, un président qui enjoint les groupes parlementaires de former une coalition pour laquelle personne n’a voté, et qui prend tout son temps après avoir précipité une campagne d’affolement ultra-rapide en dissolvant …

Le Canard Enchainé de mercredi dernier nous apprend même que Macron calcule, en cas de nomination d’une ou d’un nouveau premier ministre, de faire trainer la nomination des ministres eux-mêmes de façon à garder les « démissionnaires » le plus longtemps possible, au point que Bruno Lemaire en personne commence à se demander comment sortir de cette maison de fous !

Le front commun du RN à LIOT soi-disant contre un gouvernement avec des ministres LFI n’est d’ailleurs pas un front commun de soutien à Macron. Attal a déclaré qu’il allait bien falloir nommer un premier ministre venant « de l’opposition ». Mais laquelle, Wauquiez ayant répété que LR ne veut surtout pas y aller ?

Samedi 24 à 13h sur TF1, J.L. Mélenchon a lancé un excellent ballon d’essai : et si le gouvernement Castets ne comporte aucun ministre LFI, que feront les macroniens et la droite ?

La démonstration de la vérité, dont on ne doutait pas, a suivi rapidement : ces messieurs, de LR à Attal, ont commencé à dire qu’un gouvernement Castets sans LFI serait la même chose qu’un gouvernement Castets avec LFI, c’est-à-dire l’abomination de la désolation, la fin du monde, la mort de la France et le suicide du petit cheval !

Sur l’idée en elle-même d’un soutien sans participation de LFI, Lucie Castets a eu raison de déclarer que ce sont toutes les composantes du NFP qui ont « vocation à gouverner ». Nous avons suffisamment critiqué LFI pour pouvoir dire que sa présence dans un gouvernement unitaire est légitime. Le « coup de poker » de J.L. Mélenchon aide à lever les masques. Il s’inscrit par ailleurs dans une orientation politique pour laquelle le fait de battre Macron en le contraignant à nommer un gouvernement NFP n’est que l’accessoire, l’essentiel étant les présidentielles, en 2027 ou avant ; or, les présidentielles sont l’issue pour ce régime, elles servent à recharger les compteurs d’une V° République qui en a bien besoin. Et il est d’ailleurs opéré d’une manière toute bonapartiste, les militants LFI réunis étant tenus d’applaudir la surprise du chef (ce qu’ils font). Il est, d’ailleurs, ironique de voir droite et ci-devant macroniens dénoncer le programme du NFP comme étant soi-disant le « programme de LFI » alors que les propos de J.L. Mélenchon dans son long discours préalable, sur l’Ukraine dont il a dit que ses frontières en 2014 ont été « mises en question par les peuples eux-mêmes », sont contradictoires à ce programme.

Venons-en à l’essentiel. De quoi « LFI » est-il le faux nez pour ce bal des Tartuffes ?

Ce dont ils ont peur plus que de tout, c’est d’être acculés par une proposition de loi abrogeant la contre-réforme des retraites de Macron !

Ce dont ils ont peur plus que de tout, c’est d’être confrontés à des hausses des salaires !

Ce dont ils ont peur plus que de tout, c’est que la politique antijeune de casse de l’école publique commence à s’effondrer à la rentrée sous les coups que personnels, parents, élèves, vont porter au « choc des savoirs » de Macron-Attal, dont il ne faut pas oublier que l’aspirant ministre RN Chudeau disait que le RN l’avait inspiré !

Ces trois points : retraites, salaires, services publics, ces trois points n’ont pas dans le pays la majorité relative du vote NFP des 30 juin et 7 juillet, ils ont une ultra-majorité plus qu’absolue !

Voila pourquoi ils affichent leur vertu outragée à la simple possibilité, que les rapports de force tendent à imposer, d’un gouvernement Castets, et, au cas où, voila pourquoi ils préviennent qu’ils censureront tout de suite, « à cause des ministres LFI » et maintenant aussi s’il n’y en a pas, pour ne pas avoir à s’afficher en cas de vote sur la retraite à 64 ans !

Que dit l’article 49 de la constitution ? « Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des membres composant l’assemblée ». Même si les quelques 220 voix (celles de Braun-Pivet au perchoir) des ci-devant macroniens et LR réunis, sont plus nombreuses que les 193 à 210 que peut totaliser le soutien à un gouvernement NFP, il leur faut le RN pour censurer.

Contre la hausse des salaires, l’abrogation de la loi retraites et le retrait du « choc des savoirs », c’est d’ores et déjà à un bloc avec le RN que l’on a affaire. Les gesticulations sur « LFI » servent à masquer cette alliance sous-jacente. L’afficher serait gênant, tant pour le RN que pour la « droite » et le « centre ». Mais elle est là et bien là.

La rentrée, scolaire et aussi « sociale », approche. Le nœud gordien antidémocratique formé au sommet de l’Etat signifie pour l’immense majorité la baisse des salaires réels, des droits à la retraite et à la santé, la casse des services publics et l’inaction climatique. Ce qui leur fait peur à tous, c’est l’accélération de la crise politique en crise sociale. Car toute crise sociale, grèves pour les salaires, mouvements de défense de l’école publique … peut et doit maintenant se développer en mouvement politique.

Tout de suite, il s’agira d’imposer à Macron le gouvernement NFP à même de hausser les salaires et d’abroger la loi retraites, puis d’imposer si nécessaire à ce gouvernement qu’il respecte son mandat.

La dynamique de cet affrontement sera de chasser Macron et d’abolir la présidence et l’Etat de la V° République, d’imposer une constituante par en bas, et pas de relancer le régime par des présidentielles anticipées ou non se prêtant bien aux espoirs de Mme Le Pen.

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