Tiré de Europe solidaire sans frontière.
« À quoi bon aller à l’école si demain notre monde est détruit », demandent ces jeunes. C’est le bon sens même ! Ces jeunes n’exagèrent nullement. La situation est en effet gravissime. La température moyenne du globe n’a augmenté que d’un degré depuis 1800, et le résultat est déjà inquiétant : canicules, vagues de froid, sécheresses, plus diluviennes, fonte des glaciers et des calottes glaciaires, cyclones plus violents, gigantesques incendies de forêt…
À deux degrés, les impacts seront catastrophiques. À partir de là, nous risquons de connaître un effet boule de neige du réchauffement. La Terre deviendrait une « planète étuve », la température pourrait gagner très vite 4°C. Des régions entières deviendraient inhabitables, des centaines de millions de gens seraient poussés sur les routes de l’exode, la biodiversité s’effondrerait et le niveau des mers monterait à terme de trois à quatre mètres. Ce ne serait plus une catastrophe, mais un cataclysme !
Conclusion : il faut tout faire pour ne pas dépasser le seuil de 1,5°C de réchauffement décidé lors de la COP21, à Paris. Mais les gouvernements ne le font pas. Sur base de leurs « plans climat », les spécialistes projettent un réchauffement compris entre 2,7 et 3,7°C… Au minimum, car de plus en plus de dirigeants sont tentés de nier la réalité, comme Donald Trump et le fasciste brésilien Bolsonaro !
En Europe, le gouvernement belge est un des plus hypocrites : le 2 décembre 2018, il félicitait les 75.000 manifestant.e.s pour le climat, le lendemain il refusait de soutenir deux directives européennes pour le climat ! Honte à ces Tartufes !
Le capital détruit nos vies et la planète
Les scientifiques sonnent le tocsin depuis plus de 25 ans. Pourquoi les émissions continuent-elles d’augmenter ? Pourquoi les gouvernements ne font-ils (presque) rien ? Parce qu’ils sont au service du capitalisme, que le capitalisme a pour seul but le profit, que le profit nécessite la croissance et que cette croissance est fondée historiquement sur l’énergie des combustibles fossiles (pétrole, charbon et gaz naturel).
Les renouvelables ? On les produit pour le profit, pas pour l’écologie. Si on produisait moins et qu’on partageait plus, ils suffiraient à satisfaire les besoins réels de l’humanité. Mais les multinationales refusent de lâcher leurs stocks d’énergie fossile et leurs équipements, les banques refusent de laisser tomber leurs capitaux placés dans ces stocks et ces équipements et les patrons de tous les secteurs n’ont qu’une idée en tête : exploiter toujours plus le travail et la nature afin de produire toujours plus et de faire plus de profit que la concurrence…
On nous dit que la croissance est la condition de tout : de nos emplois, de nos salaires, de notre sécurité sociale, de nos services publics, de notre niveau de vie. Ainsi, nos vies dépendraient de notre exploitation et de celle de la nature. En réalité, ce système productiviste détruit à la fois nos vies et la nature.
Aujourd’hui, nous sommes au bord de l’abîme
Aujourd’hui, nous sommes au bord de l’abime. Pour avoir une chance sur deux de ne pas dépasser 1,5°C de réchauffement, les émissions nettes mondiales de CO2 doivent diminuer de 58% entre 2020 et 2030. Puis elles doivent être ramenées à zéro en 2050, après quoi il faudra faire en sorte que la Terre absorbe plus de CO2 qu’elle n’en émet.
Sinon il faudra, soit se résigner à la planète étuve, soit faire appel à des technologies pour retirer artificiellement du carbone de l’atmosphère (« technologies à émissions négatives ») ou renvoyer une partie du rayonnement solaire vers l’espace (« géoingénierie »). Attention : il n’y a aucune garantie que ces technologies d’apprenti-sorcier fonctionneront. Il faudra en faire l’expérience directement grandeur nature, sur la Terre et le vivant qui l’habite…
Face à un danger mortel, l’instinct de conservation est mille fois légitime. Les lycéennes et lycéens ont donc mille fois raison de se mettre en grève. Ne restons pas les bras croisés. Soutenons-les face aux attaques de la droite pro-Trump et aux tentatives de récupération, d’où qu’elles viennent. Et suivons leur exemple !
