Édition du 17 décembre 2024

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Amérique centrale et du sud et Caraïbes

Haïti-Salaire minimum : extorsion des ouvrières et ouvriers de la sous-traitance

Nous saluons le courage et la détermination des syndicats des ouvriers et ouvrières des usines de sous-traitance qui poursuivent la mobilisation contre la spoliation du fruit de leur travail. En dépit du climat de terreur instauré par le gouvernement à la solde des patrons, les travailleurs et travailleuses continuent à dénoncer la détérioration de leurs conditions de vie et de travail. En effet, les derniers ajustements du salaire minimum remontent à 2019 à un moment où, sous la pression des travailleurs et travailleuses, le régime a été contraint d’ajuster le salaire en prenant le soin de suivre les recommandations des patrons au détriment des travailleurs. Le salaire a été fixé à 500 gourdes en 2019, soit $5,13 américains.

Soulignons que cet ajustement a été à l’époque une mesure trompe l’œil dans la mesure où il ne représentait pas un changement dans les conditions de vie des travailleurs et travailleuses. En octobre 2018, le salaire minimum pour 8h de travail en usine textile était fixé à 420 gourdes, soit à l’époque $6,06 US. Novembre 2019 : le gouvernement fixe ce salaire à 500 gourdes ($5,13 US)1. Cela sous-entend que par rapport à 2018, les travailleurs et travailleuses ont moins de pouvoir d’achat en 2019. Depuis lors, les ouvriers ont perdu plus de 50% de leur pouvoir d’achat suite aux taux d’inflation annuels de plus 24 %.

Cette réalité salariale traduit en fait une exploitation sans pitié. Les patrons se servent de multiples stratégies d’extorsion des travailleurs pour augmenter infiniment leur profit. À titre d’exemple, ils ont procédé à des prélèvements sur l’assurance sans que ces montants ne soient envoyés aux agences d’assurance.

Le ministère des affaires sociales qui devrait obliger le patronat à appliquer le code du travail se trouve du côté de l’employeur. Depuis les dix dernières années, le régime PHTK constitue un cas classique où la présidence et la primature défendent les intérêts du patronat de façon décompléxée. Malgré la répression des forces de l’ordre et la menace des gangs armés à la solde du gouvernement et du patronat, les ouvriers et ouvrières défendent leurs droits d’exiger un salaire décent et de meilleures conditions de travail. Et cela se fait, le plus souvent, au péril de leur vie.

Le drame des ouvriers et ouvrières en Haïti ne se limite pas à ces problèmes au quotidien. Ils vivent avec l’angoisse permanente d’une éventuelle révocation. Au cours de l’année de 2021, plus 40 000 ont été mis à pied. Cette instabilité est inhérente à la réalité du secteur de sous-traitance : les propriétaires ont la latitude de délocaliser les usines du jour au lendemain. Le plus souvent, ils ne sont même pas astreints à dédommager les travailleurs conformément au code du travail. C’est en ce sens que, le 14 janvier 2022, la mobilisation des ouvrières devant les locaux de l’usine Best Sering Manufacturing S.A dénonçait les pratiques d’extorsion du patron Abraham qui s’apprêtait à déménager alors qu’il refusait de payer ses ouvrières.

Par ailleurs, la crise politique cache l’extrême violence de la lutte de classes dans le pays. Le régime PHTK a fait preuve de sa capacité à mobiliser non seulement les forces répressives et les institutions régaliennes de l’État pour défendre les intérêts des patrons et des compagnies multinationales, mais il recourt également à des milices et des gangs criminels pour tenir en respect les travailleurs et les travailleuses. C’est ce qui explique l’obsession des pays du Core group, dont les États-Unis, le Canada et la France, à soutenir sans langue de bois les malfrats du PHTK.

Comme à l’époque des Duvalier, ce régime constitue un bon allié pour la bourgeoisie locale et les compagnies multinationales qui exploitent la main d’œuvre à bon marché. Au moment où nous écrivons ces lignes, des manifestations ouvrières sont réprimées violemment par la police. Encore une fois le gouvernement de facto n’entend pas satisfaire aux revendications pourtant légitimes des travailleurs et travailleuses.

Face à ce constat, le REHMONCO renouvelle son soutien aux syndicats des ouvriers et ouvrières de la sous-traitance et des autres groupes opprimés en Haïti. En dénonçant l’ONU et les pays du Core group dans le maintien du chaos en Haïti, il encourage les travailleurs à poursuivre non seulement la mobilisation pour l’augmentation du salaire minimum proportionnellement au taux de l’inflation, mais également à renverser une fois pour toutes cet État néocolonial.

1- https://haiti.loopnews.com/content/sous-pression-le-president-jovenel-moise-augmente-le-salaire-minimum Voir également : https://www.alterpresse.org/spip.php?article12793, https://lenouvelliste.com/alaminute/21101/manifestation-ouvriere-pour-reclamer-1-500-gourdes-comme-salaire-minimum

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