De plus, ce projet de loi prévoit un seul tribunal pour les questions liées au travail. En effet, les pouvoirs de la Commission des lésions professionnelles (CLP) et de la Commission des relations du travail (CRT) seront assumés par le nouveau Tribunal administratif du travail (TAT) qui comptera quatre divisions (relations de travail, santé et sécurité du travail, services essentiels, ainsi que construction et qualification professionnelle). « L’objectif est d’avoir une entrée unique de services gouvernementaux en matière de travail, c’est une première au Québec », a précisé le ministre Hamad en conférence de presse. Il soutient que les gens sont « mêlés » avec tous ces organismes. Voilà donc un motif pour ces fusions. L’autre motif, vous l’aurez deviné, c’est la question des économies évaluées à 15 millions de dollars d’ici trois ans. Bien que le ministre promette qu’il n’y aura pas d’abolitions de postes, il affirme du même souffle qu’il compte sur les départs à la retraite pour diminuer la masse salariale !
Avec ce projet de loi, le gouvernement consentirait à réduire de 12,5 % les contributions des employeurs versées à ce jour à la CNT. « Il s’agit d’une autre façon de diminuer la contribution des employeurs et celle du gouvernement, cette fois dans des organismes voués au travail qui jouent un rôle clé auprès des travailleuses et des travailleurs », a dénoncé le président de la CSN, Jacques Létourneau.
Plus qu’une fusion administrative
Beaucoup d’aspects du projet de loi démontrent des aberrations néfastes pour les travailleurs, entre autres :
• Fusion des services juridiques de la CSST et de la CNT (on craint notamment un conflit d’intérêts entre les services) ; • Perte d’expertise et missions des organismes dévalorisées ; • Disparition des assesseurs syndicaux et patronaux à la CLP qui interviennent en faveur de leur partie respective ; • Possibilité pour le tribunal d’imposer des frais, des honoraires et des tarifs, alors que ce n’est pas le cas maintenant ; • Possibles condamnations pour outrage au tribunal, amendes et peines d’emprisonnement ; • Disparition de l’obligation du tribunal de publier ses décisions ; • Obligation du syndicat étendue à la santé et à la sécurité pour ce qui est des articles 47.2 et suivants du Code du travail (non spécifié précisément, mais le texte laisse entrevoir cette possibilité).
Si le projet est adopté, nous constaterons les effets rapidement puisque l’échéancier est le 1er janvier 2016. On peut donc prévoir que le gouvernement souhaite faire adopter son projet de loi avant la fin de la présente session parlementaire, soit le 12 juin.
À l’image du Tribunal de la sécurité sociale (TSS) ?
Bien qu’il s’agisse de tribunaux bien différents quant à la nature des lois applicables, on ne peut s’empêcher de faire un parallèle entre les deux. En effet, les conservateurs avaient, en 2012, lors de la réforme de l’assurance-emploi, créé le TSS pour traiter les appels de décision en vertu des lois sur l’assurance-emploi, le Régime de pensions du Canada et la Sécurité de la vieillesse.
Les mêmes principes étaient évoqués : des économies et une réduction de la structure. Les économies ont été au rendez-vous, mais elles ont été réalisées sur le dos des travailleurs. La judiciarisation, la déshumanisation et la lenteur du processus découragent aujourd’hui les chômeurs à aller jusqu’au bout. Est-ce l’objectif souhaité par le projet de loi 42 ? En tout cas, il y a matière à s’inquiéter d’une éventuelle diminution des droits des travailleuses et des travailleurs.
Dany Pascazio Conseiller syndical