Le social et l’écologie : un seul combat !
Les principales victimes du réchauffement sont celles et ceux que les gouvernements et le patronat attaquent sans relâche : les travailleurs et travailleuses, les paysans et paysannes, les enfants, les femmes, les pensionné.e.s, les malades… et les migrant.e.s !
Les riches se disent qu’ils et elles s’en sortiront toujours, quitte à vivre sur des îles artificielles réservées aux milliardaires. Pour sauver leurs privilèges et détruire nos conquêtes sociales et démocratiques, ils sont de plus en plus tentés par l’extrême-droite raciste, sexiste et climato-négationniste. Il est donc clair que le social et l’écologique sont les deux faces d’un même grand combat démocratique.
Ce combat ne fait que commencer. Le monde du travail doit y prendre place. Des gilets jaunes à la jeunesse, il est grand temps de faire converger les luttes et les revendications. Aujourd’hui, nos enfants sont dans la rue et en grève pour défendre leur droit à l’existence et celui de leurs enfants sur cette planète. Et nous, adultes, on fait quoi ? Nous devons être derrière eux ! C’est notre devoir et notre responsabilité.
Mobilisons-nous, par tus les moyens. Faisons la grève, nous aussi. Pas une grève en pantoufles : une grève active. Pour débattre à fond de toutes les injustices, de toutes les destructions et des moyens d’en finir avec le gâchis actuel, sur le plan social et sur le plan environnemental.
Pour un plan d’urgence écosocialiste
Est-il encore possible d’éviter le désastre climatique ? L’effort à faire est colossal. Il ne peut réussir qu’en combinant le social et l’écologique, dans la démocratie et la justice. Une transition écosocialiste est indispensable. Cela nécessite un plan d’urgence. Voici un ébauche en dix points :
1. Supprimer les productions inutiles et dangereuses (commencer par les armes !) et les transports inutiles de marchandises, localiser la production au maximum, lutter contre l’obsolescence programmée.
2. Créer des entreprises publiques chargées d’isoler et de rénover tous les bâtiments (sans surcoût pour les habitant.e.s).
3. Investir massivement dans les transports publics, décourager l’usage de la voiture privée. Rationner les voyages en avion.
4. Laisser les combustibles fossiles dans le sol. Exproprier et socialiser les secteurs de l’énergie et de la finance pour organiser une transition rapide vers une économie basée à 100% sur les renouvelables (sans nucléaire !).
5. Redistribuer les richesses, rétablir l’égalité devant l’impôt et la progressivité de l’impôt sur les revenus globalisés. Refinancer le secteur public, l’enseignement et le secteur des soins.Respecter la justice climatique.
6. Transférer au Sud les technologies et les moyens financiers nécessaires à un développement soutenable pour toutes et tous.
7. Rompre avec l’agrobusiness. Promouvoir une agriculture écologique faisant ce qu’il faut pour séquestrer le maximum de carbone dans les sols.
8. Partager le travail nécessaire entre toutes et tous, sans perte de salaire. Reconvertir dans les nouvelles activités les travailleurs et travailleuses des secteurs à supprimer (avec maintien du revenu et des conquêtes sociales).
9. Sortir du tout-au-marché : gratuité de l’enseignement, des transports, des soins de santé. Gratuité de la consommation d’eau et d’électricité correspondant aux besoins de base, tarification rapidement progressive au-delà de ce niveau.
10. Développer une culture du « prendre soin », de la transparence et de la responsabilité. Renforcer et socialiser les activités de soin aux personnes et aux écosystèmes. Accorder le droit de vote à tous et toutes. Reconnaître les droits de contrôle et d’initiative citoyenne et populaire, y compris la révocabilité des élu.e.s
Utopique ? Entre 1940 et 1944, le gouvernement des Etats-Unis a appliqué un plan d’urgence. La production militaire est passée de 4% à 40% du PIB et toutes sortes de restrictions ont été imposées. Ce qui s’est fait pour vaincre le nazisme et assurer la suprématie mondiale des multinationales étasuniennes peut se faire pour sauver le climat dans la justice sociale. C’est une question de volonté politique. À nous de l’imposer.
Daniel Tanuro
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