Il accuse les opposants à l’exploitation du gaz de schiste d’être des "pseudo-environnementalistes". Pourtant, beaucoup de ces opposants sont des retraités comme lui, d’autres sont aussi des agriculteurs ; tous sont des citoyens engagés dans leur communauté et inquiets. Il accuse les opposants d’avoir des "tactiques douteuses par les opposants dans une population habituée au respect des idées des autres, à la courtoisie et au simple bon sens." De quelles tactiques douteuses s’agit-il ? Du simple bon sens, c’est ce que nous demandons tous de notre gouvernement, pourtant. M. Soucy reproche aux opposants d’avoir des interventions émotives et sans argument rationnel. Pourtant, si ces interventions s’appuient sur des études et rapports scientifiques fait par des experts, il semble les considérer comme de l’endoctrinement des gens "venus d’ailleurs".
Il dit que chez lui, il y a "des fermes prospères, des commerces et entreprises florissantes, des maisons propres et bien tenues. Nos gens ne sont peut-être pas tous des diplômés d’université, mais ils savent administrer un budget." Alors Saint-Édouard n’est pas désespérée financièrement au point d’accepter les quelques emplois offerts par le forage chez eux, donc. Il ajoute : "Le projet d’exploitation des gaz de schiste représente un apport économique indiscutable pour notre municipalité" et"les entreprises impliquées dans l’exploration des gaz de schiste ont dépensé, jusqu’ici, des millions de dollars dans l’économie locale". Ces millions, c’est en achat d’essence ? en déjeuners au restaurant du coin ? quelques emplois pour les chauffeurs de camions, des locations d’équipement lourd ?
Toujours en parlant d’économie, M. Gaétan Soucy de Saint-Édouard ajoute : "Demandons-nous, également, si nous pouvons, collectivement parlant, nous passer des redevances et retombées de cette industrie". A-t-il entendu les spécialistes en économie dénoncer le peu de redevances qu’en retire le Québec, dont le congé de redevances en exploration pour les 5 prochaines années ?
M. Soucy semble en avoir contre les interventions des gens qui ne sont pas de son voisinage. Il dit : "pas besoin d’être endoctrinés, dirigés par des gens venus d’ailleurs". Ne sommes-nous pas tous des Québécois ? Il a pourtant une oreille pour Questerre, dont la maison mère est à Calgary, en Alberta !
M. Soucy semble aussi s’en prendre au médias : "notre opinion devrait être prise un peu en considération par les médias qui n’en ont pourtant que pour les opposants". Pourtant, Charles Côté lui-même dans son historique du dossier depuis 30 ans publiée dans La Presse du 22 janvier 2011, Talisman et Questerre forent depuis 2006 à Bécancour, Forest Oil et Junex joignent le bal gazier au début de 2008 ! Ces activités n’étaient rapportées que dans les sections d’affaires des grands médias, et surtout dans les publications spécialisées. Ce n’est qu’en septembre 2009 que les médias daignent donner un peu de place à l’AQLPA et dans leurs reportages ajoutent au discours public certains impacts sociaux et environnementaux de l’exploitation du gaz de schiste et la fracturation hydraulique. Ce n’est qu’à grands efforts et d’heures de recherches que certains citoyens dont moi-même ont pu former une image plus complète du dossier des gaz de schiste et de ses impacts sur les communautés, sur notre environnement et surtout sur l’eau, et ce n’est qu’en joignant nos voix à des organismes plus connus comme l’AQLPA, MCN21 et Greenpeace, ainsi que grâce à l’appui d’artistes et de réalisateurs que les médias ont commencé à laisser de la place aux "citoyens ordinaires" baptisés opposants "pseudo-environnementalistes" et "militantisme fanatique de petites cliques" par M. Soucy.
"On pourrait au moins en faire le débat." dit M. Soucy. C’est pourtant ce que nous demandons tous ! Tant mieux si les gens de Saint-Édouard ont eu le choix d’accepter ou pas que l’on fore chez eux. D’autres communautés ont eu des forages à leur insu, d’autres forages sont projetés malgré l’opposition d’une bonne majorité des gens. Contrairement à ce que dit M. Soucy, nous ne cherchons pas à imposer nos idées aux autres. Nous tentons seulement de diffuser les informations que notre gouvernement et l’industrie ne daignent pas nous donner. "...un débat d’idées serein et libre" ne sera possible que si tous les avantages et désavantages des gaz de schiste sont connus par tous. Un moratoire, pour le moment, est la seule action sensée, car plusieurs experts avouent que nos connaissances sont insuffisantes pour en évaluer toutes les retombées et les impacts.
Johanne Dion
Présidente des Ami(e)s du Richelieu
